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Actualité

1806, 2024

Dissimulation des relations amoureuses au travail : gare au licenciement disciplinaire !

Dans un arrêt du 29 mai 2024, la Chambre sociale de la Cour de cassation a validé le licenciement pour faute grave d’un salarié ayant dissimulé sa relation amoureuse avec une autre salariée (Cass. Soc., 29 mai 2024, n°22-16.218).

Rappelons tout d’abord le principe selon lequel les salariés jouissent du droit au respect de leur vie privée, consacré tant par le droit national (article 9 du Code civil) que par le droit européen (article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme).

A ce titre, il est de jurisprudence constante qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire (Cass. Soc., 16 déc. 1997, n°95-41.326), sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail (Cass. Soc., 3 mai 2011, n°09-67.464 ; Cass. Soc., 8 nov. 2011, n°10-23.593).

En l’espèce, un salarié, exerçant des fonctions de direction dans l’entreprise et chargé de la gestion des ressources humaines, avait dissimulé à son employeur la relation amoureuse qu’il entretenait avec une salariée titulaire de mandats syndicaux et représentatifs.

La Haute juridiction a approuvé la position de la Cour d’appel de Nîmes ayant considéré que le salarié avait commis un manquement à son obligation de loyauté rendant impossible son maintien dans l’entreprise aux motifs que le salarié, qui avait notamment reçu une délégation pour présider les institutions représentatives du personnel, avait partagé des réunions avec sa compagne au cours desquelles avaient été abordés des sujets sensibles relatifs à des plans sociaux. Il a été jugé que cette relation intime était de nature à affecter le bon exercice de ses fonctions professionnelles.

Par cet arrêt, la Cour de cassation fait prévaloir l’obligation de loyauté sur le droit à la vie privée du salarié.

1806, 2024

Contestation d’un avis d’inaptitude : un assouplissement de la jurisprudence en vertu du droit à être jugé dans un délai raisonnable

Dans un arrêt du 22 mai 2024, la Cour de cassation a jugé qu’en cas de contestation d’un avis d’inaptitude, le juge prud’homal, qui fait face à une indisponibilité des médecins inspecteurs du travail pour réaliser une mesure d’instruction, peut désigner un autre médecin pour permettre son exécution (Cass. Soc., 22 mai 2024, n°22-22.321).

Pour mémoire, la procédure de contestation d’un avis d’inaptitude poursuit un objectif de célérité. Le salarié ou l’employeur peut contester l’avis émis par le médecin du travail dans un délai restreint de 15 jours à compter de sa notification devant le Conseil de prud’hommes statuant selon la procédure accélérée au fond (articles R. 4624-45 et L. 4624-7 du Code du travail).

L’article L. 4624-7 du Code du travail dispose que la juridiction prud’homale peut confier toute mesure d’instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l’éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence. L’article R. 4624-45-2 du même code ajoute qu’en cas d’indisponibilité ou de récusation du médecin précité, le Conseil de prud’hommes peut désigner un autre médecin inspecteur du travail que celui qui est territorialement compétent.

Toutefois, en pratique, les juges sont confrontés à une pénurie de médecins inspecteurs du travail.

En l’espèce, un salarié a contesté son avis d’inaptitude avec impossibilité de reclassement devant le Conseil de prud’hommes. Ce dernier a d’abord confié une mesure d’instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent. Or, ledit médecin n’exerçait plus. Le Conseil a ensuite recherché un autre médecin inspecteur du travail mais s’est heurté au refus de tous les médecins inspecteurs du travail recherchés.

Par conséquent, le Conseil a confié la mesure d’instruction à un médecin inscrit sur la liste des experts près la Cour d’appel.

L’employeur s’est pourvu en cassation afin d’obtenir la nullité de l’expertise au motif que seul le médecin inspecteur du travail est compétent pour éclairer le Conseil, à l’exclusion de tout autre type de médecin.

La Cour a rejeté le pourvoi au visa de l’article 6 paragraphe 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui consacre le droit à être jugé dans un délai raisonnable.

Cette décision devrait donc mettre fin aux situations de blocage rencontrées dans ce type de dossiers.

3005, 2024

Inaptitude du salarié : l’employeur n’a pas besoin d’attendre les précisions du médecin du travail pour commencer les recherches de reclassement

En cas d’inaptitude du salarié à son poste de travail, l’employeur doit rechercher à le reclasser sur un autre emploi, en prenant en compte l’avis et les préconisations émises par le médecin du travail (C. trav., art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

Afin de l’orienter dans ses recherches de reclassement, l’employeur peut solliciter des précisions du médecin du travail sur l’avis rendu.

La Cour de cassation est venue préciser, dans un arrêt rendu le 27 mars 2024, que l’employeur n’a pas l’obligation d’attendre le retour du médecin du travail pour engager ses recherches de reclassement.

Ainsi, l’employeur peut, comme c’était le cas en l’espèce, demander des précisions supplémentaires au médecin du travail, tout en entamant ses recherches de reclassement le jour même.

Le fait que le médecin du travail ait apporté postérieurement des précisions sur son avis ne remet pas nécessairement en cause le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement du salarié.

(Cass. soc., 27 mars 2024, n° 22-16.096)

3005, 2024

L’accès aux ASC du CSE ne peut être conditionné à l’ancienneté du salarié

En l’absence de position de la Cour de cassation sur ce point, certains CSE ont instauré une condition d’ancienneté pour l’accès des salariés aux activités sociales et culturelles (ASC), l’Urssaf admettant par ailleurs une condition d’ancienneté limitée à 6 mois.

Dans l’affaire ayant donné lieu à la décision de la Cour de cassation du 3 avril 2024, un CSE avait instauré un délai de carence de 6 mois avant de permettre aux salariés nouvellement embauchés de bénéficier des ASC.

A la suite de cette décision, le syndicat de l’entreprise a saisi le Tribunal judiciaire estimant que, si le CSE peut instaurer des critères de modulation pour l’attribution des ASC, il ne peut pas exclure totalement un salarié du bénéficie de ces activités. Or, en conditionnant l’attribution des ASC à une ancienneté minimale de 6 mois, le CSE excluait nécessairement tous les nouveaux embauchés, et les stagiaires.

La Cour d’appel avait débouté le syndicat de sa demande pour les motifs suivants :

  • La condition d’ancienneté de 6 mois était appliquée « de la même manière à l’ensemble des salariés, lesquels sont tous placés dans la même situation à l’égard d’un critère objectif qui ne prend pas en compte les qualités propres du salarié » ;
  • Les « critères considérés comme discriminants pour exclure certains salariés de l’attribution des ASC sont la prise en compte de l’appartenance syndicale et la catégorie professionnelle » ;
  • Le comité « est légitime, dans l’intérêt même des salariés, à chercher à éviter un effet d’aubaine résultant de la possibilité de bénéficier, quelle que soit l’ancienneté, des ASC du comité réputées généreuses ».

La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement, et censure la position de la Cour d’appel.

Au visa de l’article L. 2312-78 du Code du travail qui prévoit que les ASC sont « établies dans l’entreprise prioritairement au bénéfice des salariés, de leur famille et des stagiaires » et de l’article R. 2312-35 qui liste les ASC pouvant être établies dans l’entreprise, la Cour de cassation juge que l’ouverture du droit aux ASC « ne saurait être subordonnée à une condition d’ancienneté ».

Ainsi, le CSE ne peut plus instaurer de condition d’ancienneté pour l’accès des salariés aux ASC. En effet, tous les salariés, et stagiaires, de l’entreprise doivent avoir accès aux ASC, quelque soit leur ancienneté.

(Cass. soc., 3 avril 2024, n° 22-16.812)

3005, 2024

Rappels sur le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle

A travers un arrêt récent, la Cour de cassation fait quelques rappels sur le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle (Cass. soc., 07 mai 2024, n°22-10.905) :

1/ Tout d’abord, la Cour rappelle que les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que (i) l’inaptitude du salarié a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et (ii) que l’employeur avait connaissance de cette origine au moment du licenciement.

Tel était le cas en l’espèce dès lors que l’employeur savait que l’accident du travail était à l’origine du premier arrêt de travail du salarié et que ce dernier n’avait jamais repris le travail depuis la date de l’accident jusqu’à la rupture du contrat.

2/ Ensuite, forte de cette conclusion, la Cour retient que l’inaptitude du salarié était d’origine professionnelle et que ce dernier pouvait, à ce titre, bénéficier d’une indemnité d’un montant égal à l’indemnité compensatrice de préavis.

Toutefois, elle rappelle que cette indemnité n’a pas la nature d’une indemnité de préavis et n’ouvre donc pas droit à congés payés.

3/ Enfin, la Cour évoque les conséquences de l’absence d’information du salarié, par l’employeur, des motifs rendant impossible son reclassement (obligation découlant de l’article L. 1226-12 du Code du travail, lorsque l’employeur n’est pas dispensé de l’obligation de rechercher un reclassement).

Elle vient ainsi préciser que la méconnaissance par l’employeur de cette obligation n’expose pas celui-ci aux sanctions prévues par l’article L. 1226-15 du Code du travail (qui renvoie lui-même à l’article L. 1235-3-1 du Code du travail : « indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois »), mais le rend redevable d’une indemnité en réparation du préjudice subi.

Autrement dit, le salarié doit démontrer l’existence d’un préjudice et en justifier l’étendue pour bénéficier de dommages et intérêts au titre de la violation par l’employeur de son obligation de l’informer des motifs rendant impossible son reclassement. Le préjudice lié à l’absence d’information écrite n’est plus automatique, complexifiant ainsi la tâche du salarié.

Voir aussi : Contestation de l’avis d’inaptitude : point de départ du délai de recours et limitation des éléments médicaux transmis au médecin mandaté par l’employeur

904, 2024

La Cour de cassation reconnait encore de nouveaux préjudices automatiques

 

Jusqu’en 2016, la Cour de cassation appliquait la théorie du préjudice automatique afin d’indemniser des salariés en raison du manquement de l’employeur à ses obligations, sans qu’il ne soit nécessaire de démontrer un préjudice pour le salarié.

En 2016, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence et juge depuis que le salarié doit rapporter la preuve d’un préjudice afin d’être indemnisé (Cass. Soc. 13 avril 2016, n° 14-28.293).

Ce revirement n’est cependant pas total et la théorie du préjudice automatique a notamment subsisté en matière de durée maximale du travail (Cass. Soc., 26 janvier 2022, n° 20-21.636 ; Cass. Soc., 11 mai 2023, n° 21-22.281 ; Cass. Soc., 27 septembre 2023, n° 21-24.782).

Dans deux récents arrêts, la Cour de cassation a une nouvelle fois appliqué cette théorie du préjudice automatique :

  • En matière de non-respect du temps de repos journalier d’un salarié prévu par un accord collectif. À notre connaissance, c’est la première fois que la Cour de cassation applique la théorie du préjudice automatique s’agissant d’une disposition conventionnelle plus favorable que la loi (Cass. Soc., 7 février 2024, n° 21-22.80) ;
  • En matière de droit à l’image d’un salarié dont l’employeur avait usé sans obtenir l’accord de l’intéressé (Cass. Soc., 14 février 2024, n° 22-18.014).

Dans ces deux nouveaux cas, le salarié faisant une demande de dommages-intérêts n’a pas à justifier de son préjudice pour obtenir une indemnisation, même si le montant restera toujours à l’appréciation des juges du fond.

904, 2024

La recevabilité de la production de données personnelles issues d’un système de vidéosurveillance

La Cour de cassation a rendu récemment un arrêt qui démontre un infléchissement en matière de preuve illicite (Cass. soc., 14 février 2024, n° 22-23.073).

Dans cette espèce, une société constate des anomalies dans ses stocks et soupçonne d’abord un vol par des clients. Toutefois, à la suite du visionnage des enregistrements issus de la vidéo protection, cette hypothèse est écartée.

La responsable de la société décide alors de suivre les produits lors de leur passage en caisse et de croiser les séquences vidéo sur lesquelles apparaissaient les ventes de la journée avec les relevés des journaux informatiques de vente.

En moins de deux semaines, elle a alors relevé au total dix-neuf anomalies graves à la caisse d’une salariée, entraînant ainsi son licenciement pour faute grave.

Cette salariée conteste cette rupture en soulevant que la preuve des griefs qui lui sont reprochés est illicite dès lors qu’il s’agit de l’utilisation disproportionnée de données personnelles issues d’un système de vidéosurveillance.

Toutefois, les juges du fond ont souligné que le visionnage des enregistrements avait été limité dans le temps, dans un contexte de disparition de stocks, après des premières recherches restées infructueuses et avait été réalisé par la seule dirigeante de l’entreprise.

Ils en ont donc déduit que la production des données personnelles issues du système de vidéosurveillance était indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur et proportionnée au but poursuivi, à savoir le droit de veiller à la protection de ses biens, de sorte que les pièces litigieuses étaient recevables.

La Cour de cassation valide le raisonnement de la Cour d’appel, et considère qu’elle a mis en balance de manière circonstanciée le droit de la salariée au respect de sa vie privée et le droit de son employeur au bon fonctionnement de l’entreprise.

Attention toutefois, cela ne signifie pas que l’utilisation d’images issues d’un système de vidéosurveillance sera systématiquement considérée par les juges comme licite. Cette utilisation doit être indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée au regard du but poursuivi par l’employeur.

2501, 2024

Salarié protégé : pour être qualifié de lanceur alerte, le salarié doit étayer ses accusations

Selon l’article L. 1132-3-3 du code du travail, le salarié qui dénonce, de bonne foi, des faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, bénéficie d’une protection, notamment contre le licenciement.

Dans un arrêt du 8 décembre 2023, le Conseil d’État est venu préciser comment s’apprécie l’exigence de bonne foi attachée au statut de lanceur d’alerte pour un salarié protégé.

En l’espèce, un représentant syndical avait envoyé plusieurs mails à des collègues aux termes desquels il mettait en cause son ancien supérieur hiérarchique en l’accusant, sans plus de précision, de commettre un « délit d’abus de bien social », et dénonçait « une longue liste de délits », « des affaires de clientélisme, de népotisme, de conflits d’intérêts », des « prises illégales d’intérêts » ainsi que les « sombres activités de certains dirigeants ». Il avait également qualifié son supérieur hiérarchique de « sinistre personnage » et de « truand corrompu ».

Estimant que ces accusations caractérisaient un comportement fautif, son employeur avait sollicité une autorisation de licenciement acceptée sur recours hiérarchique.

Le représentant syndical a alors contesté cette décision, estimant qu’elle méconnaissait la protection des lanceurs d’alerte.

Dans son arrêt, le Conseil d’État précise qu’il appartient à l’autorité administrative de rechercher :

  • Si les faits dénoncés sont susceptibles de recevoir la qualification de crime ou de délit;
  • Si le salarié en a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, et
  • S’il peut être regardé comme ayant agi de bonne foi.

Lorsque ces trois conditions sont remplies, l’autorité administrative doit refuser d’autoriser le licenciement.

Au cas d’espèce, le Conseil d’État a estimé, au regard des pièces du dossier, que les accusations proférées par le salarié étaient rédigées en des termes généraux et outranciers, et qu’il n’a jamais été en mesure de les préciser, ou de les étayer par le moindre élément, malgré les demandes de précision de la direction.

Les juges en ont alors déduit que la condition liée à la bonne foi du salarié, nécessaire à l’application de la protection du lanceur d’alerte, n’était pas remplie, et ont jugé que le licenciement pour faute pouvait être autorisé.

On constate donc que le Conseil d’État a une appréciation plus large de la bonne foi que celle retenue par la Cour de cassation qui estime que la mauvaise foi ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits dénoncés par le salarié, et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis (Cass., soc., 13 sept 2023, n° 21-22.301).

Les employeurs, confrontés à une telle situation, devront donc être vigilants avant de lancer une procédure de licenciement, l’appréciation de la bonne foi n’étant, à date, pas la même selon que le salarié soit protégé ou non.

Conseil d’État, 4ème – 1ère chambres réunies, 08/12/2023, 435266

2201, 2024

Contestation de l’avis d’inaptitude : point de départ du délai de recours et limitation des éléments médicaux transmis au médecin mandaté par l’employeur

L’avis d’inaptitude émis par le médecin du travail peut être contesté par les parties au contrat de travail devant le Conseil de prud’hommes dans un délai de 15 jours à compter de sa notification. Afin de l’éclairer, la juridiction peut confier toute mesure d’instruction au médecin inspecteur du travail. De son côté, l’employeur a la possibilité de mandater un médecin pour garantir le respect du contradictoire (art. L.4624-7 et R.4624-45 du Code du travail).

Dans un arrêt du 13 décembre 2023, la Cour de cassation rappelle qu’en l’absence de preuve de la notification de l’avis d’inaptitude, le délai de contestation ne court pas (Cass. Soc., 13 déc. 2023, n°21-22.401 et 22-21.168).

Dans l’affaire commentée, l’employeur s’appuyait sur un courriel du médecin du travail attestant que la salariée s’était rendue personnellement dans les locaux de la médecine du travail pour récupérer son avis au cours de la semaine du 26 au 30 août 2019 pour soutenir que l’action engagée le 20 septembre 2019 était prescrite. Or, après avoir constaté qu’aucun élément ne permettait de retenir que l’avis dactylographié, mentionnant les voies et délais de recours, avait été remis personnellement à la salariée à l’issue de la visite, la Cour de cassation a rejeté son pourvoi.

De plus, la Haute juridiction limite les éléments médicaux que le médecin inspecteur du travail est tenu de communiquer au médecin mandaté par l’employeur. Il s’agit des éléments médicaux ayant fondé les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail, à l’exclusion de tout autre élément porté à sa connaissance dans le cadre de l’exécution de sa mission.

En l’espèce, l’employeur invoquait une atteinte au principe du contradictoire caractérisée par le refus du médecin inspecteur du travail de transmettre certains éléments au médecin qu’il avait mandaté. Toutefois, la Haute juridiction n’a pas cédé, protégeant ainsi le secret professionnel.

1312, 2023

La rupture conventionnelle, proposée comme alternative au licenciement, est-elle valable ?

Dans l’affaire qui a amené la Cour de cassation à se prononcer le 15 novembre 2023 (n° 22-16.957), l’employeur, après avoir constaté divers manquements du salarié l’amenant à envisager la rupture de son contrat de travail, lui avait fait la proposition suivante :

  • Accepter de rompre son contrat d’un commun accord, en signant une convention de rupture conventionnelle ;
  • Ou, à défaut, être licencié pour faute lourde.

Le salarié a fait le choix de signer une rupture conventionnelle, mais a ensuite sollicité l’annulation de cette dernière, estimant que son consentement avait été vicié, la convention ayant été signée sous la menace d’un licenciement pour faute lourde.

La Cour de cassation rappelle que l’existence, au moment de la conclusion de la convention de rupture, d’un différend entre le salarié et l’employeur n’affecte pas par elle-même la validité de la rupture conventionnelle.

En l’occurrence, la cour d’appel a constaté que le salarié n’avait pas usé de son droit de rétractation et n’établissait pas que la rupture conventionnelle avait été imposée par l’employeur. Ainsi, le salarié, qui ne rapportait pas la preuve d’un vice du consentement, a été débouté de sa demande d’annulation de la rupture conventionnelle.

En pratique, il n’est pas rare que l’employeur, qui envisage de licencier un salarié, lui propose de signer une rupture conventionnelle comme alternative à celui-ci. Si cette pratique n’est pas en soi prohibée, il faut garder à l’esprit qu’elle l’est tant que le consentement du salarié n’est pas altéré, ce qui peut être le cas dans un contexte de menace ou de violence exercée sur le salarié pour qu’il accepte la rupture conventionnelle (Cass. soc. 23-5-2013 n° 12-13.865 ; Cass. soc. 8-7-2020 n° 19-15.441).

Cass. soc. 15-11-2023 n° 22-16.957

112, 2023

Les récents apports de la Cour de cassation en matière de congés payés

Pendant plusieurs années, la Cour de cassation a pointé la non-conformité du droit français avec le droit de l’Union européenne en matière de congés payés dans ses rapports et suggéré une réforme, sans être entendue par le législateur. Face à l’inaction de ce dernier, à la mi-septembre, la Haute juridiction a rendu plusieurs arrêts marquants en la matière. Le cabinet Norma en analyse les conséquences ci-dessous :

 

  • Dans un premier arrêt, la Cour de cassation a jugé, au visa de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qu’en cas d’arrêt de travail pour maladie ou accident d’origine non professionnelle, les salariés doivent acquérir des congés payés ( Soc., 13 septembre 2023, n° 22-17.340), rejoignant ainsi la position européenne en la matière.

Pour rappel, il y avait une divergence entre le droit national et le droit européen sur ce point, car le Code du travail conditionne l’acquisition des congés payés à l’exécution d’un travail effectif et n’assimile pas les périodes de suspension du contrat de travail pour maladie d’origine non professionnelle à du travail effectif (art. L. 3141-3 et L. 3141-5 du Code du travail).

Or, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) avait adopté une position différente, au visa de l’article 7 de la directive 2003/88 du 4 novembre 2013 et de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui prévoit que tout travailleur a droit à une période annuelle de congés payés, sans conditions particulières.

 

  • Dans un second arrêt, la Cour de cassation, se fondant une nouvelle fois sur l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, a jugé qu’en cas d’arrêt de travail pour maladie ou accident d’origine professionnelle, l’acquisition des congés payés n’est plus limitée dans le temps. Désormais, les salariés acquièrent des droits à congés pendant toute la durée de leur absence (Cass. Soc., 13 septembre 2023, n°22-17.638).

Jusqu’à présent, le droit français limitait l’acquisition des congés payés au cours d’un arrêt de travail d’origine professionnelle à la première année de l’arrêt de travail (art. L. 3141-5 du Code du travail).

 

  • Dans un troisième arrêt, la Cour de cassation a jugé que ce le délai de prescription de trois ans en matière de rappel de salaire, appliqué à une demande de rappel de congés payés, ne court à compter de l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés auraient pu être pris, qu’à condition que l’employeur justifie avoir accompli les diligences qui lui incombent légalement afin d’assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé (Cass. Soc., 13 septembre 2023, n° 22-10.529).

Ainsi, dorénavant, en cas d’absence d’information du salarié par l’employeur, le délai de prescription de l’action en rappel de salaire pour les congés payés ne commence pas à courir et est donc inopposable en cas de contentieux, comme le prévoit depuis peu le droit de l’Union européenne (CJUE, 22 septembre 2022, n° C-120/21).

Cette jurisprudence est en l’état rétroactive et la Cour de cassation n’a pas précisé jusqu’à quand les salariés pourraient remonter afin de solliciter des congés payés ou une indemnité y afférant. Le conseiller doyen de la chambre sociale de la Cour de cassation, Jean-Guy Huglo, est récemment revenu sur la portée des arrêts du 13 septembre 2023 et a indiqué que, selon lui, les salariés pourraient revendiquer des congés au titre des arrêts maladie depuis le 1er décembre 2009, date d’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne qui a donné une force juridique contraignante à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne sur laquelle se sont fondées la Cour de cassation et la CJUE pour rendre leurs décisions en matière de congés payés. Une telle position devra cependant être confirmée par la jurisprudence à l’occasion d’un litige.

 

  • Enfin, dans un dernier arrêt, se conformant de nouveau au droit européen en citant notamment des arrêts de la CJUE et la directive 2010/18/UE du 8 mars 2010, la Cour de cassation a jugé que les congés payés acquis, mais non utilisés d’un salarié qui part en congé parental d’éducation sont reportés et conservés jusqu’à son retour de ce congé (Cass. Soc, 13 septembre 2023, n° 22-14.043).

Pour rappel, jusqu’à cet arrêt, la jurisprudence française, partant du principe que seule l’impossibilité de prendre les congés du fait de l’employeur pouvait donner lieu à une indemnisation, jugeait qu’un salarié partant en congé parental d’éducation sans avoir pris l’ensemble de ses congés payés en perdait le bénéfice (Cass. Soc., 5 mai 1999, n° 97-41.421 ; 28 janvier 2004, n° 01-46.314). Cela ne sera dorénavant plus le cas.

 

Ces décisions qui mettent en conformité la jurisprudence nationale avec la jurisprudence européenne vont nécessiter, outre une mise en conformité des textes du code du travail par le législateur, une adaptation des logiciels de paie des entreprises afin que ces nouveautés soient prises en compte.

2010, 2023

L’employeur ne peut pas conditionner le remboursement des trajets domicile-travail à un critère d’éloignement géographique

En application des articles L. 3261-2 et R. 3261-1 du Code du travail, l’employeur doit prendre en charge, à hauteur de 50% minimum, le prix des titres d’abonnements souscrits par les salariés pour les déplacements accomplis au moyen d’un transport public entre leur résidence habituelle et le lieu de travail.

Selon la Cour de cassation, l’employeur a l’obligation de prendre en charge les abonnements transports des salariés, quand bien même ils auraient choisi de vivre loin de leur lieu de travail (Cass. soc. 12-12-2012 n° 11-25.089).

Pour l’administration, l’obligation de prise en charge des frais de transports est de portée générale : les salariés qui ont établi leur résidence habituelle loin de leur lieu de travail, même pour des convenances personnelles, doivent en bénéficier (BOSS-FP-530).

Récemment, la Cour d’appel de Paris a rappelé, dans un arrêt du 14 septembre 2023, que l’employeur devait bien rembourser les frais de transport des salariés, quel que soit leur lieu de résidence.

Dans cette affaire, les salariés résidant dans une autre région que la région parisienne, et dont le temps de trajet entre leur domicile et le lieu de travail était supérieur à 4 heures de transports en train aller-retour, étaient exclus de la prise en charge financière de leurs abonnements, dès lors que cet éloignement géographique résultait de convenances personnelles.

Sans surprise, les juges ont estimé que l’employeur ne pouvait conditionner le remboursement des frais de transport en commun à un critère d’éloignement géographique, et l’employeur a été condamné à régulariser la situation.

CA Paris 14-9-2023 n° 22/14610.

1710, 2023

L’enregistrement à l’insu de l’employeur n’est pas constitutif d’un délit d’atteinte à la vie privée

La chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé dans un arrêt du 12 avril 2023 (n° 22-83.581) que l’enregistrement de l’employeur à son insu, par un délégué syndical ayant assisté un salarié lors d’un entretien préalable à un licenciement, n’était pas constitutif d’un délit d’atteinte à la vie privée prévu par l’article 226-1 du code pénal.

Selon la chambre criminelle, pour être constitué, un tel délit doit réunir les conditions cumulatives suivantes :

  • Un enregistrement au moyen d’un appareil quelconque ;
  • Des paroles prononcées dans un lieu privé par une personne sans consentement ;
  • Des paroles portant relevant de la sphère privée et intime.

Au cas d’espèce, les juges ont considéré que la dernière condition n’était pas remplie, car les propos enregistrés provenaient d’une conversation dans un cadre professionnel. Ils ont donc rejeté toute responsabilité du délégué syndical.

La Cour de cassation confirme ainsi une jurisprudence antérieure où elle avait validé un raisonnement analogue dans le cas où un salarié avait enregistré les propos d’un collègue lors d’un échange dans le bureau de ce dernier (Crim 16 janvier 1990, n° 89-83.075).

Cette confirmation de la jurisprudence de la chambre criminelle doit amener les employeurs à davantage de précautions lors des échanges avec les salariés, d’autant plus depuis que la chambre sociale a fait évoluer sa jurisprudence sur la recevabilité de preuves issues de dispositifs illicites, acceptant leur production sous réserve d’un contrôle de proportionnalité entre le droit au respect à la vie privée et le droit à la preuve.

1010, 2023

Dispense de reclassement du salarié inapte : attention à la rédaction de l’avis d’inaptitude

Dans une affaire soumise à la Cour de cassation le 13 septembre 2023 (n°22-12.970), les juges se sont prononcés sur la dispense expresse de reclassement d’un salarié déclaré inapte à son poste par le médecin du travail.

Le médecin du travail avait indiqué dans l’avis d’inaptitude que « Tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ».

L’employeur a alors estimé qu’il était expressément dispensé, par le médecin du travail, de rechercher un emploi où reclasser le salarié inapte. Le salarié a donc été licencié pour inaptitude, sans que l’employeur n’effectue de recherches de reclassement.

Estimant que l’avis d’inaptitude ne dispensait par l’employeur de cette recherche de reclassement, le salarié a contesté son licenciement.

La Cour de cassation rappelle que lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudice à sa santé ou que l’état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l’employeur est effectivement dispensé de chercher un reclassement.

Or, dans cette affaire, le médecin du travail avait indiqué que tout maintien du salarié dans un emploi de cette entreprise, serait gravement préjudiciable à la santé du salarié.

Pour les juges, cette indication n’impliquait pas l’éloignement du salarié de toute situation de travail, et ne dispensait pas l’employeur de procéder aux recherches de reclassement.

Les juges estiment donc que l’employeur a manqué à son obligation de reclassement et le licenciement pour inaptitude physique est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La décision peut paraitre sévère à l’égard de l’employeur, mais est, en réalité, conforme à la position du législateur qui a souhaité réserver la dispense aux seuls cas dans lesquels le salarié est inapte à tout emploi, quel qu’il soit.

Cette décision incite à la vigilance quant à la rédaction de l’avis d’inaptitude. En cas de doute sur la formulation utilisée par le médecin du travail, nous vous conseillons de solliciter ce dernier, pour obtenir une précision sur la portée de l’avis d’inaptitude.

Cour de cassation le 13 septembre 2023, n°22-12.970

2209, 2023

Inaptitude au poste et reclassement : l’employeur doit-il proposer des postes d’une catégorie d’emploi supérieure ?

* Dans l’affaire soumise au Conseil d’Etat le 21 juillet 2023, l’employeur avait sollicité l’autorisation de licenciement pour inaptitude physique, d’un salarié protégé.

L’inspecteur du travail, puis le ministre du travail, avaient refusé de délivrer cette autorisation au motif que la société n’avait pas satisfait à son obligation de recherche sérieuse de reclassement. Toutefois, ces décisions, étant entachées d’un vice de procédure, le Tribunal administratif les a annulées.

Le salarié s’est alors vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

La société a ensuite recherché la responsabilité de l’Etat afin d’obtenir réparation du préjudice du fait de l’illégalité des décisions de refus d’autorisation de licenciement.

* Pour statuer sur l’indemnisation du préjudice de la Société, le Conseil d’Etat était amené à vérifier si l’employeur avait bien respecté son obligation de reclassement.

Le Conseil d’Etat a alors rappelé qu’en cas d’inaptitude physique médicalement constatée par le médecin du travail, le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l’employeur n’a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé.

Dans cette affaire, les juges ont relevé qu’il existait d’autres postes de travail équivalents aux foncions exercées par le salarié inapte, qui ne lui avaient pas été proposés par la Société.

Pour le Conseil d’Etat, les emplois disponibles dans l’entreprise étaient équivalents à l’emploi précédemment occupé par le salarié, quand bien même ces derniers relevaient d’une catégorie d’emploi, celle de cadre, supérieure à celle à laquelle appartenait le salarié, employé en tant qu’agent de maîtrise.

Pour le Conseil d’Etat, « cette seule circonstance ne saurait, par elle-même, faire obstacle à ce que ces postes aient été au nombre de ceux qui devaient être proposés par l’employeur au salarié au titre de ses obligations en matière de reclassement ». Et ce, même si, admet-il, « il pouvait en être tenu compte, parmi d’autres éléments, pour apprécier la comparabilité des postes disponibles aux fonctions jusqu’alors exercées » par le salarié.

Autrement dit, un poste d’une catégorie d’emploi supérieure à celle du salarié inapte ne doit pas être exclu d’emblée des postes susceptibles d’être proposés au salarié au titre du reclassement. En effet, dès lors qu’au regard du contenu du poste ou du profil du salarié, ce dernier est susceptible de l’occuper, il y a lieu de le lui proposer.

Les juges ont donc estimé que la Société n’avait pas respecté son obligation de reclassement, et ont débouté la Société de sa demande d’indemnisation.

CE 21 juillet 2023, n° 457196

1707, 2023

Une preuve illicite n’est pas recevable en justice dès lors que l’employeur dispose d’un autre moyen de preuve

Dans un arrêt du 8 mars 2023, la Chambre sociale de la Cour de cassation est venue compléter sa jurisprudence en matière de recevabilité de la preuve (Cass. Soc., 8 mars 2023, n°21-17.802).

Rappelons que la Haute juridiction considère, depuis un arrêt « AFP » du 25 novembre 2020, que l’illicéité d’un moyen de preuve n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats (Cass. Soc., 25 novembre 2020, n°17-19.523).

Dans l’affaire commentée, une salariée a été licenciée pour faute grave pour vols et abus de confiance. A la suite d’un audit mis en place au sein de l’entreprise, l’employeur avait des soupçons, qui ont ensuite été confirmés par des images de vidéosurveillance. La salariée a contesté son licenciement. Dans le cadre du contentieux, l’employeur produisait les images de vidéosurveillance, mais pas le rapport d’audit, estimant manifestement que les premières constituaient la preuve irréfutable et suffisante des vols commis.

La Cour d’appel a tout d’abord considéré que les images issues de la vidéosurveillance étaient illicites car l’employeur n’avait pas informé la salariée du dispositif ni sollicité d’autorisation préfectorale.

Elle a ensuite jugé que la production de la vidéosurveillance n’était pas indispensable à l’exercice du droit à la preuve dans la mesure où il existait d’autres éléments susceptibles de révéler les irrégularités reprochées à la salariée.

La Cour de cassation a validé cette interprétation, considérant que la production des enregistrements litigieux n’était pas indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur, dès lors que celui-ci disposait d’un autre moyen de preuve qu’il n’avait pas versé aux débats.

En conclusion, il demeure périlleux d’étayer un licenciement au moyen de « preuves illicites ». Cela doit rester un ultime recours.

Voir aussi : La vie privée à l’épreuve du droit à la preuve

1707, 2023

Nullité du licenciement pour dénonciation du harcèlement moral : la Cour de cassation abandonne l’exigence de qualification des faits

Le Code du travail protège le salarié ayant relaté des agissements de harcèlement moral. Dès lors, si le salarié été licencié pour avoir dénoncé des faits de harcèlement moral, son licenciement est nul, sauf en cas de mauvaise foi, c’est-à-dire si le salarié avait connaissance de la fausseté des faits dénoncés (art. L. 1152-2 et L.1152-3 du Code du travail).

Préalablement à l’arrêt objet du présent commentaire, la Cour de cassation conditionnait la protection du salarié à la qualification des faits de harcèlement moral (Cass. Soc., 13 septembre 2017, n° 15-23.045).

Toutefois, dans un arrêt du 19 avril 2023, la Haute juridiction a assoupli sa jurisprudence (Cass. Soc., 19 avril 2023, n° 21-21.053).

En l’espèce, une salariée a été licenciée pour faute grave pour avoir mis en cause l’attitude et les décisions prises sa direction. Considérant avoir subi et dénoncé des agissements de harcèlement moral, elle a saisi le Conseil de prud’hommes afin que la nullité de son licenciement soit reconnue. La Cour d’appel a fait droit à sa demande.

L’employeur a alors formé un pourvoi en cassation, en s’appuyant sur la jurisprudence de 2017 qui imposait au salarié de qualifier les faits de harcèlement moral afin de bénéficier de la protection. L’employeur soulignait que la salariée n’avait jamais mentionné le terme de « harcèlement » dans son courrier ayant fondé son licenciement pour faute grave.

Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation a procédé à un revirement de jurisprudence. Elle considère désormais que, lorsqu’au regard des termes employés par le salarié, l’employeur ne pouvait légitimement ignorer que le salarié dénonçait des faits de harcèlement moral, alors le salarié bénéficie de la protection contre le licenciement, peu important qu’il n’ait pas qualifié les faits de harcèlement moral au moment de leur dénonciation. En l’espèce, la salariée avait fait état d’une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, ce qui caractérise le harcèlement moral et suffit donc à lui attribuer le bénéfice de la protection.

En conclusion, prudence avant de licencier un salarié ayant dénoncé des faits pouvant constituer un harcèlement moral !

1107, 2023

Forfait jours : le mode de décompte des jours travaillés ne doit pas porter atteinte à l’autonomie des salariés

En application de l’article L. 3121-58 du Code du travail, seuls les salariés autonomes dans l’organisation de leur emploi du temps peuvent conclure une convention de forfait en jours sur l’année.

Sauf contrainte liée à l’organisation du travail, cette autonomie doit être réelle et complète, ce qui n’est pas compatible avec le fait, par exemple, de devoir respecter un planning (Cass. soc., 31 oct. 2007, n° 06-43.876).

Récemment, la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 7 juin 2023, que le forfait jours était incompatible avec l’obligation faite au salarié, de pointer lors de chaque demi-journée de travail, ce pointage donnant lieu à des relevés informatiques reprenant chaque jour les heures d’arrivée et de départ et le nombre d’heures travaillées (Cass. soc., 7 juin 2023, n° 22-10.196).

Les juges relèvent également que le collaborateur concerné devait comptabiliser six heures de présence dans l’entreprise, pour qu’une journée de travail soit décomptée de son forfait, élément qui remettait également en cause l’autonomie du salarié à organiser de son emploi du temps.

La Cour de cassation en déduit donc que le salarié, dépourvu d’autonomie dans la gestion de son emploi du temps, ne pouvait conclure de convention de forfait jours : il se voit alors appliquer la durée de travail de droit commun (35h/semaine) et peut, entre autres, revendiquer le paiement d’heures supplémentaires.

Cette décision complète la jurisprudence de la Cour sur le forfait jours, et tente d’en préciser le contour en faisant cohabiter, préservation de l’autonomie du salarié, critère d’éligibilité du salarié au forfait jours, et obligation de contrôle de l’employeur. Il s’agit ici de rappeler que le contrôle de l’employeur porte sur la charge de travail et le nombre de jours de travail, et ne saurait consister en des relevés horaires.

Voir aussi : Forfait jours, entre autonomie du salarié et pouvoir de direction de l’employeur.

3005, 2023

Précision des motifs économiques en cas d’acceptation du CSP par le salarié

En cas de licenciement économique et de proposition du contrat de sécurisation professionnelle (ci-après CSP) au salarié, l’employeur doit lui notifier le motif économique de la rupture de son contrat de travail, par écrit, au cours de la procédure de licenciement et au plus tard au moment de son acceptation du CSP. A défaut, le licenciement est considéré comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 18 janvier 2023, n° 21-19.349).

Néanmoins, dans un arrêt rendu le 05 avril dernier, la Cour de cassation offre une possibilité de rattrapage à l’employeur et a considéré qu’il pouvait préciser, soit à son initiative, soit à la demande du salarié, le motif économique de la rupture du contrat dans le délai de 15 jours suivant l’adhésion du salarié au CSP (Cass. soc., 05 avril 2023, n° 21-18.636).

En effet, depuis le 1er janvier 2018, l’employeur peut, soit à son initiative soit à la demande du salarié, préciser les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du licenciement (articles L. 1235-2 et R. 1233-2-2 du Code du travail).

La Cour de cassation a alors appliqué cette procédure de rattrapage dans l’hypothèse d’un licenciement pour motif économique à la suite de l’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle (CSP).

Toutefois, nous rappelons que l’employeur reste tenu d’énoncer l’ensemble des motifs économiques de la rupture du contrat de travail (cause économique et incidence sur l’emploi ou le contrat) dans le document remis au salarié au plus tard au moment de l’acceptation du CSP. Ce n’est qu’en cas d’imprécision (et donc à titre exceptionnel) que l’employeur pourra, dans un délai de 15 jours suivant l’adhésion du salarié au CSP, apporter des précisions sur les motifs économiques de la rupture.

Voir aussi : Des précisions sur le licenciement économique d’un salarié en arrêt maladie

3005, 2023

Refus du licenciement d’un salarié protégé et versement des salaires au titre de la mise à pied conservatoire

En application de l’article L. 2421-3 du Code du travail, si le licenciement pour faute grave d’un salarié protégé, justifiant le prononcé d’une mise à pied à titre conservatoire, est refusé par l’Inspection du travail, alors sa mise à pied conservatoire est annulée et ses effets supprimés de plein droit.

Or, dans un cas d’espèce récent, un salarié protégé était placé en arrêt maladie le jour même de sa convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave et de la notification de sa mise à pied à titre conservatoire. Aucune précision horaire ne permettait de savoir lequel des évènements (entre le placement en arrêt maladie et sa convocation) était antérieur à l’autre.

Dès lors que le salarié était en arrêt maladie, il percevait des indemnités journalières de sécurité sociale et un complément de salaire versé par l’employeur.

Par la suite, l’Inspection du travail a refusé le licenciement du salarié protégé pour faute grave.

Le salarié a alors réclamé le versement de l’intégralité de son salaire pendant la période de mise à pied conservatoire compte tenu de l’annulation de celle-ci, et malgré la perception des indemnités journalières de sécurité sociale.

La Cour de cassation a considéré qu’il appartenait à l’employeur de verser au salarié l’intégralité des salaires afférents à la période de mise à pied conservatoire, peu important qu’il soit placé en arrêt maladie, dès lors que l’inexécution par le salarié de toute prestation de travail durant cette période avait pour unique cause la mise à pied prononcée à titre conservatoire par l’employeur (Cass. soc., 29 mars 2023, n°21-25.259).

Voir aussi : Sanction disciplinaire : attention à ne pas épuiser votre pouvoir disciplinaire !

905, 2023

Le CDD multi-remplacement est relancé !

La loi sur le marché du travail du 21 décembre 2022 a réactivé l’expérimentation du CDD « multi-remplacement » lancé en 2019.

Le décret n°2023-263, permettant la mise en œuvre effective de l’expérimentation, a été publié le 13 avril 2023.

Depuis cette date, il est possible de conclure, dans certains secteurs d’activités listés par le décret (sanitaire, social et médico-social, Industries alimentaires…), un CDD ou contrat de travail temporaire pour assurer le remplacement de plusieurs salariés absents.

La conclusion de CDD ou CTT « multi-remplacement » est possible jusqu’au 13 avril 2025.

Le CDD « multi-remplacement » constitue une dérogation à la règle classique selon laquelle un seul CDD ou CTT ne peut être conclu que pour le remplacement d’un seul salarié.

Compte tenu de cette particularité, un certain nombre d’interrogations ont émergé, amenant le ministère du travail à publier un questions-réponses portant tant sur les modalités de rédaction du contrat, que sur sa durée ou son terme.

Au regard des exigences particulières liées à la rédaction et à la gestion de ces contrats, et du risque de requalification du CDD en CDI, il convient d’être particulièrement vigilant lors de la conclusion de ces contrats.

2903, 2023

La Cour de cassation précise le niveau d’établissement du registre spécial en matière de risque grave sur la santé publique ou l’environnement

Parmi les différentes alertes pouvant être émises par un salarié ou un représentant du personnel au CSE, le code du travail prévoit aux articles L. 4133-1 et suivants, une alerte en matière de santé publique et d’environnement.

 

Une telle alerte peut être émise par un salarié ou un représentant du personnel au CSE lorsqu’il estime, de bonne foi, que les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement font peser un risque grave sur la santé publique ou l’environnement.

 

Une telle alerte doit être consignée dans un registre spécial qui doit être tenu à la disposition des représentants du personnel, mais le code du travail ne prévoit pas à quel niveau ce registre doit être établi et, jusqu’à présent, la jurisprudence n’avait pas eu l’occasion de répondre à cette interrogation.

 

C’est maintenant le cas puisque par un arrêt de la Cour de cassation du 28 septembre 2022 (n° 21.16-993), a précisé que c’est le nombre de CSE qui constitue le critère déterminant pour déterminer le nombre de registres.

 

Au cas d’espèce, un représentant du personnel au CSE d’une chaîne de magasins avait intenté une action en justice contre son employeur, demandant, sous astreinte, qu’un registre spécial en matière d’alerte sur la santé publique et l’environnement soit mis en place dans chacun des magasins.

 

Pour les juges du fonds, les magasins pour lesquels le représentant du personnel au CSE demandait à ce qu’un registre spécial soit mis en place, n’étaient pas des entités légales indépendantes ou des établissements distincts. Puisqu’il n’y avait pas de CSE dans ces magasins, il n’y avait pas besoin d’établir un tel registre à ce niveau, alors même qu’un tel registre existait au niveau du siège de l’entreprise où se trouvait l’unique CSE.

 

Ce raisonnement de la Cour d’appel a été confirmé par la Cour de cassation.

 

Cette solution apparaît logique au regard de la position prise par la Direction du travail en matière de droit d’alerte en cas de dangers graves et imminents. En effet, dans une circulaire du 25 mars 1993 (n° 93-15), l’administration avait indiqué que le registre spécial en la matière devait être instauré, à l’époque, pour chaque comité d’entreprise.

2403, 2023

Le consentement du salarié au renouvellement de la période d’essai

Pour pouvoir renouveler la période d’essai, en sus des conditions fixées par les articles L. 1221-21 et L. 1221-23 du Code du travail (possibilité d’un renouvellement, durée maximale de la période d’essai), il est impératif que les deux parties (employeur et salarié) aient donné leur accord exprès au renouvellement au cours de la période initiale (Cass. soc., 23 janvier 1997, n° 94-44.357 Cass. soc., 11 mars 2009, n°07-44.090 ; Circ. DGT n°2009-5, 17 mars 2009).

La jurisprudence a précisé qu’il y a accord exprès du salarié lorsque celui-ci manifeste sa volonté claire et non équivoque de renouveler sa période d’essai. A titre d’illustration, cela ne peut pas être déduit de la seule apposition de sa signature sur un document établi par l’employeur (Cass. soc., 25 novembre 2009, n°08-43.008 Cass. soc., 22 septembre 2015, n°14-11.731), ni de la seule poursuite de l’activité du salarié (Cass. soc., 4 octobre 2000, n°98-44.458)

 En revanche, la jurisprudence considère, par exemple, qu’il y a bien une volonté claire et non équivoque du salarié d’accepter le renouvellement lorsque celui-ci appose la signature et la mention « lu et approuvé » sur la lettre notifiant le renouvellement de la période d’essai (Cass. soc., 21 janvier 2015, n°13-23.018).

Dans un arrêt rendu le 25 janvier 2023, la Cour de cassation assouplit quelque peu sa jurisprudence (Cass. soc., 25 janvier 2023, n° 21-13.699).

Les juges ont considéré que le renouvellement était régulier du seul fait de la signature du salarié apposée sur la lettre de renouvellement de la période d’essai proposée par l’employeur, sans y porter d’autre mention, dès lors que d’autres éléments permettaient d’établir la volonté claire et non équivoque du salarié de consentir à ce renouvellement (courriels et attestation du recruteur).

Néanmoins, malgré cette jurisprudence, et afin d’éviter tout contentieux, il convient de recueillir le « bon pour accord » du salarié, en sus de sa signature, lors du renouvellement de sa période d’essai.

Voir aussi : Le contrat de travail d’un salarié ne peut être modifié par accord collectif sans son accord exprès.

303, 2023

Les modalités de rédaction dématérialisée des accords d’intéressement sont fixées

La loi « pouvoir d’achat » a créé une procédure dématérialisée de rédaction des accords et décisions unilatérales d’intéressement.

Après vous avoir présenté les nouvelles dispositions de cette loi, le cabinet Norma Avocats vous présente aujourd’hui les modalités concrètes de rédaction dématérialisée des accords et des décisions unilatérales d’intéressement.

* Cette procédure dématérialisée est accessible sur le site de l’Urssaf en allant à la rubrique « Rédiger un accord pré-validé », et permet de générer un accord ou une décision type, conforme à la loi, et sécurisé en termes d’exonérations sociales et fiscales.

Pour bénéficier de ces avantages, l’accord ou la décision unilatérale « pré-validé » doit être entièrement et exclusivement rédigé via cette plateforme, ce qui laisse peu de latitude, notamment sur la formule de calcul de l’intéressement.

Les exonérations fiscales et sociales sont alors réputées acquises dès le dépôt du texte sur « Téléaccords », et pour toute la durée de l’accord.

Le document est « pré-validé » et ne fait donc plus l’objet d’un contrôle de l’Urssaf.

* Bien évidemment, les entreprises ont toujours la possibilité de rédiger librement leur accord/DUE d’intéressement, sans passer par la procédure dématérialisée (notamment si elles veulent y intégrer une formule de calcul particulière).

Toutefois, dans ce cas, après le dépôt du document sur « Téléaccords », l’accord ou la DUE sera toujours transmis à l’Urssaf qui dispose d’un délai de 3 mois pour contrôler la conformité de ses clauses avec les dispositions légales et réglementaires.

Ce n’est qu’en l’absence de demande de retrait ou de modifications formulées par l’Urssaf dans le délai de trois mois, que les clauses de l’accord sont réputées valides et les exonérations de cotisations sociales sont réputées acquises pour l’exercice en cours.

1402, 2023

Projet de loi portant réforme des retraites : vers la création d’un « Index senior » ?

A l’instar de l’index égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, le Gouvernement envisage de créer un index de l’emploi des seniors afin de favoriser l’emploi des salariés âgés.

L’obligation de mettre en place et de publier cet Index senior serait effective dès le 1er novembre 2023, pour les entreprises d’au moins 1 000 salariés, et à partir du 1er juillet 2024 pour les entreprises d’au moins 300 salariés.

Sur le même modèle que l’index égalité, les entreprises devraient, chaque année, publier des indicateurs relatifs à l’emploi des salariés âgés et mettre en place des actions pour favoriser l’emploi des seniors dans l’entreprise

A ce stade, la liste des indicateurs et la méthode de calcul ne sont pas encore définies.

Comme pour l’index égalité, le défaut de publication de l’index senior serait sanctionné par une pénalité pouvant atteindre jusqu’à 1 % de la masse salariale. En revanche, pour le moment, le projet de loi ne prévoit aucune pénalité financière en cas de résultat insuffisant obtenu par l’entreprise.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit que les entreprises seraient tenues de négocier sur l’emploi des seniors dans le cadre de la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) en s’appuyant sur les indicateurs de l’index « senior ».

A ce stade, le projet de loi ne fournit pas plus d’indications sur les modalités de négociations de la GEPP.

2501, 2023

La nullité de la clause de mobilité intragroupe

En application de l’article L. 1221-1 du Code du travail, le contrat de travail « peut être établi selon les formes que les parties contractantes décident d’adopter ».

Toutefois, cette liberté des parties dans la rédaction du contrat de travail est limitée, notamment par le principe selon lequel un salarié ne peut accepter par avance un changement d’employeur (Cass. soc., 23 septembre 2009, n° 07-44.200).

Ce principe est rappelé dans un arrêt récent du 14 décembre 2022, rendu par la Cour de cassation au sujet d’une clause de mobilité intragroupe (Cass. soc., 14 décembre 2022, n° 21-18.633).

En l’espèce, le contrat de travail d’un salarié comportait une clause de mobilité stipulant que le salarié « s’engage à accepter toute mutation dans un autre établissement ou filiale, situés en France métropolitaine ». Au titre de cette clause, l’employeur a envisagé une mutation du salarié d’un établissement vers le siège de la société, « n’impliquant ni changement d’employeur ni modification des conditions de travail et le salarié conservant la possibilité de travailler à domicile ». Le salarié refuse cette mutation et est licencié.

La cour d’appel estime que le licenciement est justifié et que la clause de mobilité n’est pas nulle mais doit être cantonnée aux seuls établissements de la société existants au moment de la conclusion du contrat.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel. Elle considère qu’une clause de mobilité par laquelle le salarié s’est engagé à accepter toute mutation y compris dans une autre société, et même si cette société appartient au même groupe, est nulle.

La clause de mobilité doit se cantonner au périmètre géographique strictement limité à l’entreprise à laquelle est rattaché le salarié tant dans sa pratique que dans sa rédaction.

Cet arrêt semble sévère. La Cour de cassation sanctionne une rédaction extensive de la clause de mobilité, alors même qu’était respectée une application conforme de mobilité sans changement d’employeur.

Il est donc essentiel d’être très attentif à la rédaction de clause de mobilité !

Nous rappelons qu’il est en revanche possible de mettre en œuvre une mobilité intragroupe par le biais d’une convention tripartite entre le salarié et ses deux employeurs successifs.

Lire aussi : Le contrat de travail d’un salarié ne peut être modifié par accord collectif sans son accord exprès.

1001, 2023

Les entreprises affectées par un délestage électrique peuvent recourir à l’activité partielle

Le Question-réponse du ministère du travail relatif à l’activité partielle dans le contexte du conflit en Ukraine a été mis à jour.

Il précise que dans le cas où une entreprise, directement affectée par le délestage, n’est pas en mesure d’aménager le temps de travail de ses salariés pour faire face à cette situation, il lui est possible, en dernier recours, de mobiliser, pour la durée du délestage et, le cas échéant, pendant la durée nécessaire à la remise en marche des unités de production, le dispositif d’activité partielle.

La demande de mise en activité partielle doit être effectuée, comme habituellement, sur le site https://activitepartielle.emploi.gouv.fr, en cochant le sous-motif « délestage », du motif « toutes autres circonstances exceptionnelles ».

L’entreprise a 30 jours, à compter du placement des salariés en activité partielle, pour adresser sa demande à l’administration.

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, l’employeur doit par principe consulter le CSE avant d’effectuer sa demande auprès de l’administration. Toutefois, en cas de circonstances exceptionnelles, l’avis du CSE peut être recueilli postérieurement à la demande, et doit être transmis à l’administration dans un délai de 2 mois maximum, à compter de cette demande.

Dans ce cadre, les salariés et l’employeur seront indemnisés dans les conditions de droit commun :

  • Le salarié percevra 60 % de sa rémunération brute antérieure, dans la limite de 60 % de 4,5 Smic.
  • L’employeur recevra de l’Agence de services et de paiement (ASP) une allocation d’activité partielle équivalente à 36 % de la rémunération brute antérieure du salarié, dans la limite de 36 % de 4,5 Smic, avec un plancher de 8,03 euros (montant applicable aux demandes d’indemnisation relatives aux heures non travaillées à compter du 1erjanvier 2023).
501, 2023

Requalification d’un CDD en CDI : précisions sur le point de départ du délai de prescription

Lorsqu’un CDD est entaché d’une irrégularité, le salarié peut engager une action en requalification du CDD en CDI dans un délai de deux ans, conformément aux dispositions de l’article L1471-1 du Code du travail. Toutefois, le point de départ de ce délai varie selon l’irrégularité soulevée :

  • Lorsque le délai de carence entre deux CDD n’a pas été respecté, le délai de prescription court à compter du premier jour de l’exécution du second contrat (Cass.soc., 5 mai 2021, n°19-14.295) ;
  • Lorsque l’irrégularité touche le motif du recours au CDD, le délai de prescription court à compter de la date du terme du contrat (Cass.soc., 29 janvier 2020, n°18-15.359) ;
  • Lorsqu’une mention obligatoire prévue à l’article L1242-12 du Code du travail est manquante, le délai de prescription court à compter de la conclusion du contrat (Cass.soc., 3 mai 2018, n°16-26.437)

C’est dans le cadre de cette dernière hypothèse que la Cour de cassation a récemment réaffirmé sa position antérieure tout en précisant qu’il n’y a pas lieu d’y faire exception en ce qui concerne l’indication du nom et de la qualification du salarié remplacé dans le CDD de remplacement (Cass.soc., 23 novembre 2022, n°21-13.059).

En l‘espèce, un salarié a été engagé en CDD afin de remplacer un salarié absent en arrêt maladie le 16 décembre 2013. Le CDD a été prolongé jusqu’au 14 mars 2014 avant d’être rompu le 22 décembre 2015 suite au licenciement pour inaptitude du salarié absent.

Le salarié en CDD a saisi la juridiction prud’homale le 2 juin 2016 d’une demande de requalification en CDI au motif que les contrats litigieux ne comportaient aucune indication du nom et de la qualification de la personne remplacée.

Le débat s’est alors cristallisé autour du point de départ du délai de prescription de l’action en requalification.

Pour la Cour d’appel, le nom et de la qualification du salarié remplacé étaient liés à l’exigence de précision quant à la définition du motif du recours du CDD de remplacement de sorte que la prescription commençait à courir à compter du terme du contrat. Au moment de la saisine de la juridiction prud’homale intervenue le 2 juin 2016, elle en conclut que l’action du salarié n’était pas prescrite.

La Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel en rappelant que le délai de prescription d’une action en requalification d’un CDD fondée sur l’absence d’une mention obligatoire listée à l’article L1242-12 du Code du travail court à compter de la conclusion du contrat.

Voir aussi : Attention à la requalification d’un temps partiel en temps plein en cas de dépassement de la durée légale du travail

912, 2022

Astreintes : attention aux contraintes qui pèsent sur le salarié durant cette période

L’astreinte est une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise.

Seule la durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif (C. trav. art. L. 3121-9).

Sur le traitement des périodes d’astreinte, la CJUE considère que si les contraintes imposées au travailleur durant sa période d’astreinte affectent de manière objective et significative sa faculté de gérer, comme il l’entend, son temps libre, il faut alors traiter l’intégralité de la période d’astreinte comme du temps de travail effectif (CJUE, 9 mars 2021, C-344/19).

Dans un arrêt du 26 octobre 2022 (Cass. soc. 26 octobre 2022, n° 21-14.178), la Cour de cassation reprend le raisonnement de la CJUE dans une espèce où un salarié, occupant les missions de dépanneur sur une portion d’autoroute, invoquait le court délai qui lui était imparti pour se rendre sur le lieu d’intervention.

Selon lui, les modalités de l’astreinte ne lui permettaient pas de vaquer librement à ses occupations personnelles et il était, en réalité, à la disposition permanente de son employeur durant cette période.

Pour la Cour de cassation, les juges du fond, qui ont débouté, à tort, le salarié de sa demande de rappel de salaire, auraient dû vérifier si le salarié avait été soumis, au cours de ses périodes d’astreinte à des contraintes d’une intensité telle qu’elles avaient affecté, objectivement et très significativement, sa faculté de gérer librement le temps pendant lequel ses services professionnels n’étaient pas sollicités et de vaquer à des occupations personnelles.

Il convient donc d’être attentif à ce que les modalités de l’astreinte, notamment les délais impartis aux salariés pour intervenir, n’aboutissent pas à leur imposer des contraintes trop importantes qui, en pratique, aboutissent à les mettre à la disposition permanente et immédiate de l’employeur.

Si tel est le cas, l’intégralité de la période d’astreinte risque d’être considérée comme du temps de travail, et rémunérée comme tel.

912, 2022

Le trajet d’un salarié itinérant entre son domicile et les sites du premier et dernier client peut constituer du temps de travail effectif

C’est de nouveau à la lumière du droit européen (Cass. soc., 26 octobre 2022, n° 21-14.178 sur les astreintes) que la Cour de cassation interprète, cette fois-ci, les articles L. 3121-1 et L. 3121-4 du Code du travail, portant définition du temps de travail effectif et des trajets domicile-travail. Elle opère un revirement de jurisprudence en matière de qualification du temps de trajet des salariés itinérants (Cass. soc., 23 nov. 2022, n°20-21.924).

Pour mémoire, l’article L3121-4 du code du travail indique que le temps de trajet domicile-travail ne constitue pas un temps de travail effectif.

Contrairement à ce qu’elle avait jugé en 2018 (Cass. soc., 30 mai 2018, n° 16-20.634), la Cour de cassation  retient désormais que « lorsque les temps de déplacements accomplis par un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients répondent à la définition du temps de travail effectif, ces temps ne relèvent pas du champ d’application de l’article L. 3121-4 ».

En l’occurrence, la Cour d’appel a relevé que le salarié itinérant « devait en conduisant, pendant ses déplacements, grâce à son téléphone portable professionnel et son kit main libre intégré dans le véhicule mis à sa disposition par la société, être en mesure de fixer des rendez-vous, d’appeler et de répondre à ses divers interlocuteurs ».

Pour les juges, le salarié itinérant étant ainsi à la disposition de son employeur, et devant répondre à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles, ces temps de trajet sont considérés comme du temps de travail et, ici, payés en heures supplémentaires.

Relevons que, la qualification de temps de travail effectif n’est pas automatique. En cas de contentieux, le juge devra faire une analyse de la situation du salarié itinérant pendant ses trajets, et identifier s’il doit se tenir à la disposition de l’employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à ses occupations personnelles :

  • Dans l’affirmative les trajets constituent alors du temps de travail effectif et doivent être rémunérés comme tel.
  • Dans le cas contraire, le salarié itinérant ne pourra prétendre qu’à la contrepartie financière ou sous forme de repos s’il dépasse le temps normal de trajet domicile-travail.

Il convient donc d’être attentif au degré de liberté laissé aux salariés itinérants lorsqu’ils commencent et finissent leur journée de travail.

 

Pour aller plus loin: Astreintes : attention aux contraintes qui pèsent sur le salarié durant cette période

 

512, 2022

Des précisions sur le licenciement économique d’un salarié en arrêt maladie

Si un salarié en arrêt maladie fait l’objet d’un licenciement économique, il appartient au juge de rechercher si ce motif économique est la véritable cause du licenciement, et non l’état de santé du salarié. En effet, dans un arrêt récent du 26 octobre 2022, la Cour de cassation a rappelé le principe posé par l’article L. 1235-1 du Code du travail, selon lequel il appartient au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l’employeur (Cass. soc., 26 octobre 2022, n° 20-17.501).

En l’espèce, une procédure de licenciement pour motif économique pour cessation totale d’activité a été engagée par une société à l’égard d’un salarié.

Postérieurement à l’engagement de la procédure de licenciement, ce salarié a adressé à l’employeur un arrêt de travail pour maladie professionnelle, et l’a informé d’une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de l’assurance maladie et de la saisine du médecin du travail pour une visite de reprise.

La procédure de licenciement s’est malgré tout poursuivie, et l’employeur a notifié au salarié son licenciement économique pour cessation totale d’activité.

Le salarié a demandé alors la nullité de son licenciement qu’il considérait comme lié à son état de santé, ce qui a été retenu par la Cour d’appel de Paris.

La Cour de cassation casse cet arrêt. Elle précise que le juge doit rechercher si la cessation d’activité de l’entreprise invoquée à l’appui du licenciement est la véritable cause du licenciement du salarié.

Voir aussi : La Cour de cassation a précisé la notion de situation rendant difficile la réinsertion professionnelle d’un salarié dans le cadre d’un licenciement économique

2411, 2022

Sanction disciplinaire : attention à ne pas épuiser votre pouvoir disciplinaire !

Dans cette affaire un salarié est convoqué à un entretien préalable le 19 février 2016, et se voit notifier une mise à pied disciplinaire, le 4 mars 2016.

Le 8 mars 2016, ce même salarié est convoqué à un nouvel entretien préalable qui aboutit, cette fois-ci, à un licenciement pour faute grave notifié le 23 mars 2016. Ce licenciement est fondé sur des défaillances du salarié révélées par un contrôle réalisé le 3 mars 2016.

Pour le salarié, le licenciement est injustifié. Selon lui, l’employeur a épuisé son pouvoir de sanction dès lors qu’au moment du prononcé de la mise à pied disciplinaire, le 4 mars, il avait déjà connaissance des faits ayant conduit à la procédure de licenciement.

La Cour d’appel, déboute le salarié au motif que la procédure disciplinaire ayant abouti à la sanction du 4 mars 2016 avait déjà été engagée le 19 février 2016, date de l’entretien préalable, de sorte que les faits constatés le 3 mars 2016 étaient de nature à motiver de nouvelles poursuites disciplinaires au titre du licenciement.

Mais, la Cour de cassation censure ce raisonnement et rappelle, au visa de l’article L. 1331-1 du code du travail, que l’employeur qui, ayant connaissance de faits fautifs commis par le salarié, choisit de n’en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits connus au moment de la première sanction (Cass. soc. 9 novembre 2022, n°21-13.224).

Il convient donc d’être attentif au calendrier lors des procédures disciplinaires.

Voir aussi : Des précisions sur les délais de la procédure disciplinaire.

2311, 2022

Le ministère du travail apporte des précisions sur le dispositif de rachat de RTT

Par la publication d’un « Questions-réponses » le 27 octobre 2022, le Ministère du travail répond à certaines interrogations concernant le dispositif de rachat des jours de repos et de réduction du temps de travail (RTT) prévu par la loi du 16 août 2022. Ce document traite également du régime social et fiscal du dispositif, lequel fera l’objet d’un chapitre dédié au sein de la rubrique « Exonérations heures supplémentaires et complémentaires » du Bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS).

Quels sont les employeurs et salariés éligibles ? Quel est le régime social et fiscal de ce dispositif ?  Quelle est la majoration de salaire applicable aux jours de repos rachetés ? Dans un précédent article « La possibilité de rachat de RTT depuis le 18 août 2022 », le cabinet Norma Avocats a fait une première présentation du dispositif.

Le Ministère du travail précise désormais qu’une demande de monétisation des RTT peut intervenir à tout moment et plusieurs fois par an (dans le respect du plafond annuel d’exonération), aucun formalisme n’étant imposé. Cela étant, en cas de contrôle par l’Administration, l’employeur doit être en mesure de démontrer la demande du salarié et son acceptation. En pratique, il est donc nécessaire, pour des raisons probatoires, de recourir à un écrit.

Par ailleurs, la loi du 16 août 2022 a réservé la monétarisation aux journées ou demi-journées de repos acquises en application d’un accord ou d’une convention collective instituant un dispositif de réduction du temps de travail. Or, dans son « Questions-réponses », le ministère du travail inclut également les jours de repos issus d’un aménagement du temps de travail mis en place unilatéralement par l’employeur. Cet ajout suscite des interrogations car seuls les jours de repos issus d’un accord collectif peuvent être rachetés selon le législateur. En attendant que le dispositif soit harmonisé, la prudence peut amener à réserver le rachat des jours de repos uniquement à ceux issus d’un accord collectif.

Voir aussi : Dépassement du forfait jours et rachat des jours de repos sans accord écrit

811, 2022

Les postes disponibles occupés par des intérimaires doivent être proposés au salarié déclaré inapte dans le cadre de son reclassement

Dans un arrêt du 19 juillet 2022 (n° 22-400), le Conseil d’État a apporté des précisions sur la liste des postes disponibles qui doivent être proposés à un salarié déclaré inapte dans le cadre de l’obligation de reclassement de l’employeur.

Pour rappel, l’obligation de reclassement impose à l’employeur de rechercher et de proposer au salarié un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe situées en France et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Au cas d’espèce, un salarié protégé avait saisi la juridiction administrative en contestation de la décision de l’inspection du travail, d’autoriser son licenciement, car selon lui, des postes occupés par des intérimaires étaient disponibles et auraient dû lui être proposés.

Le Conseil d’État, saisi par le salarié qui avait été débouté de ses demandes en première instance et en appel, rappelle tout d’abord que la recherche de reclassement doit être sérieuse, ce qui signifie qu’elle doit intégrer tous les postes disponibles appropriés aux capacités du salarié, que ceux-ci soient en CDI ou en CDD.

Les postes occupés par des intérimaires doivent donc être proposés s’ils répondent à ces conditions.

Le Conseil d’État précise par la suite ce qu’il faut entendre par postes disponibles dans le cas de postes occupés par des intérimaires : un poste disponible est, en principe, un poste vacant attendant d’être pourvu.

Au cas d’espèce, les contrats étaient conclus pour de très courtes durées (2 à 3 jours), pour pallier des absences ponctuelles et faire face à des pointes d’activité saisonnières. Pour le Conseil d’État, ils ne portaient donc pas sur des postes disponibles, car ils n’avaient pas vocation à être pourvus en raison du caractère aléatoire qui ressortait des éléments de faits présentés au juge du fond.

Ces postes n’avaient donc pas à être proposés au salarié dans le cadre de l’obligation de reclassement de l’employeur.

Au regard des termes employés par le Conseil d’État dans cette décision, on peut penser que cette solution puisse également s’appliquer à une situation de reclassement dans le cadre d’un licenciement pour motif économique, bien que l’arrêt ne porte que sur la question du reclassement d’un salarié inapte.

Voir aussi : Reclassement interne dans le cadre d’un PSE : les postes en CDD doivent également être identifiés dans le cadre de la recherche de reclassement

711, 2022

La Cour de cassation a précisé la notion de situation rendant difficile la réinsertion professionnelle d’un salarié dans le cadre d’un licenciement économique

Dans le cadre d’un licenciement pour motif économique et l’application de critères d’ordre des licenciements, la Cour de cassation a apporté pour la première fois des précisions sur le critère des « salariés présentant des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion particulièrement difficile ».

  • Pour rappel, en cas de licenciement pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, l’employeur doit définir les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après avoir consulté le CSE.

S’il lui est possible de définir ses propres critères, il devra tout de même prendre en compte les critères légaux suivants :

    • Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;
    • L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;
    • La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
    • Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.

 

  • Il arrive souvent, dans la rédaction d’un plan de sauvegarde de l’emploi, que l’évaluation du critère des caractéristiques sociales rendant la réinsertion professionnelle difficile soit limitée à l’âge et au handicap.

 

  • La Cour de cassation, par un arrêt du 12 juillet 2022 (n° 20-23.651), a précisé que l’âge et le handicap, visés à l’article L. 1233-5 du code du travail, ne sont que des exemples et que la liste des caractéristiques sociales rendant la réinsertion professionnelle difficile n’était pas exhaustive.

Au cas d’espèce, un salarié avait été engagé par contrat d’insertion revenu minimum d’activité et licencié pour motif économique, il avait alors contesté son licenciement et demandé des dommages-intérêts pour inobservation des règles relatives à l’ordre des licenciements. Pour le salarié, le cadre dans lequel son embauche avait eu lieu et la particularité de son contrat de travail aurait dû être pris en compte dans l’application des critères d’ordre de licenciement.

Il fut débouté de ses demandes en appel, mais la Cour de cassation a accueilli favorablement son pourvoi, considérant qu’un contrat d’insertion revenu minimum d’activité était un dispositif ayant pour objet de faciliter l’insertion sociale et professionnelle des personnes rencontrant des difficultés particulières d’accès à l’emploi. Dès lors, cette situation aurait dû être prise en compte pour l’application des critères d’ordre de licenciement.

 

Compte tenu de cette décision, il faut dorénavant diversifier les situations qui entrent en ligne de compte pour l’appréciation du critère des caractéristiques sociales rendant la réinsertion professionnelle difficile. Cette diversification devra se faire en appréciant le contexte de l’entreprise et les caractéristiques des salariés employés.

Voir aussi : Des difficultés économiques sans baisse du chiffre d’affaires, c’est possible !

411, 2022

Actualités jurisprudentielles sur le vote électronique

La Cour de cassation a apporté des précisions sur le vote électronique dans des décisions récentes qui, au regard de l’organisation actuelle et prochaine d’élections professionnelles dans de nombreuses entreprises et du recours de plus en plus fréquent à cette modalité de vote, présentent un intérêt particulier pour les entreprises :

  • Elle a d’abord indiqué pour la première fois par un arrêt du 1er juin 2022 (n° 20-22.860) que le principe d’égalité face à l’exercice du droit de vote était un principe général du droit électoral. En application de ce principe, chaque travailleur doit pouvoir participer au scrutin, sans en être empêché ou dissuadé.

Ainsi, lorsque les élections des membres de la délégation du personnel du CSE se déroulent uniquement par voie électronique, l’employeur doit prendre les précautions nécessaires pour s’assurer que ne soit écarté aucun électeur en raison de difficultés avec le matériel ou son lieu de résidence et qui l’empêcheraient donc de se connecter à internet pour procéder au vote.

À défaut, le scrutin est susceptible d’annulation  pour manquement au principe d’égalité face à l’exercice du droit de vote.

Au cas d’espèce, le scrutin a été annulé, car une partie des salariés du collège « employé » n’avaient pas eu accès à des outils informatiques professionnels leur permettant de voter, à l’inverse de ceux des autres collègues (cadres et agents de maitrise).

  • La Cour de cassation a ensuite indiqué par un arrêt du 15 juin 2022 (n° 20-21.992) que si, en principe, les résultats des élections professionnelles doivent être affichés dans la salle de vote (article R. 67 du code électoral), lorsque le scrutin se déroule de façon dématérialisée, la publication des résultats peut intervenir par tout moyen permettant leur accessibilité à l’ensemble du personnel de l’entreprise.

La solution est logique puisqu’au cas d’espèce, il n’y avait pas de salle de vote en raison du recours au vote dématérialisé. Il fallait donc nécessairement apporter un tempérament à l’article R. 67 du code électoral.

Voir aussi : Organisation et déroulement des élections professionnelles fixés par l’employeur : le syndicat ne peut les remettre en cause après le scrutin

211, 2022

L’annonce verbale d’un licenciement ne peut intervenir qu’après sa notification écrite

Lorsque la décision de licencier un collaborateur est prise, certains employeurs souhaitent, par délicatesse, avertir oralement le salarié de l’envoi de la lettre de licenciement plutôt que de laisser ce dernier le découvrir au moment de la réception du courrier.

Dans un arrêt en date du 28 septembre 2022, la Cour de cassation a rappelé les précautions à prendre par l’employeur pour éviter que cette démarche ne se transforme en un licenciement verbal dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass.soc., 28 septembre 2022, n°21-15.606).

En l’espèce, un employeur a notifié la lettre de licenciement et informé le jour-même le salarié de cette décision par téléphone. Le salarié a donc intenté une action en justice pour se prévaloir d’un licenciement verbal.

La Cour d’appel a fait droit à cette demande en estimant que le salarié démontrait bien que la notification verbale de son licenciement était concomitante à l’envoi du courrier de licenciement.

La Cour de cassation casse ce raisonnement en rappelant la règle selon laquelle la rupture du contrat de travail se situe à la date où l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin, c’est-à-dire au jour de l’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception.

Dès lors, la Cour de cassation estime qu’il revenait aux juges du fond de déterminer la chronologie des évènements : si la lettre de notification du licenciement a été expédié avant la conversation téléphonique, l’employeur avait déjà irrévocablement manifesté sa volonté d’y mettre fin de sorte que la procédure a bien été respectée. Dans le cas contraire, il s’agit d’un licenciement verbal dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Dans ces circonstances, il est donc recommandé pour l’employeur de conserver tout moyen de preuve pour justifier la chronologie des faits en cas de litige (par exemple, une capture d’écran du journal d’appel, le justificatif de dépôt du courrier de licenciement auprès des services postaux etc).

Voir aussi : L’employeur n’a pas à informer le salarié de son droit à demander des précisions sur les motifs de son licenciement

211, 2022

Le déblocage exceptionnel de l’épargne salariale

La loi du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat offre la possibilité aux salariés de débloquer exceptionnellement leurs droits à participation et les sommes attribuées au titre de l’intéressement perçues avant le 1er janvier 2022.

Le gouvernement a publié une foire aux questions à ce sujet afin d’apporter des précisions sur les conditions de mise en œuvre de ce dispositif.

Les sommes issues de la participation et de l’intéressement peuvent être débloquées (y compris le cas échéant l’abondement s’y rattachant) dans la limite de 10 000 euros nets de prélèvements sociaux.

Les sommes débloquées, ainsi que les revenus provenant des sommes attribuées, peuvent bénéficier d’une exonération d’imposition sur le revenu et de prélèvements sociaux. En revanche, les éventuelles plus-values sont soumises aux prélèvements sociaux sur les produits de placement (CSG, CRDS et prélèvement de solidarité).

Certaines sommes sont exclues du dispositif (sommes placées sur un plan d’épargne retraite, sommes investies dans des fonds solidaires, stock-options levées au moyen d’avoirs indisponibles du plan d’épargne). Le déblocage est également soumis, dans certains cas, à la conclusion d’un accord collectif ou à une décision favorable du chef d’entreprise.

Le Ministère du Travail clarifie également les conditions dans lesquelles les sommes affectées sur un compte courant bloqué peuvent être exceptionnellement débloquées.

Pour bénéficier du débocage, le salarié doit effectuer une demande auprès de l’entreprise ou de l’organisme gestionnaire en précisant le cas échéant les supports d’investissement qu’il souhaite liquider en priorité. Le salarié ne peut présenter qu’une seule demande par organisme gestionnaire, et au plus tard le 31 décembre 2022.

Les sommes débloquées doivent être destinées au soutien à la consommation des ménages. Par exemple, elles ne doivent pas être réinvesties dans des biens immobiliers locatifs, ni servir au solde d’un crédit, à la clôture d’un prêt par anticipation, ou au paiement des impôts.

LA FAQ rappelle également que les employeurs avaient jusqu’au 16 octobre 2022 pour informer, par tout moyen, les salariés de ce dispositif exceptionnel de déblocage.

Voir aussi : Loi sur le pouvoir d’achat : focus sur l’intéressement

2410, 2022

Des difficultés économiques sans baisse du chiffre d’affaires, c’est possible !

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a considéré qu’il n’est pas nécessaire de remplir tous les critères d’appréciation des difficultés économiques du Code du travail pour justifier un licenciement économique (Cass. soc., 21 septembre 2022, n°20-18.511).

En effet, lorsque la baisse des commandes ou du chiffre d’affaires invoquée par l’employeur pour justifier un licenciement économique n’est pas établie, la Cour de cassation précise que le juge ne doit pas se limiter à ce critère et doit examiner les autres indicateurs économiques énumérés à l’article L. 1233-3 du Code du travail, tels que « des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ».

En l’espèce, la société invoquait une baisse significative des commandes et du chiffre, mais également un niveau d’endettement conséquent et des capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social. Le juge aurait donc dû rechercher si, au regard de ces autres éléments, l’employeur ne justifiait pas de difficultés économiques à l’appui du licenciement.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation rappelle également une jurisprudence constante selon laquelle les difficultés économiques invoquées par l’employeur à l’appui du licenciement s’apprécient à la date de la rupture du contrat de travail. Ainsi, s’agissant de la baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, cet indicateur s’apprécie en comparant le niveau des commandes ou du chiffre d’affaires au cours de la période contemporaine de la notification de la rupture à celui au cours de l’année précédente à la même période (Cass. soc., 1er juin 2022, n°20-19.957).

Voir aussi : Précisions de la CAA de Paris sur la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) à la suite d’une rupture conventionnelle collective (RCC)

2010, 2022

Temps partiel : Un avenant ne peut pas porter la durée de travail au niveau d’un temps plein

En application de l’article L.3123-22 du code du travail, l’employeur et le salarié à temps partiel peuvent convenir, par avenant au contrat, d’augmenter, de manière temporaire, la durée de travail.

Cette augmentation temporaire de la durée de travail doit être prévue par une convention ou un accord de branche étendu.

Le code du travail ne fixant pas de plafond maximal au nombre d’heures pouvant être accomplies par le salarié dans ce cadre, certains avenants prévoient un passage temporaire à un travail à temps complet.

C’est dans ce contexte que la Cour de cassation, par un arrêt du 21 septembre 2022 (Cass.soc., 21 septembre 2022, n°20-10.701), est venue, pour la première fois, se prononcer sur ce point.

Pour les juges, même dans le cadre d’un avenant de complément d’heures conclu sur le fondement de l’article L. 3123-22 du code travail (anciennement L. 3123-25 al. 1 du code du travail), la durée de travail d’un temps partiel doit nécessairement restée inférieure à un temps plein.

Si l’avenant a pour effet de porter la durée du travail du salariée à temps partiel, au niveau de la durée légale de travail, le contrat de travail doit être requalifié à temps complet.

La sanction est identique à celle appliquée en matière d’accomplissement d’heures complémentaires en cas de dépassement de la durée légale de travail (Cass.soc., 15 septembre 2021, n°19-19.563).

Voir aussi: Attention à la requalification d’un temps partiel en temps plein en cas de dépassement de la durée légale de travail. 

1110, 2022

Action en justice du CSEC : L’ordre du jour peut être modifié en début de séance

Selon le Code du travail, l’ordre du jour des réunions du CSE doit être communiqué dans un certain délai avant chaque réunion : au moins 8 jours pour les réunions de CSE central (article L 2316-17 du Code du travail), au moins 3 jours pour les réunions de CSE dans les entreprises d’au moins 50 salariés (article L 2315-30 du Code du travail).

L’article L2327-14 du Code du travail prévoyait, dans une rédaction identique, que l’ordre du jour des réunions de CCE devait être communiqué au moins huit jours avant la séance.

Or, dans un arrêt concernant le CCE, la Cour de cassation vient d’admettre, sous certaines conditions, la possibilité pour les élus de modifier l’ordre du jour en début de séance (Cass.crim, 13 septembre 2022, n°21-83.914).

En l’espèce, un Comité central d’entreprise avait engagé une action en justice pour délit d’entrave contre la société, estimant qu’elle avait omis de l’informer et de le consulter préalablement à la mise en œuvre d’une revue du personnel.

Pour sa défense, la société a soulevé l’irrecevabilité de l’action en justice au motif que la délibération du CCE, ayant donné mandat au secrétaire d’agir en justice, avait été ajoutée en début de séance à l’initiative dudit secrétaire, sans avoir été préalablement inscrite à l’ordre du jour de la réunion, et sans présenter de lien avec les questions devant être débattues. La société soulignait que les membres titulaires absents avaient été privés de toute possibilité de s’exprimer sur ce sujet.

La Cour de cassation a rejeté cet argumentaire en considérant que « si l’article L2327-14 du Code du travail, prévoyait que l’ordre du jour est communiqué aux membres huit jour au moins avant la séance, ce délai était édicté dans leur intérêt afin de leur permettre d’examiner les questions et d’y réfléchir ». La Cour a relevé que « la modification de l’ordre du jour avait été adoptée à l’unanimité des membres présents de sorte que ces derniers ont accepté, sans objection, de discuter de la question du mandat, manifestant avoir été avisés en temps utiles ».

Si cette solution était transposée à l’ordre du jour du CSE et CSEC, cela ouvrirait une faculté de modification de l’ordre du jour à l’unanimité des membres présents, ce qui ne ressort pourtant pas des textes susvisés.

Voir aussi : Le CSE n’est pas consulté si le reclassement du salarié est impossible

1110, 2022

Une meilleure prise en charge des frais de transport des salariés en 2022 et 2023

Face à la hausse de l’inflation, la prise en charge par l’employeur des frais de transport des salariés, dans le cadre de leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, a été améliorée par la loi du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022, comme évoqué dans ce tableau récapitulatif (Tableau – Dispositif de prise en charge des frais de transport).

A lire aussi : La possibilité de rachat de RTT depuis le 18 août 2022

2309, 2022

Insuffisance professionnelle du salarié protégé : qu’en est-il des recherches de reclassement ?

Selon une jurisprudence constante du Conseil d’Etat, avant de procéder au licenciement pour insuffisance professionnelle du salarié protégé, l’employeur doit chercher à le reclasser (CE 7 décembre 2009, n° 315588 ; CE 23 décembre 2010, n° 333169).

L’absence de recherches de reclassement constitue un motif de refus d’autorisation de la rupture, par l’administration.

Or, et contrairement au licenciement économique ou à l’inaptitude, cette position du Conseil d’Etat n’est fondée sur aucune disposition législative ou réglementaire. La Cour de cassation n’a, d’ailleurs, jamais adopté une telle position pour les salariés « non protégés ».

Ce défaut de base légale est l’un des éléments soulevés par la Cour administratif d’appel de Versailles dans une décision du 17 juin 2022 (CAA Versailles, 17 juin 2022 ; n° 20VE02541). Aux termes de cet arrêt, les juges vont à l’encontre de la jurisprudence du Conseil d’Etat en jugeant qu’il n’existe aucun fondement juridique imposant une obligation de reclassement à l’employeur, qui souhaite licencier un salarié protégé pour insuffisance professionnelle.

Ce faisant, pour la CAA, l’administration ne peut pas se fonder sur cette absence de recherche de reclassement pour refuser d’autoriser de licenciement.

Est-ce les prémices d’un revirement de jurisprudence en la matière ? A ce jour, et en l’absence de décision du Conseil d’Etat en ce sens, le cabinet Norma Avocats incite à la prudence : avant de licencier un salarié protégé pour insuffisance professionnelle, il faut chercher à le reclasser.

909, 2022

Loi sur le pouvoir d’achat : focus sur l’intéressement

La loi du 16 août 2022 dit de « pouvoir d’achat » est entrée en vigueur, après sa publication au JO le 17 août 2022.

Après vous avoir exposé les règles sur la Prime de partage de la valeur (PPV) dans un précédent article, le cabinet Norma Avocats vous présente les dispositions adoptées dans le cadre de l’intéressement.

La durée maximale des accords d’intéressement, ou des décisions unilatérales de l’employeur est désormais de 5 ans (contre 3 auparavant).

Même en l’absence d’accord de branche agréé, les entreprises de moins de 50 salariés dépourvues de CSE ou de Délégués syndicaux (DS), ont la possibilité de mettre en place l’intéressement par décision unilatérale.

A compter du 1er janvier 2023, une procédure dématérialisée de rédaction des accords collectifs sera accessible sur internet. Cette procédure permettra de générer un accord ou une décision type, conforme à la loi et qui sécurisera les exonérations sociales et fiscales dès leur dépôt sur la plateforme. Nous attendons néanmoins un décret sur ce point.

Jusqu’à présent, la sécurisation des exonérations reposait sur le contrôle, par l’administration, de la validité des modalités de conclusion de l’accord d’intéressement. A compter du dépôt de l’accord sur téléaccords, la Dreets disposait d’un mois pour effectuer son contrôle et délivrer un récépissé de dépôt.

A l’expiration du délai d’un mois, l’accord était alors transmis à l’Urssaf chargé d’examiner sa conformité aux dispositions légales et réglementaires.

A compter du 1er janvier 2023, le contrôle de la Dreets est supprimé, seul subsistera celui de l’Urssaf dans les conditions actuelles:

  • L’Urssaf dispose d’un délai de 3 mois pour demander le retrait ou la modification des clauses contraires aux dispositions légales. A défaut, les exonérations sont acquises pour l’exercice en cours.
  • L’Urssaf dispose d’un délai de 2 mois supplémentaire pour que l’entreprise se mette en conformité, pour les exercices ultérieurs à celui du dépôt.

Enfin, l’article L. 3314-5 du Code du travail est modifié : désormais, le congé paternité et d’accueil de l’enfant est assimilé à une période de présence, lorsque la répartition de l’intéressement dépend de la durée de présence dans l’entreprise.

Pour aller plus loin: La possibilité de rachat de RTT depuis le 18 août 2022

909, 2022

La possibilité de rachat de RTT depuis le 18 août 2022

Depuis le 18 août dernier, certains salariés ont la possibilité de demander à leur employeur à convertir en salaire leurs RTT non pris et déjà acquis au titre des périodes postérieures au 1er janvier 2022 et allant jusqu’au 31 décembre 2025 (article 5 de la loi du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022).

Pour bénéficier de la possibilité de monétiser des RTT, le salarié doit avoir obtenu l’accord de son employeur.

Ce mécanisme concerne les journées ou demi-journées de repos acquises en application d’un accord ou d’une convention collective instituant un dispositif de réduction du temps de travail (RTT).

Attention : Les salariés bénéficiant d’une convention de forfait en jours ne sont pas visés par ce dispositif, disposant déjà d’une possibilité de « rachat » de leurs jours de repos en application de l’article L. 3121-59 du Code du travail.

  • Les règles du rachat des RTT:

Les journées ou demi-journées de RTT rachetées, et donc travaillées, sont payées en appliquant une majoration de salaire au moins égale au taux de majoration de la première heure supplémentaire, soit 25 % (pouvant descendre jusqu’à 10% par accord collectif).

Les jours de RTT rachetés ne s’imputent pas sur le contingent d’heures supplémentaires.

  • Le régime social et fiscal de ce nouveau dispositif:

Le rachat de RTT bénéficie du régime social et fiscal des heures supplémentaires :

  • exonération de cotisations sociales dans certaines limites ;
  • exonération d’impôt sur le revenu dans la limite de 7 500 € par an. Les sommes versées au-delà de cette limite redeviennent imposables.

Attention : les éventuelles heures supplémentaires ou complémentaires sont aussi comptées dans ce plafond de 7 500 € ;

  • soumission à la CSG et à la CRDS et prise en compte du revenu correspondant au rachat de RTT dans le montant du revenu fiscal de référence.

Voir aussi: Pouvoir d’achat : quelles sont les mesures présentées par le Gouvernement ?

909, 2022

Dépassement du forfait jours et rachat des jours de repos sans accord écrit

En application de l’article L.3121-59 du Code du travail, le salarié au forfait annuel en jours peut, en accord avec l’employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos contre rémunération.

L’accord entre l’employeur et le salarié doit être établi par écrit et doit mentionner le taux de majoration applicable au rachat de ces jours.

En l’absence d’accord formel sur la renonciation aux jours de repos, la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser qu’un accord tacite entre l’employeur et le salarié pouvait déclencher l’application de ce régime juridique (Cass. soc., 26 janvier 2022, n°20-13.266).

La Cour de cassation est venue confirmer sa position, en indiquant que cet accord implicite pouvait être matérialisé par le fait que le salarié avait dépassé le nombre de jours prévu par sa convention de forfait, sans que l’employeur n’ait « rien mis en œuvre pour éviter la surcharge de travail » (Cass. soc., 6 juillet 2022, n°20-15.656).

Elle déduit de l’attitude de l’employeur, que ce dernier a admis la réalisation de jours de travail supplémentaires qui doivent donc lui être rémunérés, dans le cadre du dispositif du « rachat de jours ».

Faisant application de la décision rendue en janvier dernier, les juges ont alors déterminé le montant de la majoration applicable à ces jours de travail supplémentaires, en précisant que le taux minimum applicable est de 10 %.

Voir aussi: Forfait jours – Entre autonomie du salarié et pouvoir de direction de l’employeur

2607, 2022

Loi sur le pouvoir d’achat : focus sur la Prime de partage de la Valeur (PPV)

La loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est entrée en vigueur, après sa publication au JO le 17 août 2022.

Après vous avoir exposé les grandes lignes du projet de loi dans un précédent article, le cabinet Norma Avocats s’intéresse à la Prime de partage de la valeur qui succède à la Prime exceptionnelle de pouvoir d’achat.

 

PEPA

PPV

Employeurs concernés-Les employeurs de droit privé,

-Les EPIC,

-Les établissements publics administratifs lorsqu’ils emploient des salariés de droit privé,

-Les ESAT.

 

Idem
Salariés concernés-Les salariés liés par un contrat de travail à la date de versement de la prime ou à la date de dépôt de l’accord ou de signature de la décision unilatérale mettant en place la prime,

-Les intérimaires mis à disposition de l’entreprise utilisatrice,

-Les agents publics (EPA ou Epic)

-Les travailleurs en situation de handicap liés à un ESAT.

 

Idem
Critères de modulation du montant de la prime-La rémunération,

-Le niveau de classification,

-La durée de présence effective,

-La durée de travail.

 

L’ancienneté dans l’entreprise devient un critère supplémentaire de modulation.

 

Les conditions de travail liées à l’épidémie de covid-19, étaient, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, un critère de modulation. Il a été supprimé par la loi de finances rectificative pour 2021.

 

Mise en place-Accord d’entreprise/de groupe,

-Décision unilatérale de l’employeur (consultation CSE).

Idem
Montant des exonérationsLa prime est exonérée dans la limite de 1 000 €.

 

Le plafond d’exonération est porté à 2.000 € pour :

-Les entreprises de moins de 50 salariés,

-Les entreprises couvertes par accord d’intéressement,

-Les travailleurs de la deuxième ligne,

-Lorsque la prime est versée par une association ou une fondation reconnue d’utilité publique ou d’intérêt général.

-Lorsque la prime est versée aux travailleurs handicapés d’ESAT.

La prime est exonérée dans la limite de 3.000 €.

 

Le plafond d’exonération est porté à 6.000 € pour :

-Les entreprises de plus ou moins 50 salariés, couvertes par un accord d’intéressement (ou de participation si moins de 50 salariés) = mise en œuvre à la date de versement de la prime ou accords conclus au titre du même exercice que celui du versement de la prime.

-Lorsque la prime est versée par une association ou une fondation reconnue d’utilité publique ou d’intérêt général.

-Lorsque la prime est versée aux travailleurs handicapés d’ESAT.

 

Exonérations fiscales et socialesDans la limite des montants ci-dessus, pour les primes versées entre le 1er juin 2021 et le 31 mars 2022, aux salariés dont la rémunération est inférieure à 3 SMIC :

-Exonération de cotisations et contributions salariales et patronales (dont CSG/CRDS)

-Exonération d’impôt sur le revenu,

-Pas de forfait social.

 

 

Dans la limite des montants ci-dessus :

-Pour les primes versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés ayant perçu, au cours des 12 derniers mois précédant leur versement, une rémunération inférieure à 3 fois la valeur annuelle du Smic :

-Exonération de cotisations et contributions salariales et patronales (dont CSG/CRDS)

-Exonération d’impôt sur le revenu :

-Pas de forfait social.

 

-Pour les primes versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés ayant une rémunération annuelle au moins égale à trois fois le Smic annuel et pour les primes versées à compter du 1er janvier 2024 :

-Exonération ne porte plus sur la CSG/CRDS,

-Soumise à impôt sur le revenu,

-Application du forfait social.

 

Versement de la primeElle pouvait être versée jusqu’au 31 mars 2022.Elle peut être versée depuis le 1er juillet 2022.

 

Le versement peut être réalisé en 1 à 4 fois par année civile.

2507, 2022

L’employeur n’a pas à informer le salarié de son droit à demander des précisions sur les motifs de son licenciement

Depuis la ratification des ordonnances n°2017-1387 du 22 septembre 2017, il est possible pour un salarié d’obtenir des précisions supplémentaires a posteriori sur les motifs énoncés dans sa lettre de licenciement. En effet, le salarié peut, par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé, demander à l’employeur des précisions sur les motifs énoncés dans les 15 jours suivant la notification de son licenciement. L’employeur peut également, à son initiative, préciser les motifs du licenciement dans les mêmes formes (articles L.1235-2 et R.1232-13 du Code du travail).

La question s’est posée de savoir si l’employeur était tenu ou non d’informer le salarié de son droit de demander des précisions sur les motifs de son licenciement.

La Cour de cassation a répondu par la négative en affirmant « qu’aucune disposition n’impose à l’employeur d’informer le salarié de son droit de demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés » (Cass.soc., 29 juin 2022, n°20-22.220).

Dans cet arrêt, la salariée a tenté de soutenir que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse compte tenu du fait que son employeur ne l’avait pas informé, dans sa lettre de licenciement, de sa possibilité d’obtenir des précisions sur les motifs de son licenciement. Pour débouter la salariée, la Cour d’appel a notamment relevé que cette dernière s’était abstenue de solliciter des précisions sur les motifs de son licenciement en temps utiles.

Rappelons que si le salarié ne formule pas de demande de précisions auprès de l’employeur, l’irrégularité que constituerait une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Voir aussi : Des motifs personnels différents peuvent être invoqués dans la lettre de licenciement

2207, 2022

L’obligation de discrétion des représentants du personnel s’agissant d’informations confidentielles.

Pour rappel, les représentants du personnel sont tenus à une obligation légale de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur.

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation apporte des précisions sur la nature des informations ayant un caractère confidentiel et les conséquences en cas de divulgation (Cass. soc., 15 juin 2022, n°21-10.366).

Dans un premier temps, la Cour de cassation précise que revêtent un caractère confidentiel les informations qui sont de nature confidentielle au regard des intérêts légitimes de l’entreprise, ce qu’il appartient à l’employeur, en cas de contestation, d’établir.

En l’espèce, pour établir le caractère confidentiel des données, les juges constatent que :

  • lors de la réunion avec les représentants du personnel, il avait été mentionné expressément que les informations devaient rester strictement confidentielles ;
  • les informations concernaient la gestion interne de l’entreprise ainsi que ses projets de développement, et avaient donc un caractère confidentiel en raison de leur nature et de leur contenu.

Dans un second temps, les juges constatent que le représentant du personnel n’avait pas respecté les règles de confidentialité et de sécurité informatique destinées à assurer, vis à vis des tiers non autorisés, la sécurité des informations (impression des documents sur l’imprimante de l’hôtel). Ils en déduisent que le manquement à l’obligation de discrétion est caractérisé et qu’il justifie une sanction disciplinaire.

Cet arrêt précise donc que l’employeur peut sanctionner disciplinairement un représentant du personnel qui ne respecte pas les protocoles de sécurité informatique mis en place au sein de la société, au regard du risque de divulgation des informations confidentielles à des tiers.

Voir aussi : Le CSE ne peut pas afficher des informations relevant de la vie personnelle d’un salarié sans respecter certaines conditions

2207, 2022

Rappel sur les conditions de licenciement d’un salarié à la suite de son absence prolongée

En application de l’article L. 1132-1 du Code du travail, tout licenciement d’un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap est interdit.

Toutefois, cela ne fait pas obstacle à ce qu’un salarié soit licencié, non pas en raison de son état de santé, mais en raison de la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt en date du 06 juillet 2022 (Cass. soc., 06 juillet 2022, n° 21-10.261).

Les juges précisent que l’employeur doit démontrer la désorganisation de l’entreprise consécutive aux absences du salarié, et non se cantonner à la désorganisation du service auquel est rattaché le salarié. C’est cette désorganisation de l’entreprise qui doit être visée dans la lettre de licenciement, et surtout caractérisée.

En l’espèce, l’employeur a démontré avoir dû pallier l’absence du salarié par une organisation interne et par le remplacement définitif de celui-ci. Toutefois, la lettre de licenciement visait uniquement la désorganisation du service auquel appartenait le salarié, ce qui ne pouvait suffire à justifier le licenciement du salarié.

Voir aussi : La blague sexiste d’un animateur de télévision justifie son licenciement pour faute grave

707, 2022

Pouvoir d’achat : quelles sont les mesures présentées par le Gouvernement ?

Afin de lutter contre l’inflation, le Gouvernement vient d’annoncer une série de mesures en faveur du pouvoir d’achat des français. Le projet de loi « portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat » devrait être examiné par le Parlement au cours de l’été.

Le cabinet Norma Avocats revient sur les mesures qui concerneraient directement les entreprises.

  • Mesures portant sur l’intéressement

Le projet de loi prévoit de rallonger la durée des accords d’intéressement, ou des décisions unilatérales de l’employeur. Cette durée passerait de 3 ans à 5 ans maximum.

Il est également envisagé de permettre aux entreprises de moins de 50 salariés dépourvues de CSE ou de Délégués syndicaux (DS), de mettre en place de l’intéressement par voie unilatérale.

Rappelons qu’aujourd’hui, cette possibilité n’est ouverte qu’aux entreprises de moins de 11 salariés, sans DS ou CSE.

Le Gouvernement envisage en outre de mettre en place une procédure dématérialisée de rédaction des accords collectifs/décisions unilatérales accessible sur internet. Cette procédure permettrait de générer un accord ou une décision type, conforme à la loi et qui sécuriserait les exonérations sociales et fiscales dès leur dépôt sur la plateforme.

Enfin, le projet de loi prévoit de supprimer le contrôle de forme des accords opéré par l’administration.

  • Pérennisation de la Prime exceptionnelle de pouvoir d’achat

La prime dite « Macron », mise en place en 2019 et renouvelée chaque année depuis, pourrait être pérennisée et verrait son montant d’exonération réhaussé.

Le montant de la prime exonéré d’impôts et de cotisations sociales passerait de 1.000 € à 3.000 €, sachant que ce plafond pourrait être doublé, passant alors à 6.000 € pour les employeurs couverts par un dispositif d’intéressement ou de participation.

  • Négociation sur les bas salaires dans les branches

Il est aussi envisagé de compléter les motifs de fusion des accords de branche. L’objectif est d’inciter les branches à négocier sur les salaires et ainsi de permettre une augmentation des minima conventionnels au niveau du Smic.

  • Prime transport

Elle recouvre la prise en charge par l’employeur des frais de carburant ou des frais exposés pour l’alimentation de véhicules électriques pour les déplacements domicile-travail (sous certaines conditions).

Le plafond d’exonération de cotisations pour les frais de carburant passerait de 200 € à 400 € par an pour 2022 et 2023.

407, 2022

Information-consultation du CSE dans le cadre de l’activité partielle : quelles sont les éléments à transmettre aux élus ?

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, l’employeur qui envisage de placer les salariés en activité partielle doit au préalable :

  • Informer et consulter le CSE;
  • Puis, adresser une demande d’autorisation à l’administration*.

Les textes ne précisent toutefois pas quel est le contenu de l’information à fournir au CSE dans le cadre d’un projet de mise en activité partielle.

Selon la Cour d’appel de Versailles (CA Versailles, 6e ch., 12 mai 2022, n°21/00337), l’employeur ne peut pas se contenter de fournir au CSE, les informations transmises à l’administration au soutien de sa demande d’autorisation de l’activité partielle.

Autrement dit, les seules informations suivantes ne sont pas suffisantes pour que le CSE puisse rendre un avis utile sur la mise en activité partielle :

  • Les motifs justifiant le recours à l’activité partielle,
  • La période de prévisibilité de sous-activité,
  • Le nombre de salariés concernés.

Au-delà de ces informations, et comme pour toute consultation, l’employeur doit transmettre aux élus les données permettant d’établir l’impact de la mise en place de l’activité partielle sur l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise.

A la lecture de l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles, les données à transmettre au CSE peuvent notamment porter sur :

– les prévisions économiques chiffrées et actualisées sur l’activité de l’entreprise,

– l’évolution des effectifs et la masse salariale ;

-l’organisation concrète de l’activité partielle par région, par établissement, par service ou par catégorie professionnelle : critères appliqués pour répartir les heures chômées, les prévisions d’heures d’activité partielle, la liste des taches et projets dont le report est envisagé…

 

*Par dérogation, en cas de sinistres ou d’intempéries ou en cas de circonstances de caractère exceptionnel, l’avis du CSE peut être recueilli après la demande d’autorisation de l’administration.

107, 2022

Précisions de la CAA de Paris sur la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) à la suite d’une rupture conventionnelle collective (RCC)

La question de la concomitance entre une RCC et un PSE a été abordée par le questions-réponses du ministère du Travail relatif aux accords de RCC. Ce document a indiqué que ces deux dispositifs de restructuration n’avaient pas vocation à être mis en œuvre en même temps.

 

Un arrêt récent de la Cour administrative d’appel (CAA) de Paris du 14 mars 2022 (n° 21PA06607) a apporté des éléments complémentaires sur la question de la succession de ces dispositifs.

 

Dans cet arrêt, la CAA de Paris était saisie d’un recours en annulation contre la décision d’homologation d’un PSE au motif, selon les syndicats, de la déloyauté des négociations du PSE, car ces négociations avaient eu lieu juste après la conclusion d’une RCC.

 

Les syndicats ont été déboutés de l’ensemble de leurs demandes. Pour la CAA de Paris :

 

  • La conclusion d’un accord RCC n’empêche pas la conclusion ou l’établissement d’un PSE, dès lors que les conditions posées par l’accord RCC sont respectées, et notamment la période d’interdiction de licenciement pour motif économique prévue à un tel accord. En l’état, le PSE prévoyait des licenciements pour motif économique a posteriori de la période d’interdiction de l’accord RCC. Il n’y avait donc pas de violation de l’accord RCC. En effet, au cas d’espèce, l’accord RCC avait été signé en décembre 2020 et excluait tout licenciement économique pour l’année 2021 au sein de la société Aéroports de Paris (ADP). Fin janvier 2021, la Direction avait entamé des négociations pour conclure un PSE et faute d’accord, s’était résolue à établir un document unilatéralement. Le PSE qui a, par la suite, été homologué par la DREETS prévoyait de premiers licenciements économiques à partir de la mi-janvier 2022.

 

  • L’argument de la déloyauté dans les négociations du PSE n’était pas caractérisé puisqu’il n’appartenait pas à la DREETS de contrôler les négociations sur la RCC qui ont précédé l’élaboration du PSE. En effet, l’accord RCC n’avait pas fait l’objet d’une contestation et seule l’homologation du document unilatéral fixant le contenu du PSE était ici en cause.

 

  • Enfin, les syndicats avaient demandé à la DREETS d’enjoindre l’employeur de retirer son projet de PSE et de lui interdire de recourir à une procédure de licenciement pour motif économique pour toute la durée de l’accord de RCC (l’année 2021). L’administration avait rejeté cette demande et la CAA a confirmé qu’une telle demande ne relevait pas du pouvoir d’injonction de la DREETS.

 

107, 2022

Le CSE n’est pas consulté si le reclassement du salarié est impossible

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, que cette inaptitude soit d’origine professionnelle ou non professionnelle, l’employeur a l’obligation de lui proposer un reclassement, après avis du CSE, un autre emploi approprié à ses capacités en tenant compte des préconisations du médecin du travail et des indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise (articles L1226-2 et L1226-10 du Code du travail).

S’est alors posée la question de savoir si, l’employeur est tenu de consulter le CSE lorsque l’avis d’inaptitude du médecin du travail précise expressément que le reclassement d’un salarié est impossible ?

Par un récent arrêt en date du 8 juin 2022, la Cour de cassation a exclu toute consultation du CSE en cas d’impossibilité de reclassement constatée par le médecin du travail (Cass.soc., 8 juin 2022, n°20-22.500). Cette dispense de consultation du CSE ne concerne que les cas où le médecin du travail a expressément mentionné que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi.

Cette solution s’avère logique car dans les deux cas susvisés, l’employeur n’a pas à effectuer des recherches de reclassement de sorte que la consultation du CSE se trouve purement et simplement privée d’objet. La position de la Cour de cassation vient ainsi mettre fin à une longue controverse jurisprudentielle et sécurise, enfin, les pratiques en la matière.

A lire aussi : Les précisions du médecin du travail émises par courriel sur le reclassement du salarié inapte concourent à la justification de l’impossibilité de reclassement

 

3006, 2022

Attention à la date de dépôt des accords d’intéressement !

Lorsqu’un accord d’intéressement est conclu, les sommes versées à ce titre bénéficient d’exonérations fiscales et sociales sous certaines conditions, notamment :

 

  • La conclusion de l’accord avant le premier jour de la deuxième moitié de la période de calcul suivant la date de sa prise d’effet (L. 3314-4 du Code du travail) ;

 

 

Lorsque ces conditions ne sont pas respectées, l’accord produit ses effets, mais il n’est pas possible de bénéficier du régime d’exonérations fiscales et sociales (L. 3315-5 du Code du travail).

 

Un arrêt récent de la Cour de cassation du 12 mai 2022 (n° 20-22.367) a fait application de ces dispositions en confirmant la perte des exonérations et la validité d’un redressement de cotisations par l’URSSAF en conséquence.

 

Au cas d’espèce, l’employeur avait jusqu’au 15 octobre 2014 pour déposer l’accord, mais ne l’a fait que le 12 novembre.

 

Débouté en appel, l’employeur s’est pourvu en cassation en faisant valoir que l’article L. 3315-5 du Code du travail qui précise les conséquences du dépôt hors délai d’un accord d’intéressement (cf. ci-dessus), prévoit la perte des exonérations fiscales et non pas des exonérations sociales, car il vient juste après les articles L. 3315-5 et L. 3315-4 du Code du travail relatifs aux exonérations fiscales de l’intéressement.

 

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi, considérant que même si l’article L. 3315-5 du Code du travail ne précise pas quelles exonérations sont perdues faute de respecter le délai de dépôt de l’accord d’intéressement, cet article est inséré dans le chapitre V « régime fiscal et social de l’intéressement », de sorte que la perte des exonérations englobe les aspects fiscaux et sociaux.

 

1606, 2022

Attention aux mentions figurant sur les bulletins de paie des salariés !

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a rappelé que les éléments mentionnés sur les bulletins de paie sont présumés valables, jusqu’à preuve du contraire.

En l’espèce, il s’agissait d’une salariée ayant été embauchée successivement sous contrats à durée déterminée puis sous contrat à durée indéterminée, avec des périodes d’interruption entre les différents contrats.

La date d’effet du premier contrat à durée déterminée étant mentionnée sur ses bulletins de paie comme date d’entrée dans l’entreprise, la salariée a revendiqué le bénéfice d’une reprise d’ancienneté à cette date, alors que l’employeur soutenait que cette mention était une erreur, l’ancienneté devant se décompter à la date d‘embauche en CDI (Cass. Soc., 11 mai 2022, n°20-21.362).

La Cour de cassation a donné raison à la salariée en considérant que la date d’ancienneté figurant sur les bulletins de paie vaut présomption de reprise d’ancienneté, sauf si l’employeur en rapporte la preuve contraire, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Comment l’employeur peut-il rapporter la preuve contraire ? Il peut démontrer, par tout moyen, qu’il s’agit, par exemple, d’une erreur matérielle ou de l’application circonscrite d’une disposition conventionnelle (ex: la Convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 accorde une reprise d’ancienneté aux salariés uniquement pour la détermination de leur classification et de leur rémunération).

Nous vous recommandons donc de veiller à l’exactitude des mentions figurant sur les bulletins de paie des salariés, notamment s’agissant de l’ancienneté, mention déterminante pour le calcul des indemnités de rupture.

A lire aussi : Le contrat de travail d’un salarié ne peut être modifié par accord collectif sans son accord exprès.

1606, 2022

Organisation et déroulement des élections professionnelles fixés par l’employeur : le syndicat ne peut les remettre en cause après le scrutin

En principe, les modalités d’organisation et de déroulement des opérations électorales sont fixées dans le Protocole d’accord préélectoral (PAP), négocié et conclu par l’employeur et les organisations syndicales intéressées.

En l’absence de PAP, et si le juge judiciaire n’est pas saisi de la question, l’employeur fixe de manière unilatérale les modalités du scrutin.

Dans un arrêt du 18 mai 2022, la Cour de cassation s’est penchée sur la question de savoir si, après le scrutin, un syndicat qui a présenté un candidat pouvait demander l’annulation de l’élection en raison des irrégularités affectant la décision unilatérale de l’employeur (Cass., soc, 18 mai 2022, n° 21-11.737)

Selon les juges, ce syndicat ne peut plus, après la proclamation des résultats, contester la validité de la décision unilatérale de l’employeur, et demander l’annulation du vote, s’il n’a pas :

  • Au stade préélectoral, saisi le juge judiciaire en contestation de la décision unilatérale de l’employeur, ou,
  • Au plus tard lors du dépôt de sa liste de candidat, émis des réserves sur les modalités unilatérales d’organisation et de déroulement du vote.

La Cour de cassation a repris la position qu’elle avait adoptée s’agissant de la contestation du PAP négocié et signé entre l’employeur et les organisations syndicales intéressées (Cass., soc, 24 novembre 2021, n°20-20.962).

Lors des prochaines élections, les employeurs devront être attentifs aux « réserves » qui pourront être portées sur les listes de candidatures, la Cour de cassation n’ayant pas précisé la forme, et le niveau de détail que doivent contenir ces réserves.

306, 2022

Comment rémunérer le temps de déplacement d’un RS se rendant à une réunion du CSE ?

Dans un arrêt du 21 avril 2022, la Cour de cassation se prononce sur la rémunération du temps de déplacement d’un Représentant syndical qui se rend, en dehors de son temps de travail, à une réunion du CSE organisée par l’employeur (Cass. soc. 21 avril 2022, n° 20-17.038).

Pour les juges, ce temps de trajet est payé comme du temps de travail effectif dès lors qu’il dépasse le temps de trajet habituel du représentant entre son domicile et son lieu de travail.

La Cour de cassation confirme sa position selon laquelle l’employeur ne peut pas, à la différence des salariés « ordinaires », octroyer aux représentants du personnel une simple contrepartie en argent ou en repos pour ce temps de déplacement excédentaire.

Ce temps de trajet excédentaire est d’ailleurs comptabilisé au titre des heures supplémentaires (Cass. soc, 27 janvier 2021, n°19-22.038).

106, 2022

Les obligations des grandes entreprises en termes de représentation équilibrée par sexe dans les équipes dirigeantes

Vous connaissez bien l’Index de l’égalité professionnelle devant être calculé et publié par toutes les entreprises d’au moins 50 salariés.

Il s’agit ici d’une obligation supplémentaire et plus stricte incombant aux grandes entreprises.

En effet, la loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle (article 14) a créé une obligation de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes des entreprises d’au moins 1 000 salariés pour le troisième exercice consécutif, ainsi qu’une obligation de transparence en la matière.

Le décret d’application n° 2022-680 du 26 avril 2022 fixe les modalités de cette obligation dont la mise en œuvre est déployée progressivement :

  1. Dès l’année 2022, les entreprises concernées doivent calculer et publier annuellement (au 1er mars), sur leur site internet, les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes dans les postes de direction. Exceptionnellement, pour la première année d’application, les entreprises ont jusqu’au 1er septembre 2022 pour publier les écarts éventuels. Ces informations seront publiées sur le site du ministère du travail à partir du 1er mars 2023.
  2. A compter du 1er mars 2026, les entreprises concernées devront atteindre un objectif d’au moins 30% de femmes ou au moins 30% d’hommes cadres dirigeants et d’au moins 30% de femmes ou au moins 30% d’hommes membres d’instances dirigeantes, sous peine de devoir définir des mesures adéquates et pertinentes de correction.
  3. À compter du 1er mars 2029, les objectifs chiffrés passent de 30% à 40%. Si ces objectifs ne sont pas atteints, les entreprises devront, au bout d’un an, publier sur leur site internet des objectifs de progression et les mesures de correction retenues. Elles disposeront également d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité avec les objectifs chiffrés de 40%, sous peine de pénalité financière.

Le ministère du travail a publié sur son site internet un « questions-réponses » afin de donner des précisions sur cette obligation de représentation équilibrée.

Voir aussi : Index égalité professionnelle : en-deçà de 85 points l’entreprise doit mettre en place des objectifs de progression

2305, 2022

Le contenu du volet environnemental de la BDESE a été dévoilé

Un décret du 26 avril 2022 a précisé qu’à défaut d’accord collectif pour sa mise en place, la Base de Données Economiques, Sociales et Environnementales (BDESE) doit comporter les informations environnementales relatives aux domaines suivants (article R. 2312-8 du Code du travail) :

  • La politique générale de l’employeur en matière environnementale (quelle organisation l’entreprise met-elle en place pour prendre en compte les questions environnementales et, le cas échéant, les démarches d’évaluation ou de certification en matière d’environnement) ;
  • L’économie circulaire (la prévention et gestion de la production des déchets, notamment les déchets dangereux figurant à l’article R. 541-8 du Code de l’environnement) ;
  • Les changements climatiques (identifier les postes d’émissions directes de gaz à effet de serre et lorsque l’entreprise dispose de cette information, évaluer le volume de gaz à effet de serre ; faire figurer le bilan des émissions de gaz à effet de serre ou le bilan simplifié pour les entreprises qui y sont soumises).

Pour les entreprises de plus de 300 salariés, la liste est légèrement plus détaillée (article R. 2312-9 du Code du travail).

Cette liste est supplétive, c’est-à-dire que par accord collectif, les parties peuvent ajouter ou retirer des catégories.

Au regard de la complexité de ces sujets, nous ne pouvons que vous encourager à conclure un accord collectif sur la BDESE et choisir avec les partenaires sociaux les informations environnementales qui vont y figurer.

1905, 2022

La blague sexiste d’un animateur de télévision justifie son licenciement pour faute grave

Lors de la diffusion d’un jeu télévisé sur une chaîne publique, dans lequel des couples sont mis à l’épreuve de questions posées sur leur vie amoureuse, un animateur fait une blague sexiste formulée en ces termes : « Comme c’est un sujet super sensible, je la tente : les gars vous savez c’qu’on dit à une femme qu’a déjà les deux yeux au beurre noire ? – Elle est terrible celle-là – On lui dit plus rien on vient déjà d’lui expliquer deux fois ! ».

A la suite de cette blague sexiste, la société de production audiovisuelle décide de notifier à l’animateur son licenciement pour faute grave. Ce dernier a contesté le bien fondé de son licenciement, estimant que sa blague relevait de sa liberté d’expression.

En effet, sauf abus, le salarié jouit dans l’entreprise et en dehors de celle-ci de sa liberté d’expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées (Cass.soc., 22 juin 2004, n°02-42.446).

La Cour de cassation a rejeté l’argumentaire de l’animateur en considérant que l’ingérence de l’employeur dans sa liberté d’expression était proportionnée au but recherché, à savoir la lutte contre les violences faites aux femmes, de sorte que son licenciement était justifié (Cass.soc., 20 avril 2022, n°20-10.852)

Pour ce faire, la Cour de cassation a notamment relevé que l’animateur s’était engagé contractuellement à respecter une charte qui prévoyait le refus de toute complaisance à l’égard de propos haineux ou méprisant, notamment pour des motifs fondés sur le sexe.

Pour aller plus loin : Des précisions sur les délais de la procédure disciplinaire

1805, 2022

Indemnité d’éviction : le salarié protégé ne peut solliciter des dommages-intérêts pour majoration de son impôt sur le revenu

La Cour de cassation précise que la majoration d’impôt sur le revenu, induite par le versement d’une indemnité d’éviction, ne constitue pas un préjudice réparable.

Dans cette affaire, un salarié protégé, licencié après autorisation de l’Administration, obtient l’annulation de celle-ci.

Il sollicite alors sa réintégration, et obtient le versement d’une indemnité d’éviction correspondant aux rémunérations qu’il aurait perçues s’il avait continué à travailler pour l’entreprise.

Or, le versement en une seule fois de cette indemnité (représentant près de 2 ans de salaire) entraine un surcout de son impôt sur le revenu pour l’année considérée. Le salarié estime alors que cette charge supplémentaire, étant directement en lien avec le versement de l’indemnisation de l’éviction fautive, lui cause un préjudice que son employeur doit réparer.

Mais, selon les juges, l’employeur n’a pas à prendre en charge les conséquences fiscales de l’indemnité d’éviction.

(Cass. soc., 6 avril 2022, n° 20-22.918).

1805, 2022

Des motifs personnels différents peuvent être invoqués dans la lettre de licenciement !

La Cour de cassation a rappelé qu’il est possible d’invoquer dans une lettre de licenciement des motifs différents de rupture inhérents à la personne du salarié (en l’espèce, la faute grave et l’insuffisance professionnelle) sous deux conditions :

Cette solution a déjà été retenue par la Cour de cassation auparavant dans le cas similaire d’un licenciement pour faute grave et insuffisance professionnelle (Cass. soc., 17 octobre 2018, n°17-13.431) et dans le cas d’un licenciement pour faute grave et inaptitude (Cass. soc., 23 septembre 2003, n° 01-41.478).

De plus, la Cour de cassation a précisé dans cet arrêt que, malgré l’absence de caractérisation de la faute grave invoquée dans la lettre de licenciement, et dès lors que l’insuffisance professionnelle du salarié était établie, il convient de rechercher si ce motif d’insuffisance professionnelle ne pouvait pas à lui seul constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

En revanche, il est important de préciser qu’il n’est pas possible de concilier un motif personnel et un motif économique dans la lettre de licenciement.

Pour aller plus loin : Des précisions sur les délais de la procédure disciplinaire

1705, 2022

Chauffeur VTC : Salarié ou indépendant ?

Un chauffeur VTC est-il un salarié ou un indépendant ? Pour répondre à cette question, la Cour de cassation a récemment rappelé que le statut de salarié ne peut être reconnu qu’en présence d’un lien de subordination (Cass.soc.,13 avril 2022, n°20-14.870).

Dans les faits, un chauffeur VTC a conclu un contrat de location de longue durée d’un véhicule et un contrat d’adhésion à un système de mise en relation avec une société de plateforme numérique. Après quelques mois de service, la société décide de rompre la relation commerciale avec le chauffeur.

C’est dans ce cadre que le chauffeur VTC a sollicité la requalification de sa relation commerciale en un contrat de travail et obtenir notamment des rappels de salaire et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Cour d’appel a reconnu l’existence d’un contrat de travail au motif que le chauffeur VTC n’avait pas le libre choix de son véhicule, qu’il y avait une interdépendance entre les contrats de location et d’adhésion à la plateforme de mise en relation, que le GPS permettait d’assurer un contrôle permanent de l’activité du chauffeur et que la société fixait le montant des courses.

La Cour de cassation censure ce raisonnement et rappelle qu’un contrat de travail suppose qu’un lien de subordination soit caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et d’en sanctionner les manquements. La Cour d’appel ne pouvait donc pas conclure à l’existence d’un contrat de travail sans caractériser un lien de subordination.

Pour aller plus loin L’encadrement de l’activité des plateformes de mise en relation par le Conseil constitutionnel

1605, 2022

Des précisions sur les délais de la procédure disciplinaire

Droit disciplinaire : les délais à respecter en cas de révélation de fautes après l’entretien préalable

 La Cour de cassation apporte des précisions sur les délais à respecter en cas de révélation de nouvelles fautes après l’entretien préalable.

En principe, en application de l’article L. 1332-2 du Code du travail, l’employeur ne peut plus licencier pour faute le salarié au-delà du délai d’un mois suivant le jour fixé pour l’entretien.

Quid des délais à respecter en cas de révélation de nouvelles fautes après l’entretien ?

La Cour de Cassation donne le mode opératoire :

  • L’employeur doit adresser au salarié une convocation à un nouvel entretien préalable et cela dans le délai d’un mois à compter du premier entretien,
  • L’employeur doit également notifier la sanction disciplinaire dans un délai d’un mois, qui court à compter de la date du dernier entretien(Cass. soc. 23 mars 2022, n°20-19.963 ; Cass. soc., 06 avril 2022, n°20-22.364).

Faute grave et absence du salarié : le licenciement immédiat n’est pas exigé

En principe, l’employeur qui entend licencier un salarié pour faute grave doit engager la procédure disciplinaire dans un délai restreint après avoir eu connaissance des faits fautifs.

Néanmoins, la jurisprudence admet parfois qu’un délai plus long (en l’espèce 4 semaines) ne retire pas à la faute son caractère de gravité, notamment lorsque le salarié, dont le contrat de travail est suspendu depuis plusieurs mois, est absent de l’entreprise (Cass. soc., 9 mars 2022, n°20-20.872).

Une telle solution est cohérente dès lors que le salarié, qui ne travaille plus au sein de l’entreprise en raison de la suspension de son contrat de travail, n’est plus en poste, effaçant ainsi la nécessité de rompre immédiatement le contrat de travail.

Toutefois, il est nécessaire de veiller à ce que la procédure disciplinaire soit, en tout état de cause, engagée dans le délai de prescription de 2 mois (article L. 1332-4 du Code du travail) qui court à compter du jour où l’employeur a une connaissance exacte des faits reprochés au salarié.

Pour aller plus loin : Le licenciement d’un salarié en raison de son déménagement à plus de 450 kilomètres de son lieu de travail est justifié par la Cour d’appel de Versailles

205, 2022

APLD : mise à jour du dispositif

Le « Questions-réponses » du Gouvernement sur l’APLD vient d’être mis à jour suite à l’entrée en vigueur du Décret n° 2022-508 du 8 avril 2022 et de l’Ordonnance n° 2022-543 du 13 avril 2022.

  • Durée du dispositif

Jusqu’à présent, les entreprises pouvaient bénéficier de l’allocation d’APLD pour une durée maximum de 24 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 36 mois consécutifs.

Désormais, cette durée maximum passe à 36 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 48 mois consécutifs.

C’est à compter de la première période d’autorisation de l’APLD par l’administration que se décomptent ces 48 mois.

  • Échéance du dispositif

Pour bénéficier du dispositif, les employeurs avaient jusqu’au 30 juin 2022 pour transmettre à l’administration l’accord collectif ou la décision unilatérale de recours à l’APLD.

Ils ont désormais jusqu’au 31 décembre 2022 pour le faire.

Autrement dit, passé cette date, il ne sera plus possible pour les employeurs de s’engager dans le dispositif de l’APLD.

L’administration indique que le dispositif de l’APLD trouvera potentiellement à s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2026.

  • Conditions de prolongation du dispositif

Qu’en est-il des entreprises ayant conclu un accord collectif ou adopté une décision unilatérale, avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, et qui souhaiteraient bénéficier de la prolongation du dispositif ?

L’administration distingue 2 situations :

  • L’entreprise est couverte par un accord collectif: elle devra négocier et conclure un avenant à son accord initial, qu’elle devra ensuite transmettre à l’administration pour validation.
  • L’entreprise est couverte par une décision unilatérale prise sur le fondement d’un accord de branche étendu: si l’accord de branche mentionne expressément une durée de 24 mois sur une période de référence de 36 mois et/ou une échéance au 30 juin 2022, l’entreprise doit attendre que la branche négocie et signe un avenant de prolongation du dispositif, puis qu’il soit étendu. Elle pourra ensuite modifier sa décision unilatérale initiale et solliciter une nouvelle homologation de l’administration.

Dans ces hypothèses, les entreprises pourront, même après le 31 décembre 2022, communiquer à l’administration leur avenant de révision ou leur document adaptant leur décision unilatérale.

1904, 2022

Obligation de loyauté et travail d’un salarié durant un arrêt maladie

Le principe de bonne foi contractuelle, ou obligation de loyauté, irrigue la relation entre l’employeur et le salarié. En cas de suspension du contrat de travail, la Cour de cassation adopte une vision restrictive de cette obligation. Se posait la question de la position du Conseil d’État sur ce sujet.

Dans un arrêt récent, le Conseil d’État a eu à se prononcer sur le licenciement pour faute d’un salarié protégé qui avait travaillé, à plusieurs reprises pour un autre employeur, durant un arrêt maladie lié à un accident du travail (CE, 4 février 2022, n° 438412, Sté Chronopost c/ L.).

Dans les faits, le salarié était employé en tant que livreur pour une société de transport de colis et avait travaillé durant son arrêt maladie pour une société de transport urgent de produits médicaux vers des professionnels de santé.

Pour la société de transport de colis, il s’agissait d’un comportement fautif sur le fondement du manquement l’obligation de loyauté. Le salarié se voyait  également reprocher la violation son obligation de confidentialité.

Le licenciement avait été autorisé par l’inspecteur du travail, mais cette autorisation a été annulée par le Tribunal administratif puis par la Cour administrative d’appel.

Le Conseil d’État, saisi du pourvoi de la société, a confirmé ces décisions estimant que le salarié n’avait pas manqué à son obligation de loyauté, car les deux employeurs n’étaient pas concurrents. Quant au manquement à l’obligation de confidentialité, il n’était pas démontré.

Cette solution s’aligne sur celle de la Cour de cassation qui, pour un salarié non protégé, relève que c’est la situation de concurrence qui caractérise un manquement à l’obligation de loyauté lorsque le salarié travaille pour un autre employeur lors d’une période de suspension de son contrat de travail (Cass. Soc., 5 juillet 2017, n° 16-15.623).

Ainsi, le seul exercice d’une activité professionnelle chez un autre employeur pendant une suspension du contrat de travail pour maladie ne constitue pas un manquement à l’obligation de loyauté si l’employeur initial ne démontre pas un préjudice résultant d’une situation concurrentielle. Il convient donc d’être attentif à la motivation d’un éventuel licenciement sur ce fondement.

1504, 2022

Le licenciement d’un salarié en raison de son déménagement à 450 kilomètres de son lieu de travail est justifié selon la Cour d’appel de Versailles

Dans cette affaire, un responsable support technique a déménagé, en Bretagne, à près de 450 km de son lieu de travail situé dans les Yvelines.

Considérant que ce nouveau domicile n’était pas compatible avec l’obligation de sécurité dont il est débiteur, l’employeur a demandé à son collaborateur de revenir s’installer en région parisienne.

Face au refus du salarié, l’employeur l’a licencié pour cause réelle et sérieuse en raison de la fixation de son domicile en un lieu trop éloigné de ses lieux d’activité professionnelle.

De manière assez surprenante, la Cour d’appel de Versailles a jugé que le refus du salarié était fautif, même en l’absence de clause de domicile insérée dans son contrat, et a ainsi approuvé la position de l’employeur.

Les juges se sont placés sur le terrain de l’obligation de sécurité de l’employeur pour justifier leur décision.

La Cour d’appel relève que le déménagement du salarié avait allongé de manière excessive son temps de trajet pour se rendre au siège social de l’entreprise (4h30 de trajet par la route, ou 3h30 de train).

Selon les juges, l’atteinte à la liberté du salarié de choisir son domicile est proportionnée compte tenu de :

  • l’obligation de sécurité qui pèse sur l’employeur, et,
  • l’obligation de veiller au repos quotidien du salarié ainsi qu’à l’équilibre entre sa vie familiale et professionnelle dans le cadre de la convention de forfait en jours.

Si la solution de la Cour d’appel de Versailles est séduisante, il convient de rester prudent dans sa mise en œuvre notamment au regard de la position de la Cour de cassation qui n’admet que très rarement les atteintes de l’employeur au libre choix du domicile du salarié.

Au regard de l’essor du télétravail et des mobilités géographiques, ce type de contentieux pourrait bien se développer à l’avenir. On se demande alors si les juges adopteront une position similaire à celle de la Cour d’appel de Versailles.

(Cour d’appel de Versailles, 10 mars 2022, n° 20/02208)

804, 2022

Le contrat de travail d’un salarié ne peut être modifié par accord collectif sans son accord exprès.

Une convention collective ou un accord collectif antérieur au contrat de travail est opposable au salarié, sauf stipulation expresse spécialement négociée.

En revanche, si la convention ou l’accord a été conclu après l’embauche du salarié, seules les clauses plus favorables que le contrat de travail lui sont opposables (article L. 2254-1 du Code du travail ; Cass. soc., 17 oct. 2000, n° 98-42.018 ; Cass. soc., 27 juin 2002, n° 00-42.646).

Ainsi, un accord collectif ne peut modifier, sans l’accord exprès des salariés concernés, les droits qu’ils tiennent de leur contrat de travail, comme le rappelle de nouveau la Cour de cassation dans un arrêt récent du 16 février 2022 (Cass. soc., 16 février 2022, n° 20-17.644). En l’espèce, l’employeur prévoyait dans un accord collectif d’éventuels aménagements de la durée du travail, de la rémunération et du lieu de travail.

Néanmoins, il existe des exceptions à cette règle en vertu de dispositions légales, notamment l’article L. 2254-2 du Code du travail créant l’accord de performance collective et autorisant la primauté de cet accord sur les contrats de travail antérieurs.

Les juges réaffirment également, dans cet arrêt du 16 février 2022, qu’il n’est pas possible de déroger aux dispositions d’ordre public par accord collectif (article L. 2251-1 du Code du travail), telles que l’application du dispositif de licenciement collectif pour motif économique en l’espèce.

404, 2022

Le renforcement du statut du lanceur d’alerte

Le 16 février dernier, le sénat a définitivement adopté une proposition de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte. Cette loi, qui vise à transposer la directive traitant du même sujet du 23 octobre 2019 (2019/1937), entrera en vigueur 6 mois après sa promulgation, soit potentiellement avant la fin de l’année 2022.

En substance, elle prévoit d’élargir la définition du lanceur d’alerte en élargissant le périmètre des informations pour lesquelles le lanceur d’alerte n’a pas besoin de justifier d’une connaissance personnelle des faits dénoncés et en complétant la liste des exclusions du régime de l’alerte (exemple : le secret médical, le secret professionnel de l’avocat). De plus la notion de désintéressement financier est révisée permettant au lanceur d’alerte de conserver sa protection en cas de gain pécunier accessoire à son alerte.

Les mesures protectrices liées à ce statut sont étendues à certaines catégories de personnes physiques ou morales proches du lanceur d’alerte (les entités juridiques qu’il contrôle, les facilitateurs qui aident à lancer l’alerte, ses proches).

En outre, la procédure d’alerte est repensée en permettant au lanceur d’alerte d’opter pour un signalement interne ou externe selon son choix. Le signalement externe pourra avoir lieu auprès d’une autorité compétente, dont la liste sera fixée par décret, du Défenseur des droits, de l’autorité judiciaire ou d’une institution de l’Union européenne compétente pour recueillir des alertes.

La divulgation publique des informations recueillies ne pourra avoir lieu que si aucune réponse appropriée aux signalements externe ou interne n’a été prise, en cas de danger imminent ou manifeste pour l’intérêt général ou lorsqu’un signalement externe ferait courir un risque de représailles ou ne permettrait pas de remédier efficacement à la situation.

Enfin, un principe de non-discrimination en faveur des lanceurs d’alerte est introduit au sein d’un nouvel article L. 1121-2 du Code du travail.

2403, 2022

Index égalité professionnelle : en-deçà de 85 points l’entreprise doit mettre en place des objectifs de progression

Le décret 2022-243 du 25 février 2022 crée 2 niveaux d’obligation pour l’entreprise, en fonction de la note qu’elle a obtenue dans le cadre de son index égalité professionnelle.

  • Lorsque la note globale de l’index est inférieure à 75 points: les dispositions sont inchangées

L’entreprise prend des mesures de correction pour diminuer les écarts entre les hommes et les femmes.

Ces mesures sont fixées par accord collectif ou par décision unilatérale après consultation du CSE (plan d’action), et publiées sur le site internet de l’entreprise, sous peine de pénalité financière.

Si au bout de 3 ans, et en dépit des mesures de correction, l’entreprise n’a toujours pas atteint 75 points, s’applique également la pénalité financière de 1% de la masse salariale.

  • Lorsque la note globale de l’index est inférieure à 85 points:

Dans cette hypothèse, l’entreprise fixe des objectifs de progression pour chaque indicateur pour lequel la note maximale n’a pas été atteinte.

Ces objectifs sont, comme pour les mesures de correction, fixés par accord collectif ou par décision unilatérale après consultation du CSE (plan d’action), puis publiés sur le site internet de l’entreprise.

Si la pénalité financière de 1% n’est applicable dans ce cas, il est néanmoins prévu que les entreprises bénéficiant des mesures du Plan de relance sont soumises au respect de l’ensemble des dispositions de l’index.

***

Si l’entreprise a obtenu une note globale supérieure à 75 mais inférieure à 85, il convient :

  • De pointer les indicateurs pour lesquels l’entreprise n’a pas obtenu la note maximale, puis,
  • De vérifier si elle est couverte par un accord ou un plan d’action qui prévoit des objectifs de progression en cohérence avec les indicateurs où elle n’a pas eu la note maximale.

Les entreprises dont le score est inférieur à 85 points ont jusqu’au 1er septembre 2022 pour définir et publier des objectifs de progression pour chacun des indicateurs pour lesquels la note maximale n’a pas été obtenue.

1803, 2022

Garde d’enfant liée au Covid : quelles sont les règles applicables aux salariés ?

A l’heure de la levée des restrictions sanitaires, quelles sont les règles applicables au salarié, parent d’un enfant devant s’isoler, parce que cas contact ou positif au Covid ?

Le cabinet Norma Avocats fait le point sur les dispositions applicables à ce jour, et au plus tard, jusqu’au 31 décembre 2022.

1/ Situations où le salarié bénéficie de l’activité partielle au titre de la garde de son enfant

  1. Lorsque le salarié (dans l’impossibilité de télétravailler) doit garder son enfant de moins de 16 ans déclaré cas contact, et devant s’isoler en raison d’une immunodépression grave ;
  2. Le salarié (dans l’impossibilité de télétravailler) doit garder son enfant, dans l’hypothèse où l’assistant maternel à domicile est testé positif au Covid, ou qu’un membre de son foyer est positif ;
  3. Lorsque l’établissement scolaire ou la classe est fermée pour raison sanitaire (à notre sens cette hypothèse est désormais théorique compte tenu de l’évolution de protocole sanitaire applicable à l’école).

Le salarié doit alors remettre à son employeur les justificatifs suivants :

  • Document justificatif de l’école, ou de l’assurance maladie (mail/sms), qui atteste que l’enfant est cas contact, (ou que la classe est fermée),
  • Une attestation sur l’honneur du salarié justifiant l’isolement de son enfant pour immunodépression grave, ou, un justificatif de l’assurance maladie attestant que l’assistant maternel ou un membre de son foyer est positif au Covid-19,
  • Une attestation sur l’honneur qu’il est le seul des deux parents demandant à bénéficier du dispositif d’activité partielle pour les jours concernés.

L’employeur effectue sa demande de placement en activité partielle sur le site https://activitepartielle.emploi.gouv.fr/aparts/, aucun justificatif ne lui est demandé à ce stade.

En revanche, en cas de contrôle, l’administration pourra lui demander de lui communiquer les justificatifs de placement en activité partielle.

Il faut donc bien veiller à conserver les documents justificatifs que le salarié aura transmis.

2/ Situation où le salarié bénéficie d’un arrêt de travail dérogatoire au titre de la garde de son enfant

Lorsque l’enfant de moins de 16 ans est positif au Covid, quelque soit son statut vaccinal, il doit obligatoirement s’isoler. Cela qui justifie l’octroi d’un arrêt de travail dérogatoire pour l’un des deux parents (qui ne peut télétravailler).

3/ Situation où le salarié ne bénéficie ni de l’activité partielle ni d’un arrêt de travail dérogatoire 

Il est rappelé que :

  • Les enfants de moins de 12 ans, cas contacts, n’ont pas à s’isoler (sauf immunodépressifs). Leurs parents n’ont donc pas à bénéficier d’un arrêt de travail ou de l’activité partielle.
  • Les enfants de plus de 12 ans, cas contacts, doivent s’isoler s’ils n’ont pas leur schéma vaccinal complet. Mais dans cette hypothèse, les parents ne peuvent pas non plus bénéficier d’un arrêt de travail ou de l’activité partielle pour garder leur enfant mis à l’isolement.
1803, 2022

Inopposabilité de la convention de forfait : le décompte et le paiement des heures supplémentaires doit s’effectuer selon le droit commun

L’inopposabilité de la convention de forfait ouvrait traditionnellement droit pour le salarié au paiement des heures supplémentaires effectuées au-delà de 35h, sans tenir compte de la rémunération qu’il avait déjà perçu dans le cadre de sa convention de forfait.

Depuis peu, la Cour de cassation a affiné son approche et s’est attachée à préciser les conséquences financières pour l’employeur lorsqu’une convention de forfait est déclarée inopposable.

Après avoir énoncé que le juge doit vérifier si la rémunération contractuelle opère le paiement des heures supplémentaires (Cass.soc., 16 juin 2021, n°20-13.169 – Cass.soc., 16 juin 2021, n°20-15.840), la Cour de cassation précise désormais comment décompter et payer les heures supplémentaires en cas d’inopposabilité d’une convention de forfait en heures.

En l’espèce, plusieurs salariés avaient conclu une convention de forfait en heures et leur rémunération contractuelle était fixée pour une durée hebdomadaire de 38h30. La Cour d’appel en a déduit que, nonobstant l’inopposabilité de la convention de forfait, ils ont été effectivement rémunérés sur une base de 38h30 et ne peuvent prétendre, entre la 35ème et 38ème heure et demie, au paiement du salaire de base une deuxième fois, mais seulement aux majorations afférentes aux heures supplémentaires effectuées au-delà delà de la durée convenue.

La Cour de cassation approuve ce raisonnement et pose le principe selon lequel « lorsqu’une convention de forfait en heures est déclarée inopposable, le décompte et le paiement des heures supplémentaires doit s’effectuer selon le droit commun, au regard de la durée légale de 35h hebdomadaires ou de la durée considérée comme équivalente » (Cass.soc., 2 mars 2022, n°20-19.832).

1103, 2022

Faut-il une autorisation administrative pour le licenciement d’un salarié après l’expiration de la période de protection lorsque les faits fautifs persistent au-delà de cette période ?

La Cour de cassation rappelle que le licenciement d’un salarié prononcé au terme de la période de protection (liée par exemple à l’exercice d’un mandat de représentant du personnel ou à une candidature aux élections professionnelles) en raison de faits fautifs commis pendant cette période doit être, en principe, soumis à l’inspecteur du travail.

Néanmoins, elle précise que la persistance du comportement fautif du salarié après l’expiration de la période de protection peut justifier le prononcé de son licenciement sans avoir à demander préalablement une autorisation auprès de l’inspection du travail, sous certaines conditions (Cass. soc., 16 février 2022, n°20-16.171).

La Cour de cassation indique qu’il revient aux juges de rechercher :

  • D’une part, si l’employeur n’a pas eu une exacte connaissance des faits reprochés au salarié postérieurement à l’expiration de la période de protection;
  • D’autre part, si le comportement fautif n’a pas persisté au-delà de l’expiration de la période de protection.

La prudence reste de mise compte tenu des lourdes sanctions attachées à l’absence d’autorisation administrative lorsqu’elle est requise.

903, 2022

Le CSE ne peut pas afficher des informations relevant de la vie personnelle d’un salarié sans respecter certaines conditions

Dans un arrêt en date du 16 février 2022, la Cour de cassation précise les conditions dans lesquelles un Comité social et économique (CSE) peut afficher des éléments relevant de la vie personnelle du salarié (Cass.soc., 16 février 2022, n°20-14.416).

En l’espèce, le secrétaire du CSE a procédé à l’affichage sur le panneau destiné aux communications de l’ancien CHSCT d’un extrait des conclusions déposées dans le cadre d’une action en justice à l’encontre de la société devant le Tribunal correctionnel.

Cet extrait reproduisait un courriel, dont le contenu concernait les modalités de communication sur l’amiante mais aussi un avertissement adressé au Responsable sécurité.

La société a alors assigné le secrétaire du CSE devant le président du tribunal de grande instance aux fins d’ordonner le retrait de l’affichage au motif qu’il portait atteinte à la vie personnelle du Responsable sécurité.

La Cour d’appel a débouté la société de sa demande en retenant que l’intérêt du courriel, qui révélait la position de la direction sur la communication autour de l’amiante, sujet source d’inquiétude pour les salariés, était suffisant pour justifier l’atteinte aux droits fondamentaux du salarié.

Ce raisonnement est cependant cassé par la Cour de cassation : la Cour d’appel aurait dû s’assurer que l’affichage était indispensable à l’exercice des missions du CSE et que l’atteinte portée à la vie personnelle du salarié était proportionnée au but poursuivi, démonstration qui n’était pas faite en l’espèce.

2802, 2022

Forfait jours : Entre autonomie du salarié et pouvoir de direction de l’employeur

L’article L 3121-58 du Code du travail réserve la conclusion d’un forfait jours aux cadres disposant d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps ou bien aux salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée.

La notion d’autonomie du salarié dans l’organisation de son activité est ainsi centrale : si un salarié ne dispose pas d’une autonomie suffisante, sa convention de forfait risque alors d’être privée d’effet. Dans un tel cas, le droit commun de la durée du travail trouve à s’appliquer et le salarié peut réclamer le paiement des heures supplémentaires qu’il aurait accompli.

La Cour de cassation a jugé, à plusieurs reprises, que l’élaboration d’un planning contraignant par l’employeur imposant la présence des salariés à des horaires prédéfinis est inconciliable avec le statut de cadre autonome. En conséquence, le salarié dont l’emploi du temps est déterminé par sa hiérarchie ne peut pas conclure une convention de forfait en jours (Cass.soc., 31 octobre 2007, n°06-43.876Cass.soc., 23 janvier 2013, n°11-12.323Cass.soc., 15 décembre 2016, n°15-17.568).

Récemment, la Cour de cassation vient de préciser que l’autonomie dont bénéficie le salarié dans l’organisation de son activité n’était pas antinomique avec les contraintes liées à l’organisation de l’activité. Dans un arrêt en date du 2 février 2022, elle a jugé que « la convention individuelle de forfait annuel en jours n’instaure pas au profit du salarié un droit à la libre fixation de ses horaires de travail indépendamment de toute contrainte liée à l’organisation du travail par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction » (Cass.soc., 2 février 2022, n°20-15.744).

En l’espèce, il s’agissait d’une vétérinaire salariée en forfait jours. La Cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation, a considéré que la fixation de demi-journée ou de journées de présence imposées par l’employeur, qui correspondaient aux rendez-vous donnés par le cabinet vétérinaire aux propriétaires des animaux, était compatible avec la qualité de cadre autonome. La Cour d’appel a également relevé que la salariée conservait la possibilité d’organiser, en dehors de ces contraintes, sa journée de travail et ses interventions à sa guise. En conséquence, l’employeur était donc bien-fondé à lui reprocher ses absences durant ces plages horaires pour motiver son licenciement pour faute grave.

L’autonomie des salariés n’est donc pas synonyme de liberté totale. Les contraintes liées à l’organisation de l’activité peuvent, dans une certaine mesure, permettre d’encadrer l’activité des salariés ayant conclu une convention de forfait en jours.

Pour aller plus loin : L’inopposabilité de la convention de forfait : le juge doit vérifier si la rémunération contractuelle opère paiement des heures supplémentaires

2402, 2022

Rupture conventionnelle : attention à la clause de non-concurrence !

En l’espèce, le contrat de travail d’une salariée prévoyait une clause de non-concurrence que l’employeur avait la faculté de lever « à tout moment durant le préavis ou dans un délai maximum d’un mois à compter de la fin du préavis (ou en l’absence de préavis, de la notification du licenciement) ».

Les parties ont conclu une rupture conventionnelle et la rupture du contrat de travail était fixée au 5 mai 2015. Ce n’est que le 11 septembre 2015 que l’employeur a levé la clause de non-concurrence.

La Cour d’appel de Lyon a limité le droit de la salariée à la contrepartie financière à la période du 5 mai au 11 septembre 2015. Toutefois, la Cour de cassation a considéré que la renonciation à la clause de non-concurrence était tardive de sorte que la contrepartie était due dans sa globalité.

Dans cet arrêt de principe, les juges énoncent ainsi qu’en matière de rupture conventionnelle, l’employeur doit renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires (Cass. soc., 26 janvier 2022, n° 20-15.755).

Cette solution est en cohérence avec la jurisprudence de la Cour de cassation. Elle avait ainsi jugé que la renonciation à l’exécution de la clause de non-concurrence devait se faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires (Cass. soc., 21 janvier 2015, n° 13-24.471).

En outre, en application de cette jurisprudence, l’employeur ne pourra plus se prévaloir des conventions ou accords collectifs de branche ou d’entreprise ou des contrats de travail qui stipulent, en cas de rupture conventionnelle, des délais de renonciation à la clause de non-concurrence postérieurs à la date de départ effectif.

Il apparaît donc indispensable, dans le cas d’une rupture conventionnelle du contrat d’un salarié soumis à une clause de non-concurrence, de prévoir dans la convention de rupture conventionnelle la levée de la clause de non-concurrence au plus tard lors du départ effectif du salarié.

2402, 2022

Référendum d’un accord minoritaire : tous les salariés sont concernés

En principe, la validité d’un accord d’entreprise implique de recueillir la signature d’un ou plusieurs syndicats représentatifs ayant recueilli plus de 50% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires du CSE. À défaut d’accord majoritaire, il est possible de faire valider, via un référendum, un accord signé par des os représentants plus de 30 des suffrages exprimés au 1er tour.

Un arrêt de la Cour de cassation du 5 janvier 2022 apporte des précisions sur la composition du corps électoral dans le cadre du recours au référendum et sur la recevabilité d’un litige lié aux modalités d’organisation d’un référendum.

Au cas d’espèce, suite à la signature de deux accords non majoritaires, l’employeur avait fixé unilatéralement les modalités du référendum et avait écarté les salariés en CDD du vote.

Un syndicat non-signataire a saisi le tribunal judiciaire d’une demande d’annulation du référendum au motif de l’exclusion des salariés en CDD.

Débouté par le Tribunal judiciaire, le syndicat a porté l’affaire devant la Cour de cassation qui lui a donné gain de cause.

La Cour de cassation rappelle  que tous les électeurs auraient dû être consultés.

Et elle définit la notion d’électeur au visa de  l’article L. 2232-12 du Code du travail qui rappelle que « participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l’accord et électeurs au sens de l’article L. 2314-18 issu de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 » à savoir  ceux âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à leurs droits civiques, indépendamment de la durée de leur contrat de travail.

Les salariés en CDD auraient donc du pouvoir prendre part au vote même s’ils n’étaient pas concernés directement par certaines dispositions des accords.

La Cour souligne également dans cet arrêt que la recevabilité de l’action du syndicat ne s’analyse qu’au regard du respect des délais de contestation (15 jours respectés en l’espèce) nonobstant le fait qu’un des accords ait commencé à produire ses effets, contrairement à ce qu’avait jugé le tribunal judiciaire.

2402, 2022

Publication de l’Index égalité: de nouvelles obligations et des précisions sur le calcul de l’indicateur retour de congé maternité

  • De nouvelles obligations issues de la loi du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle

Désormais l’entreprise doit publier l’ensemble des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les hommes et les femmes et non plus seulement la note obtenue. Elle doit également rendre public ces indicateurs sur le site internet du ministère du travail (selon des modalités définies par décret à paraître).

Les « mauvais élèves » qui auraient obtenu une note globale inférieure à 75 sur 100, devront publier (selon des modalités définies par décret à paraître) :

  • Les mesures correctives adoptées par une communication externe, et au sein de l’entreprise, et
  • Les objectifs de progression de chacun des indicateurs mentionnés dans l’accord collectif ou le plan d’action.

Ces nouvelles dispositions sont applicables à compter de la publication des indicateurs effectuée en 2022 c’est-à-dire à partir du 1er mars prochain.

  • Indicateur « retour de congé maternité »

Pour mémoire, cet indicateur est mesurable si au moins une femme est revenue de congé maternité durant la période de référence (de 12 mois consécutifs, qui précède l’année de publication) et que des augmentations ont été accordées dans l’entreprise pendant le congé maternité.

Face aux nombreuses interrogations qui se sont posées quant à la notion de « retour de congé maternité », le ministère du Travail précise que :

  • Le congé d’adoption est pris en compte au même titre que le congé de maternité.
  • Si le congé maternité est suivi du congé parental : l’indicateur est calculé en prenant en compte la date de retour physique de la salariée dans l’entreprise. En revanche, seules les augmentations de rémunération intervenues pendant le congé de maternité sont prises en compte dans le calcul de l’indicateur (non celles intervenues pendant le congé parental).
  • Si le congé maternité est suivi de congés payés : l’indicateur est calculé à la date de fin du congé maternité.
  • Même si ces salariées ont été absentes plus de la moitié de la période de référence, elles doivent être prises en compte pour le calcul de l’indicateur (ce qui n’est pas le cas pour le calcul des autres indicateurs : seuls les salariés présents pendant au moins 6 mois sont pris en compte).
  • Dans l’hypothèse où les salariées ont été augmentées pendant leur congé maternité, et non à l’issue de celui-ci, mais que ces augmentations se situent pendant la période de référence, elles sont prises en compte pour le calcul de l’indicateur.
1102, 2022

Le constat d’huissier de justice a une force probante supérieure à celle des attestations de salariés.

Le Conseil d’Etat a été saisi par une société afin de voir annuler la décision de l’inspection du travail ayant refusé l’autorisation de licencier pour faute un salarié protégé.

Pour rappel, lorsqu’un employeur sollicite auprès de l’inspection du travail l’autorisation de licencier un salarié protégé pour faute, il appartient à l’inspecteur du travail de rechercher si les faits reprochés au salarié sont d’une gravité suffisante pour justifier son licenciement.

En l’espèce, l’employeur a produit un procès-verbal de constat d’huissier de justice, duquel il ressort que le salarié protégé a participé aux incidents justifiant son licenciement pour faute.

Ce constat d’huissier a été confronté à des attestations de salariés communiquées par le salarié protégé faisant état de l’existence d’un doute quant à sa participation aux incidents litigieux.

La cour administrative d’appel de Paris a rendu un arrêt dans lequel elle considère que le doute rapporté par ces attestations doit profiter au salarié.

Dans cette décision rendue le 08 décembre 2021, le Conseil d’Etat annule cet arrêt rappelant que les constatations d’huissier font foi jusqu’à preuve contraire et considérant que des attestations de salariés laissant subsister un doute n’apportent pas cette preuve contraire (CE, 08 décembre 2021, n° 439631).

Cette jurisprudence renforce l’intérêt des constats d’huissier au regard de leur force probante quant aux agissements fautifs d’un salarié.

1102, 2022

Les salariés ont le droit d’accéder à leurs courriels professionnels : la CNIL indique comment l’employeur peut répondre à un salarié qui en fait la demande dans le respect de la protection des données personnelles

Tout salarié peut demander à son employeur qui détient des mails professionnels le concernant, d’y avoir accès et de les lui communiquer.

Face à un salarié qui souhaite accéder ou obtenir la copie de mails professionnels, la CNIL a récemment précisé que l’employeur doit faire un tri entre les mails communicables et ceux qui ne le sont pas car susceptibles de porter atteinte à un tiers (le respect du secret des correspondance d’un collègue par exemple).

Pour cela, la CNIL indique que l’employeur doit distinguer deux situations :

  • Celle où le salarié est l’expéditeur ou le destinataire des mails, ou,
  • Celle où le salarié est seulement mentionné dans le contenu des mails.

Dans la 1re hypothèse, la CNIL part du principe que l’employeur doit communiquer au salarié le mail en l’état puisqu’il en a déjà eu connaissance.

Néanmoins, dans des cas spécifiques (informations qui porteraient atteinte à la sécurité nationale ou à un secret industriel ou une atteinte particulière au respect de la vie privée par exemple), l’employeur ne peut faire droit à la demande du salarié qu’après avoir supprimé, anonymisé ou pseudonymisé les informations contenues dans les mails qui concernent les tiers.

Ce n’est que si ces suppressions/anonymisations s’avèrent insuffisantes, que l’employeur peut refuser de communiquer au salarié les mails en question. Il doit alors justifier et motiver son refus.

Dans la 2nd hypothèse, l’employeur doit procéder en deux temps :

  • Vérifier que l’identification des mails dans lesquels le salarié est mentionné n’entraine pas une atteinte disproportionnée aux droits de l’ensemble des salariés de l’entreprise (exemple : scan de l’ensemble des messageries des salariés).

Si tel est le cas, l’employeur doit demander au salarié de désigner les mails sur lesquels porte sa demande, et pourra lui opposer un refus si le salarié refuse d’apporter des indications supplémentaires sur l’identification des mails.

  • A l’inverse, si l’employeur arrive à identifier les mails demandés, il doit alors étudier, au cas par cas, leur contenu pour savoir s’il peut les communiquer.

Si les informations portent une atteinte disproportionnée aux droits des tiers (respect de la vie privée et secret des correspondances notamment) l’employeur peut s’opposer à leur communication.

Dans le cas contraire, l’employeur doit anonymiser les données et transmettre les mails au salarié qui en a fait la demande.

Vous pouvez retrouver l’intégralité des recommandations de la CNIL directement sur son site internet ainsi qu’une infographie qui permet de vous poser les bonnes questions lorsque à un salarié sollicite l’accès à ses mails professionnels.

1102, 2022

La seule constatation d’une atteinte au droit à l’image du salarié lui ouvre droit à réparation

Les salariés jouissent de leur droit à l’image au sein de l’entreprise. Dès lors l’employeur ne peut pas capter et diffuser des images des salariés sans leur consentement, sauf à s’exposer au paiement de dommages et intérêts.

Ces principes sont rappelés par l’arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 19 janvier 2022 (Cass.soc., 19 janvier 2022, n°20-12.420).

En l’espèce, plusieurs salariés ont intenté une action en justice aux fins d’obtenir des dommages et intérêts car leur employeur avait publié une photographie, sans leur consentement exprès, sur le site internet.

La Cour d’appel les déboute compte tenu du fait que la photographie litigieuse avait été supprimée par l’employeur et que les salariés ne démontraient pas l’existence d’un préjudice personnel, direct et certain résultant du délai de suppression.

Aux termes de l’article 9 du Code civil, la Cour de cassation rappelle que le droit dont la personne dispose sur son image porte sur sa captation, sa conservation, sa reproduction et son utilisation et que la seule constatation d’une atteinte à ce droit ouvre droit à réparation.

Ainsi, le simple fait d’avoir diffusé une image sans recueillir préalablement le consentement des salariés leur ouvre droit à une réparation. Ce principe s’applique tant pour les publications internes (trombinoscope, intranet, affiches etc) que les publications commerciales (brochures commerciales, réseaux sociaux, site internet etc). Il est donc nécessaire de recueillir systématiquement le consentement du salarié ou bien d’insérer directement une clause de cession du droit à l’image dans les contrats de travail.

2701, 2022

Les agissements de harcèlement moral reprochés à un salarié protégé, dont le licenciement est nul, rendent sa réintégration impossible.

Le salarié protégé, dont le licenciement est nul en raison de l’annulation de la décision d’autorisation du licenciement rendue par l’inspecteur du travail, a le droit, s’il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d’être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent (C. trav., art. L. 2422-1).

L’obligation de réintégration pesant sur l’employeur ne trouve sa limite que dans l’impossibilité matérielle ou absolue de réintégration, strictement appréciée par les juges.

Récemment, la caractérisation de l’impossibilité de réintégration a été assouplie. Les juges ont reconnu qu’une telle impossibilité est démontrée dès lors que la réintégration du salarié protégé aurait obligé l’employeur à ne pas respecter l’obligation de sécurité qui lui incombe (Cass. soc.,1er décembre 2021, n°19-257.15).

Or, l’obligation de prévention du harcèlement moral participe de cette obligation de sécurité de l’employeur.

Or, en l’espèce, une salariée protégée a été licenciée pour faute grave après autorisation de l’inspecteur du travail. Cette autorisation a été annulée sur recours hiérarchique par le ministre du travail pour défaut de motivation, annulation validée ensuite par le Conseil d’Etat.

Parallèlement, la salariée, qui ne bénéficiait plus d’une protection spéciale, a été licenciée pour faute grave, ce qu’elle a contesté devant les juges judiciaires.

Ces derniers ont ainsi constaté que la salariée protégée était la supérieure hiérarchique des autres salariés de l’entreprise, lesquels soutenaient avoir été victimes du harcèlement moral de cette dernière et avaient exercé leur droit de retrait.

L’impossibilité de réintégration est donc caractérisée au titre de l’obligation de sécurité.

La Cour de cassation vise de manière générale l’obligation de sécurité. Cela laisse présager qu’il serait possible de justifier une impossibilité de réintégration du salarié protégé par toute situation mettant en cause l’obligation de sécurité de l’employeur, même autre que des faits de harcèlement moral.

2501, 2022

L’employeur ne peut pas mettre fin au télétravail instauré de manière informelle depuis plusieurs années

Par un arrêt de la Cour d’appel d’Orléans du 7 décembre 2021 (CA Orléans, ch. Soc., 7 décembre 2021, n° 17/01258), les juges sont venus rappeler que l’employeur ne peut pas imposer au salarié, en télétravail à 100% depuis plusieurs années, un retour dans les locaux de l’entreprise.

En l’espèce, pour justifier sa décision de faire revenir le salarié 2 jours par semaine en présentiel, l’employeur s’est fondé sur le fait que la mise en place du télétravail n’avait jamais été contractualisée.

Or, selon la Cour d’appel d’Orléans, l’employeur avait accepté, de fait, cette organisation du travail depuis plusieurs années, même en l’absence d’accord formel entre les parties sur la mise en place du télétravail, et ne pouvait revenir dessus unilatéralement.

Le retour en présentiel constituait en effet, selon la Cour, un bouleversement de l’organisation professionnelle du salarié et des conditions de sa vie personnelle, traduisant ainsi une modification du contrat de travail.

Pour éviter ce type de difficulté, l’entreprise a donc tout intérêt à se doter d’un accord collectif ou d’une charte sur le télétravail, comme le prévoit l’article L.1222-9 du Code du travail.

En effet, dans le cadre d’un accord ou d’une charte, opposable aux salariés, l’entreprise définit, via la clause de réversibilité, les conditions dans lesquelles il pourra être mis fin au télétravail, notamment à la demande de l’employeur.

2501, 2022

L’employeur doit solliciter un nouvel avis du médecin du travail si le salarié conteste la compatibilité de son nouveau poste avec les recommandations médicales

A l’issue d’une absence pour maladie professionnelle, d’un congé maternité ou d’une absence d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail, de maladie ou d’accident non professionnel, le salarié bénéficie d’une visite médicale de reprise pour déterminer s’il est apte, ou non, à reprendre son poste.

A cette occasion, le médecin du travail vérifie la compatibilité entre son poste de travail et son état de santé. Si le médecin du travail rend un avis d’aptitude avec réserves, il préconise alors des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation (article L4624-3 du Code du travail).

L’employeur est tenu de mettre en œuvre ces recommandations en proposant au salarié un poste compatible aux préconisations médicales. Qu’en est-il lorsque le salarié conteste la compatibilité du poste auquel il est affecté avec les recommandations médicales ?

Une salariée refuse le poste proposé au motif qu’il ne serait pas compatible avec les recommandations du médecin du travail. Elle est licenciée pour faute grave en raison d’absences non justifiées. La Cour d’appel déboute la salariée en estimant qu’elle aurait pu solliciter un nouveau rendez-vous avec le médecin ou former un recours contre l’avis d’aptitude avec réserves.

La Cour de cassation casse et annule ce raisonnement et indique qu’il appartient à l’employeur de solliciter à nouveau l’avis du médecin si le salarié conteste la compatibilité de son nouveau poste (Cass.soc., 4 novembre 2021, n°20-17.316).

C’est donc à l’employeur de prendre l’initiative d’interroger le médecin du travail sur la compatibilité du poste proposé en cas de contestation. De façon plus générale et même en dehors de toute contestation du salarié, il reste opportun de questionner systématiquement le médecin du travail sur le reclassement envisagé pour un salarié faisant l’objet d’un avis d’aptitude avec réserves ou d’inaptitude.

2212, 2021

Délai de carence en cas de succession de contrats à durée déterminée : Rappel

  • L’article L. 1244-3 du Code du travail dispose que l’employeur doit respecter un délai de carence lorsqu’il conclut plusieurs contrats à durée déterminée successifs sur un même poste, sauf exception.
  • Les exceptions sont régies par l’article L. 1244-4-1 du Code du travail selon lequel il est possible de conclure des contrats à durée déterminée successifs sans délai de carence lorsque le contrat est conclu pour :
    • Le remplacement d’un salarié absent ou dont le contrat est suspendu ;
    • Un emploi saisonnier ;
    • L’exécution de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurités
    • Pour un emploi pour lequel il est d’usage de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée ;
    • Les personnes mentionnées aux a 4° et 5° de l’article L. 1242-2 du Code du travail (chef d’entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, chef d’une exploitation agricole, etc.) ;
    • Une politique de l’emploi ou pour assurer un complément de formation professionnelle ;
    • Pallier à la rupture anticipée du contrat par le salarié ou lorsque celui-ci a refusé le renouvèlement de son contrat proposé par l’employeur.

Pour que le délai de carence soit exclu, chacun des contrats doit avoir été conclu pour l’un des motifs précités (Cass. Soc., 30 septembre 2014, n° 13-18.162).

  • Un arrêt récent vient répondre à la question de savoir si un délai de carence doit être respecté entre différents contrats à durée déterminée conclus avec un même salarié pour remplacer successivement plusieurs salariés absents. (Cass. Soc., 17 novembre 2021, n° 20-18.336).

Au cas d’espèce, un salarié avait été engagé comme assistant de vente au travers de 4 contrats à durée déterminée successifs du 5 juillet 2011 au 31 janvier 2012. Ces contrats ont été conclus pour un motif de remplacement de salarié absent, mais d’un salarié différent à chaque contrat.

Le salarié avait estimé que ses contrats devaient être requalifiés en contrat à durée indéterminée et avait saisi le conseil de prud’hommes qui, par jugement du 22 novembre 2017, avait rejeté toutes ses demandes.

En appel,  la Cour a prononcé la requalification des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée, considérant qu’un délai de carence aurait dû s’appliquer entre ces contrats de remplacement de salariés distincts, et non pas pour le remplacement d’une nouvelle absence du salarié remplacé.

Saisie du pourvoi de l’employeur, la Cour de cassation a censuré cette décision au visa de l’article L. 1244-4-1 du Code du travail, considérant qu’il n’y a pas lieu d’appliquer un délai de carence lorsque plusieurs CDD successifs sont conclus avec le même salarié pour remplacer successivement plusieurs salariés.

2212, 2021

Le non-respect des obligations liées à un système de surveillance des salariés n’entraine pas automatiquement l’irrecevabilité de la preuve devant les juges du fond

La mise en place d’un système de « vidéoprotection » dont l’objectif est uniquement d’assurer la sécurité des locaux et ne permet pas de surveiller l’activité des salariés n’a pas à faire l’objet d’une information individuelle des salariés (L.1222-4 du Code du travail) ni d’une consultation du CSE (L. 2312-38 du Code du travail).

À l’inverse, dès lors qu’un système de « vidéosurveillance » est mis en place, il doit faire l’objet d’une information individuelle des salariés et d’une consultation du CSE préalablement à sa mise en place.

Lorsqu’un système est hybride, les juges s’attachent à son utilisation effective pour décider du  régime applicable : S’il permet de contrôler l’activité des salariés, il doit faire l’objet des modalités d’information et de consultations susvisées.

Ces principes sont rappelés par l’arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 10 novembre 2021 (n° 20-12.263).

Dans cet arrêt, une salariée, employée dans une pharmacie, avait été licenciée pour faute grave en raison d’irrégularités dans les opérations de caisse.

Pour prouver ces agissements, l’employeur avait produit des enregistrements vidéo d’un système de « vidéoprotection » qui permettait également de contrôler l’activité des salariés, selon la salariée.

La Cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion, saisie de cette affaire, n’avait retenu que le but premier du système de surveillance et avait donc jugé ce moyen de preuve comme licite déboutant la salariée de ses demandes.

La Cour de cassation a censuré cette décision en retenant l’utilisation effective du système de surveillance et son caractère hybride (surveillance des locaux et surveillance des salariés). Dès lors, ce système aurait dû faire l’objet d’une information des salariés et d’une consultation préalable du CSE.

Mais l’intérêt de cette décision réside dans le fait que  la Cour de cassation  ne se prononce pas sur  la recevabilité de cette preuve qu’elle considère pourtant comme illicite. Elle fait ici application d’une évolution récente de sa jurisprudence en matière de droit de la preuve (Cass. Soc., 25 novembre 2020, n° 17-19.523).

En effet, pour la Cour de cassation l’illicéité d’un moyen de preuve n’entraine pas nécessairement son rejet des débats.

Les juges doivent apprécier si l’utilisation de cette preuve porte atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble en mettant en balance le droit au respect de la vie privée du salarié et le droit à la preuve.

La Chambre sociale laisse donc le soin à la Cour d’appel de renvoi de procéder à ce contrôle de proportionnalité.

À n’en pas douter, ce courant jurisprudentiel fera l’objet à l’avenir d’autres applications que nous analyserons au fur et à mesure de leur parution. La Cour de cassation semble faire preuve ici de la même volonté d’ouverture que lorsqu’elle a abandonné sa position sur le préjudice automatique du salarié en 2016.

1712, 2021

Travailleurs étrangers : rupture du contrat de travail en cas de non-renouvellement du titre de séjour

En application des dispositions d’ordre public de l’article L. 8251-1 du Code du travail, un employeur ne peut conserver à son service, pour quelque durée que ce soit, un salarié étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

A défaut, l’employeur se trouve en infraction et encourt une sanction pénale (C. trav. art. L. 8256-2).

Récemment, la Cour de cassation est venue rappeler, qu’en application de l’article L. 8251-1 du code du travail, « l’irrégularité de la situation du salarié constituait une cause justifiant la rupture » du contrat de travail (Cass. soc., 17 nov. 2021, n°20-11.911).

Dans cette affaire, le salarié n’avait pas été en mesure de fournir à son employeur les preuves de ses démarches pour renouveler sa carte de résident, contraignant ce dernier à rompre son contrat de travail.

Pour mémoire, cette situation d’irrégularité du salarié constitue « nécessairement une cause objective justifiant la rupture du contrat de travail exclusive de l’application des dispositions relatives aux licenciements » (Cass. soc. 4 juillet 2012, n°11-18.840).

Partant de là, même si les règles relatives au licenciement pour motif personnel n’ont pas lieu de s’appliquer, nous vous recommandons d’informer le salarié, par écrit, de la rupture de son contrat de travail fondée sur l’irrégularité de sa situation.

1412, 2021

Indemnité inflation : conditions et modalités de son versement pour les salariés

Afin de préserver le pouvoir d’achat des ménages du fait de la hausse du coût de la vie sur le dernier trimestre 2021, la loi de finances rectificative pour 2021 a créer une aide exceptionnelle de 100 €, versée à toute personne âgée d’au moins 16 ans résidant régulièrement en France.

Cette aide exceptionnelle, aussi appelée « indemnité inflation » attendait la parution d’un décret pour pouvoir être mise en œuvre.

C’est chose faite depuis le 12 décembre, suite à la publication du Décret nº 2021-1623 !

Désormais applicable, le cabinet Norma Avocats revient sur les conditions et les modalités de versement de l’indemnité inflation par les employeurs.

  1. Quelles sont les conditions d’éligibilité pour les salariés ?
  • Être âgé d’au moins 16 ans et résider en France au 31 octobre 2021

Tous les salariés âgés d’au moins 16 ans et résidant en France au 31 octobre 2021 sont éligibles au bénéfice de l’indemnité inflation.

Le Bulletin Officiel de la Sécurité Sociales (BOSS) indique que sont éligibles les salariés pour lesquels les employeurs appliquent le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu ou qui sont redevables de la CSG sur leurs revenus d’activité.

  • Avoir été en poste au mois d’octobre 2021

Selon le décret, l’indemnité inflation est versée aux salariés « employés au cours du mois d’octobre 2021 » et ce, quelle que soit la durée d’emploi en octobre et même si, au jour du versement, ils ont quitté l’entreprise.

Par ailleurs, sont également éligibles, les travailleurs suivants :

  • Les salariés dont le contrat de travail était suspendu au mois d’octobre 2021, et ce quel que soit le motif d’absence (à l’exception des salariés en congé parental ou en congé parental d’éducation à temps complet pendant la totalité de ce mois),
  • Les mandataires sociaux titulaires d’un contrat de travail ou non (à condition dans ce cas d’avoir une rémunération d’activité),
  • Les stagiaires (à condition de percevoir une rémunération supérieure à la gratification minimale légale de 600,60 euros en 2021).
  • Avoir un revenu inférieur à 26.000 € bruts

Seuls les salariés dont la rémunération ne dépasse pas le plafond des 26.000 € bruts, entre le 1er janvier et le 31 octobre 2021, peuvent bénéficier de l’indemnité inflation et ce, quelle que soit leur quotité de travail (à temps partiel ou à temps plein).

S’agissant des salariés qui n’ont pas été employés pendant la totalité de la période de janvier à octobre 2021, il convient de proratiser la rémunération prise en compte pour l’appréciation du plafond sans pouvoir être inférieur à 2.600 € bruts.

Par exemple : Pour un salarié sous contrat de 6 mois entre le 1er mai et le 31 octobre 2021, le seuil de rémunération est de 184/304×26000=15.736,84. Le salarié bénéficiera de lindemnité si sa rémunération est inférieure à ce montant.

Par ailleurs, selon le décret, la rémunération à prendre en compte est celle définie à l’article L.242-1 du CSS, soit la rémunération brute soumise à cotisations sociale et les heures supplémentaires sont prises en compte.

Si le salarié remplit les conditions précédemment listées, l’employeur est dans l’obligation de lui verser l’indemnité inflation forfaitaire de 100 € (pas de proratisation en fonction du temps de présence ou de la durée de travail du salarié).

  1. Quelles sont les modalités de versement de l’indemnité inflation par l’employeur ?
  • Versement automatique par l’employeur ou sur demande du salarié

L’employeur doit verser l’indemnité inflation de manière spontanée aux salariés en CDI et en CDD d’au moins 1 mois.

Par ailleurs, lorsque le salarié est éligible à l’indemnité inflation auprès de plusieurs employeurs, l’indemnité doit lui être versée par l’entreprise où il est en poste à la date du versement ou, par celle chez qui il justifie de la plus grande ancienneté.

Si le salarié n’est plus en poste chez aucun des employeurs, c’est l’entreprise où la durée de travail était la plus importante au mois d’octobre 2021 qui doit la lui verser.

Enfin, pour les salariés intérimaires, le BOSS indique que l’indemnité est versée par les entreprises de travail temporaire.

  • Date de versement de l’indemnité inflation

Au terme du décret, l’indemnité doit être versée dès le mois de décembre 2021 et au plus tard le 28 février 2022 (en cas de problème technique).

Elle n’est assujettie ni à cotisations et contributions sociales ni à l’impôt sur le revenu.

  1. Comment l’employeur se fait-il rembourser ?

Selon le BOSS, pour pouvoir se faire rembourser, l’employeur doit déclarer l’indemnité inflation dans la DSN du mois suivant son versement au salarié et il se verra rembourser du montant de l’indemnité lors du paiement des cotisations sociales sur les rémunérations du même mois.

Il procédera à une déduction des sommes versées aux salariés des cotisations dues dès l’échéance de paiement suivante.

Vous pouvez retrouver sur le site du BOSS le questions-réponses relatif à l’indemnité d’inflation.

1312, 2021

L’URSSAF apporte des précisions sur le plafond d’exonération du forfait mobilités durables en cas de cumul avec la prise en charge des frais de transports publics par l’employeur

Pour rappel, le forfait mobilités durables a été introduit le 1er janvier 2020 par la loi d’orientation des mobilités et est entré en vigueur de manière anticipée dans le contexte du déconfinement dès le 11 mai 2020, grâce au décret n° 2020-541 du 9 mai 2020.

Au titre du forfait mobilités durables, l’employeur peut prendre en charge, dans les conditions prévues pour les frais de carburant, les frais de transport entre le domicile et le lieu de travail effectués par les salariés privilégiant les modes de transport dits à « mobilité douce ».

Sont considérés comme tels :

  • La location ou la mise à disposition en libre-service de cyclomoteurs, motocyclettes, vélos, vélos (assistés) à assistance électrique ou d’engins de déplacement personnel (motorisés ou non comme les trottinettes), avec ou sans station d’attache et accessibles sur la voie publique, à condition qu’ils soient équipés d’un moteur non thermique ou d’une assistance non thermique lorsqu’ils sont motorisés ;
  • Mais également les services d’autopartage, à condition que les véhicules mis à disposition soient des véhicules à faibles émissions (C. trav., art. R. 3261-13-1 ; D. no2020-541, 9 mai 2020, art. 1er, JO 10 mai).

Le montant, les modalités et les critères d’attribution de la prise en charge des frais engagés au titre du forfait mobilités durables sont déterminés par accord d’entreprise ou par accord interentreprises, et à défaut par accord de branche. À défaut d’accord, la prise en charge de ces frais est mise en œuvre par DUE de l’employeur, après consultation du CSE, s’il existe (C. trav., art. L. 3261-4 ; L. no 2019-1428, 24 déc. 2019, art. 82, JO 26 déc.).

Le forfait mobilités durables peut être cumulé avec la prise en charge obligatoire par l’employeur du coût des titres d’abonnement de transports publics de personnes ou de services publics de location de vélos (L. 3261=3 du Code du travail). Lorsqu’un tel cumul existe, la loi Climat du 22 août 2021, a permis d’augmenter le plafond d’exonérations de cotisations et contributions sociales du forfait mobilités durables, jusqu’à 600 €. Cette mesure est entrée en vigueur depuis le 25 août 2021.

L’exemple ci-dessous permet d’illustrer le principe de cette exonération :

Un salarié dépense 700 euros par an au titre de son abonnement aux services de transport en commun pour réaliser ses trajets domicile-lieu de travail. L’employeur a l’obligation de prendre en charge 50 % de cet abonnement annuel, soit 350 euros.

Celui-ci souhaite également verser à son salarié, qui utilise le vélo pour se rendre à la gare, un forfait mobilités durables de 280 euros par an.

Dans la mesure où il prend déjà en charge 350 euros au titre de l’abonnement, la part du forfait mobilités durables qui peut être exonérée est toutefois limitée à 250 euros (600 – 350). S’il y a un surplus et qu’il est pris en charge par l’employeur, alors il sera soumis à cotisations sociales.

912, 2021

L’importance des concessions réciproques en cas de transaction

Un arrêt récent de la Cour de cassation du 4 novembre 2021 (20-16.059) vient rappeler l’importance des concessions réciproques dans le cadre de la conclusion d’une transaction.

Pour rappel, selon l’article 2044, al. 1 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, mettent fin à une contestation née ou préviennent une contestation à naître.

Outre l’impossibilité de conclure une transaction antérieurement à la rupture du contrat de travail, et cela, quel que soit le mode de rupture, la transaction n’est licite que si elle comporte des concessions réciproques de la part des parties à l’accord.

  • Les concessions réciproques doivent être réelles et s’apprécient en fonction des prétentions des parties à la date de signature de l’acte (Cass. Soc., 13 mai 2015, n° 13-26.368). En cas de litige, les juges apprécieront les concessions réciproques à la lumière des faits évoqués dans la lettre de licenciement.
  • Les concessions réciproques doivent être d’une certaine ampleur. S’il importe peu qu’elles soient d’importance inégale ou disproportionnée l’une par rapport à l’autre, elles ne doivent pas être dérisoires (Cass. Soc., 28 novembre 2000, n° 98-43. 635 ; CA Versailles 28 juin 2001, n° 98/20181).

C’est ce dernier point qui est repris par l’arrêt précité.

Au cas d’espèce, un salarié avait été engagé durant 3 années chez un même employeur dans le cadre de 9 contrats à durées déterminées successifs.

Pour éviter un contentieux sur la requalification du contrat, les parties ont signé une transaction dont le salarié a contesté la validité sur le fondement de l’insuffisance de la concession ; en l’occurrence une indemnité transactionnel d’un montant de 500 €.

La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel prononçant l’annulation de la transaction au motif que cette contrepartie financière versée au salarié par l’employeur en échange de la renonciation à toute action judiciaire  était dérisoire.

Ainsi, bien qu’aucune proportion ne soit exigée entre le préjudice et l’indemnisation transactionnelle, il convient de rappeler que la concession de l’employeur, contrepartie à l’abandon de poursuite judiciaire, doit être raisonnable.

612, 2021

Actualités Covid

Nous vous rappelons en 12 points les dernières actualités liées à la Covid-19 des dernières semaines :

  • Le passe sanitaire ne peut être exigé pour exercer le mandat de représentant du personnel puisque la plupart des activités des représentants du personnel ont vocation à se dérouler dans des espaces non accessibles au public (questions-réponses de l’inspection du travail Min.).
  • Depuis le 15 octobre 2021, l’assurance maladie ne rembourse plus les tests PCR et antigéniques de dépistage de la Covid 19 pour les majeurs non vaccinés qui ne bénéficient pas d’une prescription médicale.
  • Les employeurs ne sont pas tenus de prendre en charge le coût des tests de dépistage, qui ne sont pas des frais professionnels (questions-réponses du Min. du Travail).
  • L’inspection du travail peut intervenir lorsque le passe sanitaire est illégalement exigé puisque cela peut avoir une incidence sur les relations contractuelles avec les salariés (questions-réponses du Min. du Travail).
  • L’employeur ne peut que demander la présentation du passe sanitaire sous format papier ou numérique. Il ne peut pas demander des informations sur le statut vaccinal ou le schéma vaccinal réalisé, s’enquérir de l’intention de se faire vacciner ou non (questions-réponses de la CNIL).
  • Les salariés concernés par le passe sanitaire doivent présenter systématiquement ce passe pour se rendre sur leur lieu de travail, durant les heures d’ouvertures au public. Cependant, ils peuvent décider de leur propre initiative de présenter un justificatif de leur statut vaccinal pour faciliter les démarches. Ce justificatif simplifié ne doit pas être conservé par l’employeur qui doit plutôt tenir un registre de vérification (questions-réponses de la CNIL).
  • Le passe sanitaire ne peut être demandé au moment du recrutement. Il n’est exigé qu’à partir de l’entrée en fonction (questions-réponses de la CNIL).
  • Il n’est pas possible de conditionner l’accès au restaurant d’entreprise à la détention d’un passe sanitaire puisque ce lieu n’est pas concerné par l’obligation (questions-réponses de la CNIL).
  • Pour conserver la validité de leur passe sanitaire, les salariés dont la seconde dose de vaccin a été réalisée il y a plus de 7 mois doivent se voir inoculer une troisième dose avant le 15 janvier 2022.
  • La durée de validité des tests ou examens de dépistage à la Covid-10 a été raccourcie de 72h à 24h.
  • Le protocole sanitaire en entreprise a été actualisé le 29 novembre 2021. Il prévoit dorénavant de :
    • Systématiser le port du masque dans les lieux clos et partagés ;
    • Respecter une distanciation physique d’au moins 1m ;
    • Respecter une distanciation physique lorsque le masque ne peut pas être porté, par exemple dans les lieux de restauration collective.
  • La Ministre du travail a déconseillé la tenue d’évènements collectifs jusqu’à nouvel ordre et a indiqué que les contrôles de l’inspection du travail sur le respect du protocole sanitaire allaient se durcir.
2511, 2021

Négocier une rupture conventionnelle : attention au contexte dans lequel la convention est signée !

Pour mémoire, l’existence d’un différend entre l’employeur et le salarié au moment de la signature de la rupture conventionnelle n’affecte pas, en elle-même, la validité de la convention.

Dans ce cas de figure, c’est au salarié de prouver que ce contexte conflictuel l’a empêché de donner librement son consentement lors de sa signature de la convention.

Ainsi, si le consentement peut être vicié dans un contexte de harcèlement moral (Cass. soc., 28 janvier. 2016, n°14-10.308), la Cour de cassation précise que ce contexte de harcèlement moral ne rend pas le vice du consentement automatique (Cass. soc., 23 janvier 2019, n°17-21.550).

Dans une décision du 4 novembre 2021, la Cour de cassation fait une nouvelle application de sa jurisprudence en annulant une convention de rupture signée dans un contexte de harcèlement sexuel (Cass. soc. 4 novembre 2021, n°20-16.550).

Dans cette affaire, les juges relèvent qu’à la date de la signature de la convention de rupture, l’employeur était informé par la salariée de faits précis et réitérés de harcèlement et qu’il n’avait mis en œuvre aucune mesure de nature à prévenir de nouveaux actes et à protéger la salariée.

Dans un texte contexte, la salariée, en situation de violence morale, « n’avait eu d’autre choix que d’accepter la rupture et n’avait pu donner un consentement libre et éclairé ».

Soyez donc vigilant au contexte dans lequel vous signez une rupture conventionnelle : si des faits de harcèlement moral ou sexuel semblent avérés, il est préférable d’éviter ce mode de rupture.

2511, 2021

Le DRH d’une filiale peut-il licencier un salarié appartenant à une autre filiale du groupe ?

Par une décision du 20 octobre 2021, la chambre sociale de la Cour de cassation s’est interrogée, dans le contexte particulier des groupes de sociétés, sur les conditions dans lesquelles l’employeur pouvait déléguer son pouvoir de licencier (Cass. soc, 20 octobre 2021, n°20-11.485)

En l’espèce, une entreprise, appartenant à un groupe de sociétés, avait mandaté la DRH d’une autre filiale « sœur », pour procéder au licenciement d’un de ses salariés. Estimant que le licenciement ne pouvait être prononcé par le DRH d’une société « sœur » à la sienne, le salarié a contesté son licenciement.

La Cour de cassation fait droit à la demande du salarié et rappelle que l’employeur ne peut donner mandat à une personne étrangère à l’entreprise pour procéder à l’entretien et notifier le licenciement.

Néanmoins, elle indique qu’en l’espèce, il n’était « pas démontré que la gestion des ressources humaines de la société » qui employait le salarié licencié « relevait des fonctions de la DRH » de l’autre filiale, « ni que cette dernière exerçait un pouvoir sur la direction » de la société sœur.

On comprend donc que la décision aurait été différente si ces conditions avaient été réunies ou si, le licenciement avait été notifié par la DRH de la société mère du groupe.

En effet, la Cour de cassation admet que le DRH de la société mère puisse recevoir mandat pour procéder à l’entretien préalable et au licenciement d’un salarié employé par ces filiales (Cass. soc. 23-9-2009, n°07-44.200), tout comme le directeur des affaires sociales, engagé par la société mère, pour exercer ses fonctions au sein des filiales (Cass. soc, 16 mai 2007, n°06-10.307).

2810, 2021

Le paiement d’une prime sur objectifs ne peut pas être conditionné à la présence du salarié au moment de son versement

Peut-on subordonner le paiement de la rémunération variable à la présence du salarié au sein de l’entreprise à une date déterminée ?

Dans un arrêt rendu le 29 septembre 2021, la Cour de cassation a rappelé les principes applicables : « si l’ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumis à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut être soumis à une condition de présence à la date, postérieure de son versement » (Cass.soc., 29 septembre 2021, n°13-25.549).

Autrement dit, le droit à rémunération variable peut valablement être conditionné à la présence du salarié dans les effectifs à l’échéance de la période de travail correspondante. En revanche, lorsque le versement intervient postérieurement au terme de la période déterminée, il ne peut être fait échec au paiement de la rémunération variable au motif que le salarié ne serait plus présent dans les effectifs à la date de versement.

Prenons par exemple une prime annuelle sur objectif. La période de travail correspondante court du 1er janvier au 31 décembre N. Imaginons que le paiement de la prime est prévu au 31 mars N+1 :

  • Le contrat de travail peut conditionner le droit à prime à la présence du salarié au sein des effectifs au 31 décembre N. Dans un tel cas, si le salarié quitte les effectifs avant cette date, il n’aura aucun droit à rémunération variable, même au prorata (la situation serait toute différente si le contrat de travail ne subordonnait pas le droit à la prime à une date de présence déterminée du salarié, auquel cas la prime s’acquière au prorata du temps de présence du salarié dans l’entreprise) ;
  • Mais le versement de la prime annuelle sur objectifs pour l’exercice N ne peut être conditionné à la présence du salarié au 31 mars N+1.
1810, 2021

Reclassement interne dans le cadre d’un PSE : les postes en CDD doivent également être identifiés dans le cadre de la recherche de reclassement

Pour mémoire, en application de l’article L. 1233-61 du Code du travail, doit être intégré au PSE un « plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité ».

Pour ce faire, il incombe à l’employeur d’identifier les postes disponibles dans l’entreprise (ou lorsqu’elle appartient à un groupe, parmi les entreprises du groupe situées en France) qui pourraient être proposés au titre du reclassement.

A ce titre, lorsque les postes disponibles sont des CDD, l’employeur doit-il tout de même les proposer aux salariés ?

Par une décision du 22 juillet 2021 (CE, 22 juillet 2021, n°434362), le Conseil d’Etat précise, pour la première fois à notre connaissance, que la recherche de reclassement doit concerner tous les postes disponibles « quelle que soit la durée des contrats susceptibles d’être proposés pour pourvoir à ces postes ».

Ainsi, le plan de reclassement intégré au PSE doit comprendre tous les postes disponibles, dont ceux en CDD, et être proposés aux salariés, bien que ces emplois soient par nature précaires et temporaires.

Par cette décision, le Conseil d’Etat s’aligne sur la jurisprudence de Cour de cassation qui impose à l’employeur, dans le cadre de son obligation de reclassement en matière de licenciement économique (hors PSE), de proposer au salarié tous les postes disponibles, peu important qu’il s’agisse d’emplois correspondant à un surcroît temporaire d’activité (Cass. soc. 29 janvier 2002, n°00-41.885).

La même solution s’applique dans le cadre d’un licenciement pour inaptitude : l’employeur doit rechercher, au titre du reclassement du salarié déclaré inapte, les postes disponibles quelle que soit la durée des contrats (Cass. soc. 4 septembre 2019, n°18-18.169).

3009, 2021

Attention à la requalification d’un temps partiel en temps plein en cas de dépassement de la durée légale du travail

Un salarié à temps partiel peut être amené à travailler au-delà de la durée de travail prévue au contrat, par le biais d’heures complémentaires, dans la limite de 1/10e (ou 1/3 par accord collectif) de la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail prévue dans le contrat. En tout état de cause, les heures complémentaires ne doivent pas porter la durée du travail du salarié au niveau de la durée légale de travail. Cela étant, la jurisprudence n’avait pas encore eu l’occasion de préciser le cadre d’appréciation de cette « durée légale du travail ».

C’est chose faite depuis un arrêt du 15 septembre 2021, concernant un salarié à temps partiel dont la durée contractuelle de travail était fixée mensuellement.

En l’espèce, un agent de sécurité a été engagé à temps partiel pour une durée du travail de 50h par mois. Ayant accompli 36,75h de travail au cours d’une même semaine, le salarié a saisi le Conseil de prud’hommes aux fins de voir requalifier son temps partiel en temps plein et obtenir des rappels de salaire.

La Cour d’appel rejette sa demande au motif que sa durée du travail était fixée mensuellement de sorte que la réalisation, durant une semaine, d’un horaire supérieur à 35h ne pouvait entrainer la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps plein.

La Cour de cassation casse ce raisonnement et rappelle que les heures complémentaires accomplies par le salarié ne doivent pas porter sa durée de travail au niveau de la durée légale hebdomadaire (Cass.soc., 15 septembre 2021, n°19-19.563).

Autrement dit, la durée légale du travail s’apprécie sur la semaine. En conséquence, le contrat à temps partiel du salarié doit être requalifié en contrat à temps plein à compter du premier dépassement hebdomadaire de la durée légale, peut important que la durée du travail soit fixée mensuellement dans le contrat de travail.

2709, 2021

Inopposabilité de la convention de forfait : le juge doit vérifier si la rémunération contractuelle opère paiement des heures supplémentaires

La Cour de cassation a posé une solution d’équité qui ne peut qu’être saluée, au sujet de conventions de forfait en heures déclarées inopposables aux salariés.

Lorsqu’une convention de forfait est inopposable au salarié, ce dernier peut obtenir du juge un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires. Jusqu’à présent, les juges du fond accordaient ce rappel de salaire en faisant fi de la rémunération que ce dernier avait perçu dans le cadre de sa convention de forfait, même si celle-ci était très supérieure aux minima conventionnels pour 35 heures (Cass.soc., 12 novembre 2020, n°19-15.173).

Dans plusieurs arrêts inédits rendus le 16 juin 2021, la Cour de cassation précise qu’il appartient désormais aux juges du fond de vérifier, en présence d’une convention de forfait inopposable, « si la rémunération contractuelle versée par l’employeur en exécution du forfait irrégulier, n’avait pas eu pour effet d’opérer paiement, fût-ce partiellement, des heures de travail accomplies au-delà de la 35ème heure dans le cadre du décompte de droit commun de la durée du travail. » (Cass.soc., 16 juin 2021, n°20-13.169Cass.soc., 16 juin 2021, n°20-15.840).

Cette position adoptée pour les forfaits en heures, est à notre sens transposable aux forfaits en jours. Elle s’inscrit dans la droite ligne du rééquilibrage opérée par la Cour de cassation entre les droits de l’employeur et ceux du salarié. En effet, il y a quelques mois, la Cour de cassation avait admis la possibilité pour l’employeur d’obtenir, lorsque la convention de forfait en jours est privée d’effet, le remboursement des jours de repos dont a bénéficié le salarié en application de ladite convention de forfait (lien article Norma : Lorsque la convention de forfait en jours est privée d’effet, l’employeur peut réclamer le remboursement des jours de repos).

2307, 2021

Le dispositif de la prime Macron est reconduit pour 2021

A l’occasion de la Conférence du dialogue social du 15 mars dernier, le Premier Ministre avait annoncé la reconduction de la prime Macron en 2021. C’est désormais chose faite !

Le projet de loi de finances rectificative pour 2021, définitivement adopté par le Parlement le 12 juillet dernier et publié au JO du 20 juillet 2021, prévoit la reconduction du dispositif de prime exceptionnelle de pouvoir d’achat en ce qui concerne les modalités de mise en œuvre, le champ des bénéficiaires et les plafonds d’exonération.

En revanche, la nouvelle prime exceptionnelle ne peut plus être modulée en fonction « des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 ». La rémunération, la classification, la durée de présence effective pendant l’année écoulée ou la durée du travail prévue au contrat peuvent toujours être pris en compte pour moduler le montant de la prime selon les bénéficiaires.

En outre, le nouveau dispositif prévoit la possibilité de relever le plafond d’exonération des primes à 2 000 euros (au lieu de 1 000 euros) pour les entreprises ayant conclu un accord de valorisation des métiers des travailleurs de la deuxième ligne ainsi que celles engageant ou ayant engagé des négociations en vue de la conclusion d’un tel accord. Les travailleurs de deuxième ligne sont ceux qui, en raison de la nature de leurs tâches ont contribué directement à la continuité de l’activité économique et au maintien de la cohésion social et dont l’activité s’est exercée, en 2020 ou 2021, uniquement ou majoritairement sur site pendant les périodes d’état d’urgence sanitaire.

Les accords de valorisation devront alors porter sur au moins deux des cinq thèmes suivants : la rémunération et classifications, notamment au regard de l’objectif d’égalité entre les femmes et les hommes ;  la nature du contrat de travail ; santé et sécurité au travail ;  durée du travail et articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale ; formation et évolution professionnelle.

2906, 2021

Actualités Covid-19

Point d’actualité Covid-19

Le dispositif d’activité partielle évolue !

  • Durée de l’autorisation d’activité partielle : la réduction de la durée de l’autorisation de mise en activité partielle de 12 à 3 mois est reportée au 1er juillet 2021 en lieu et place du 1er mars prochain.
  • Taux de prise en charge :

1/ Pour les secteurs non protégés, la baisse des taux d’indemnité et d’allocation d’activité partielle, initialement prévue au 1er mars 2021, est reportée au 1er avril 2021.  A compter de cette date, le taux de l’indemnité d’activité partielle accordée aux salariés baissera de 70% à 60% de leur rémunération brute de référence et le taux de l’allocation versée à l’employeur passera de 60% à 36 %.

2/ Pour les secteurs « protégés » (listés aux annexes I et II du décret n°2020-810 du 29 juin 2020), une baisse échelonnée et distincte des taux de prise en charge est à prévoir :

  • A compter du 1er avril 2021, pour les entreprises relevant d’un secteur protégé listé dans l’annexe 1 du décret du 29 juin 2020, le taux de l’indemnité d’activité partielle versée au salarié est maintenu à 70% mais le taux d’allocation octroyée à l’employeur passe de 70% à 60%.

Pour les entreprises relevant d’un secteur protégé visé dans l’annexe 2 (qui accusent une baisse de chiffre d’affaires de 80%), les taux de l’indemnité versée au salarié et à l’employeur sont maintenus à 70%.

  • A compter du 1er mai 2021, pour les entreprises relevant de l’annexe 1, le taux de l’indemnité d’activité partielle versée au salarié passera de 70% à 60% et le taux de l’allocation octroyée à l’employeur de 60 % à 36%.
  • A compter du 1er juillet 2021, pour les entreprises relevant d’un secteur protégé visé dans l’annexe 2 (qui accusent une baisse de chiffre d’affaires de 80%), le taux de l’indemnité versée au salarié diminuera de 70% à 60% et le taux de l’allocation accordée à l’employeur de 70% à 36%.

3/ Pour les entreprises fermées administrativement et les établissements situés dans la zone de chalandise d’une station de ski, les taux de l’indemnité versée au salarié et à l’employeur sont maintenus à 70% jusqu’au 30 juin 2021. A compter du 1er juillet 2021, le taux de l’indemnité versée au salarié diminuera de 70% à 60% et le taux de l’allocation accordée à l’employeur de 70% à 36%, sous réserve de nouveaux changements.

4/ Pour les salariés vulnérables ou contraints de garder leur enfant de moins de 16 ans ou en situation de handicap, quelle que soit la situation de l’employeur, à compter du 1er avril 2021 et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2021, le taux d’indemnité versée au salarié est fixé à 70% et le taux d’allocation versée à l’employeur à 60%.

Face à cette baisse progressive des taux de prise en charge dans le cadre de l’activité partielle, les entreprises sont fortement invitées à négocier des accords d’activité partielle de longue durée qui leur garantissent de pouvoir bénéficier d’un taux d’allocation égal à 60% et assurent à leur salariés une indemnisation égale à 70% de leur rémunération brute pour une durée pouvant aller jusqu’à 24 mois.

  • La liste des secteurs protégés enrichie

Le décret n°2021-225 du 26 février 2021 enrichit la liste prévue à l’annexe II des activités suivantes :

  • Les commerçants réalisant au moins 50% du chiffre d’affaires (attesté par un expert-comptable) par la vente de produits ou services sur les foires et salons ;
  • Les exploitations agricoles des filières festives lorsqu’au moins 50% du chiffre d’affaires (attesté par un expert-comptable) est réalisé avec une ou des entreprises du secteur de la chasse ;
  • Treize activités en lien avec la vente en détails de skis et de chaussures de skis ou encore l’exploitation de remontées mécaniques.

Bercy et l’URSSAF prennent position sur le régime fiscal et social des frais liés au télétravail

  • Sur le régime social des indemnités forfaitaires pour le télétravail

Lorsqu’un salarié est en télétravail engage des frais (électricité, abonnement téléphonique etc), l’allocation forfaitaire versée par l’employeur est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales, le montant variant selon la quotité de journées de télétravail par semaine (Fiche Urssaf 18 décembre 2019).  Ainsi, l’employeur peut exonérer de cotisations et contributions sociales une somme forfaitaire dans la limite globale de 10 € par mois, pour un salarié effectuant une journée de télétravail par semaine (20 € par mois pour un salarié effectuant deux jours de télétravail par semaine, 30 € par mois pour trois jours par semaine…)

Dans sa fiche actualisée le 29 janvier 2021, l’URSSAF complète les possibilités de remboursement sans justificatifs des frais liés au télétravail.

Désormais, lorsque l’allocation forfaitaire est prévue par une convention collective de branche, un accord professionnel ou interprofessionnel ou par un accord de groupe, elle est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales dans la limite des montants prévus par accord collectif. Dès lors que l’allocation est attribuée en fonction du nombre de jours de jours effectivement télétravaillés.  En revanche, si le montant versé par l’employeur dépasse les limites fixées par l’accord collectif, l’exonération ne pourra être admise que sur présentation des justificatifs.

Il est important de souligner que cet assouplissement ne repose (pour le moment) que sur une simple position de l’URSSAF, qui n’est pas opposable aux inspecteurs en cas de contrôle. Dans ces circonstances, les entreprises peuvent envisager de faire valider leur pratique en amont auprès de leur URSSAF, via la procédure du rescrit, afin de se sécuriser.

  • Sur le régime fiscal des indemnités forfaitaires pour le télétravail

De son côté, dans un communiqué de presse du 2 mars 2021, le Ministère de l’économie, des finances et de la relance a annoncé des mesures spécifiques pour le traitement fiscal des allocations forfaitaires versées par l’employeur. Elles sont exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite de 2,5 euros par jour de télétravail à domicile et dans la limite annuelle de 550 euros. Cette tolérance couvre exclusivement les frais engagés au titre du télétravail et non les frais courants nécessités par le travail comme les frais de déplacement ou encore les frais de restauration.

Les mesures de sécurité sanitaire sont renforcées au sein de l’entreprise

Dans sa version actualisée au 16 février 2021, le protocole national sanitaire renforce les mesures de sécurité sanitaire au sein de l’entreprise. Désormais, les masques portés en entreprise doivent être « grand public filtration supérieure à 90% » ce qui correspond aux masques « chirurgicaux ». Autrement dit, les masques artisanaux, jugés insuffisants, ne peuvent plus être utilisés dans l’entreprise.

En outre, dans certaines situations de travail dérogeant au port du masque systématique, la distanciation sociale est portée à deux mètres.

Enfin, le protocole insiste sur la nécessité d’une aération régulière de quelques minutes, au minimum toutes les heures, ou de s’assurer d’un apport d’air neuf par un système de ventilation fonctionnelle et conforme à la réglementation.

1706, 2021

Un code de déontologie est opposable aux salariés au même titre que le règlement intérieur à condition de respecter certaines formalités

Par un arrêt du 5 mai 2021 (Cass. soc. 5 mai 2021, n°19-25.699), la chambre sociale de la Cour de cassation s’est prononcée sur l’opposabilité aux salariés, des règles issues d’un code de déontologie.

En l’espèce, en application du code monétaire et financier, une société d’investissement avait mis en place un code de déontologie, établissant des règles en matière de transactions financières.

Ce code de déontologie n’avait pas été annexé au règlement intérieur en vigueur dans l’entreprise, et ses règles n’avaient pas, non plus, été reprises dans ce dernier.

Se posait alors la question de savoir si un tel document pouvait être opposable aux salariés et fonder une sanction disciplinaire.

Pour la Cour de cassation, si l’employeur n’a pas l’obligation d’annexer formellement un tel document au règlement intérieur, il doit au préalable, le soumettre à l’avis des institutions représentatives du personnel, puis le transmettre à l’inspecteur du travail et le déposer au greffe du Conseil de prud’hommes.

A défaut de respecter ces formalités, le code de déontologie ne peut pas être considéré comme une adjonction au règlement intérieur et est inopposable aux salariés.

On en déduit que l’employeur qui souhaiterait mettre en place des codes éthiques ou déontologiques dans l’entreprise doit, pour les rendre opposables aux salariés :

  • Déterminer s’ils comportent des dispositions générales et permanentes susceptibles d’être considérées comme des adjonctions au règlement intérieur,
  • Les soumettre au CSE, et,
  • Respecter les formalités de dépôt et de publicité applicables au règlement intérieur.
1905, 2021

Covid-19 : imposer la prise de jours de RTT seulement si l’entreprise justifie de difficultés économiques

L’ordonnance nº 2020-323 du 25 mars 2020 prévoit la possibilité pour l’employeur, d’imposer ou de modifier, dans la limite de 10 jours et sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins 1 jour franc, la prise de jours de RTT, de jours du forfait jours ou des droits affectés sur le CET.

L’ordonnance indique que ce dispositif dérogatoire est possible « lorsque l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du Covid-19 ».

Arrêtons-nous sur cette notion de « difficultés économiques liées à la propagation du Covid-19 » à la lumière de la décision de la Cour d’appel de Paris du 1er avril 2021 (n° 20/12215).

Pour la Cour d’appel de Paris :

  1. L’ordonnance du 25 mars 2020 prévoit expressément et clairement que ces mesures dérogatoires ne peuvent intervenir que lorsque l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du Covid-19.
  2. Et qu’il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de ces difficultés.

En l’espèce, pour justifier l’usage de ce dispositif dérogatoire, la société avançait, au titre des difficultés économiques, deux arguments :

  • La nécessité d’adapter son organisation face à une augmentation inattendue de l’absentéisme tenant au fait qu’une partie de ses collaborateurs se trouvaient à leur domicile sans pouvoir exercer leur activité en télétravail ;
  • La nécessité d’aménager les espaces de travail et d’adapter le taux d’occupation des locaux en raison des conditions sanitaires.
  1. Pour la Cour, les difficultés d’organisation et l’absentéisme liés à la pandémie ne suffisent pas à caractériser l’existence de difficultés économiques.

Elle estime que cet argument ne répond donc pas à la notion de difficultés économiques liées à la propagation du virus et décide que les notes de services imposant la prise de jours de repos constituent un trouble manifestement illicite. (Elle déboute néanmoins le syndicat de sa demande de recréditer les jours de repos, estimant que seul le CPH est compétent pour statuer sur ce point).

A la lecture de cette décision on peut légitimement s’interroger sur la notion de « difficultés économiques liés à la propagation du Covid-19 ». Faut-il se référer aux « difficultés économiques » telles que prévues à l’article L. 1233-3 du Code du travail relatif aux licenciement pour motif économique ? La Cour n’y répond pas et se livre à une lecture qui aurait tout autant pu être inverse. En effet, la loi d’habilitation du 23 mars 2020 autorise l’employeur à imposer des jours de repos « afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 ». Elle n’évoque pas des « difficultés » mais des « conséquences » liées à l’épidémie.

A ce jour, il existe donc une insécurité juridique sur ce point. Dans l’attente de la décision de la Cour de cassation qui a été saisie, nous invitons les entreprises à être vigilantes sur cette question et à s’assurer, avant d’imposer des jours sur la base du dispositif dérogatoire, de pouvoir, le cas échéant, motiver leur décision par des « difficultés économiques » et non par de « simples conséquences économiques » liées à l’épidémie.

A noter :

Ce dispositif dérogatoire est prolongé jusqu’au 30 juin 2021 voire jusqu’au 15 septembre 2021 selon le projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire.

Le projet de loi envisage également la possibilité, dans le cadre d’un accord collectif, d’imposer la prise de jours de congés payés acquis qui ne serait plus limité à 6, mais à 8 jours ouvrables.

1805, 2021

Deliveroo : la requalification en contrat de travail est rejetée par la Cour d’appel de Paris

Plusieurs affaires emblématiques ont révélé la problématique de la qualification de la relation contractuelle des travailleurs des plateformes. Si, à plusieurs reprises, la Cour de cassation a qualifié celle-ci en contrat de travail pour les travailleurs des plateformes Take Eat Easy (Cass.soc., 28 novembre 2018, n°17-20.079) et Uber (Cass.soc., 4 mars 2020, n°19-13.316), cette qualification est loin d’être systématique.

En effet, par une décision en date du 7 avril 2021, la Cour d’appel de Paris a rejeté la demande de requalification du contrat de prestation d’un livreur de la plateforme de livraison de repas Deliveroo en contrat de travail.

Après avoir signé un contrat de prestation de service avec la société Deliveroo, un livreur voit son contrat résilié. Il saisit alors le Conseil de prud’hommes de Paris aux fins de requalification de son contrat. Au soutient de sa demande, il invoque l’existence d’instructions strictes de la part de la société concernant les tarifs, la tenue vestimentaire, la fixation des horaires de travail, un contrôle de géolocalisation et enfin la possibilité pour la société de pratiquer des retenus tarifaires. Pour le livreur, ces indices font transparaitre l’existence d’un lien de subordination avec la société Deliveroo devant entrainer la requalification de son contrat de prestation de service en contrat de travail.

Par la technique du faisceau d’indice, la Cour d’appel a analysé point par point les arguments avancés par le livreur au regard de la définition du lien de subordination posée par la Cour de cassation (Cass.soc., 13 novembre 1996, n°94-13.187) :

  • S’agissant de la fixation des tarifs, de la tenue vestimentaire et des horaires de travail, la Cour d’appel a relevé que le travailleur jouissait d’une liberté dans la fixation des jours et horaires de travail, qu’il n’avait aucune obligation de porter une tenue avec le logo de la société et qu’il pouvait librement négocier sa rémunération. Dès lors, aucun pouvoir de direction ne pouvait être caractérisé ;
  • S’agissant du dispositif de géolocalisation, la Cour d’appel a considéré que ce dispositif était inhérent au service de mise en relation entre les restaurants partenaires et les livreurs de sorte qu’il ne peut être assimilé à un système de contrôle hiérarchique.
  • Enfin s’agissant des retenues financières, la Cour d’appel a relevé que ce mécanisme était expressément prévu par contrat pour certains cas limitatifs (articles manquants dans une livraison, absence injustifiée etc). En conséquence, aucun pouvoir de sanction de la part de la société Deliveroo ne pouvait être caractérisé.

Dans ces conditions, la Cour d’appel a débouté le livreur de sa demande de requalification en contrat de travail en ce que les critères du lien de subordination n’étaient pas réunis, confirmant le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Paris.

1805, 2021

Harcèlement moral : l’enquête interne peut se dérouler sans que le salarié mis en cause ne soit prévenu ni entendu

En cas de dénonciation de harcèlement moral, l’employeur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser les agissements dénoncés. L’employeur doit alors vérifier que les faits rapportés sont avérés et doit donc mettre en place une enquête, sauf à se voir reprocher un manquement à son obligation de sécurité.

En l’espèce, l’employeur a fait appel à une entreprise extérieure spécialisée en risques psychosociaux pour mener l’enquête. Cette enquête a  révélé que la salariée mise en cause avait proféré des insultes et des propos à caractère racial et discriminatoire causant des perturbations graves au sein de l’entreprise. C’est dans ce contexte que la salariée a été licenciée pour faute grave.

La Cour d’appel a jugé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse car le compte rendu d’enquête avait été obtenu de manière déloyale et devait donc être écarté des débats. En effet, les juges du fond avaient relevé que la salariée n’avait pas été informée ni entendue dans le cadre de l’enquête. L’employeur a donc méconnu les dispositions de l’article L.1222-4 du Code du travail qui l’oblige à porter préalablement à la connaissance du salarié la mise en œuvre de tout dispositif collectant des informations personnelles.

Par un arrêt en date du 17 mars 2021, la Cour de cassation a cassé ce raisonnement en précisant que l’article L1222-4 du Code du travail ne s’applique pas à l’enquête interne effectuée à la suite d’une dénonciation de faits de harcèlement moral (Cass.soc., 17 mars 2021, n°18-25.597).

Dès lors, l’employeur peut diligenter une enquête sur le salarié mis en cause, sans l’en informer ni entendre ses explications. Cela étant dit, il peut être opportun d’informer et d’entendre le salarié mis en cause afin de recueillir ses explications dans le cadre de l’enquête (et non uniquement au stade de son entretien préalable en cas de licenciement). Cette démarche permet à la fois de comprendre une situation en ayant le point de vue de toutes les parties et d’éviter également que le salarié ne conteste, le cas échéant, l’objectivité de l’enquête menée.

305, 2021

Télétravail : extension de l’ANI à toutes les entreprises et obligation de rédaction d’un plan d’action en période de pandémie

Le cabinet Norma Avocats revient sur deux actualités en matière de télétravail :

  1. Extension de l’Accord National Interprofessionnel sur le télétravail

Par arrêté du 2 avril 2021, les stipulations de l’ANI du 26 novembre 2020 sur le télétravail ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans son champ d’application.

Sont concernées toutes les entreprises appartenant à un secteur professionnel représenté par les organisations patronales signataires à savoir le Medef, la CPME et l’U2P.

Dorénavant, le cadre juridique du télétravail est donc régi par :

  • Les articles L.1222-9 à L.1222-11 du Code du travail ;
  • L’ANI du 19 juillet 2005, étendu par arrêté du 30 mai 2006 modifié par arrêté du 15 juin 2006 ;
  • L’ANI du 26 novembre 2020 qui vient, entre autres, redéfinir les conditions d’accès au télétravail en distinguant les périodes de crise sanitaire des périodes dites « normales » et qui met notamment en avant le dialogue social.

L’arrêté du 2 avril dernier a posé une réserve quant à l’extension de l’article 3.1.5 relatif à la prise en charge des frais professionnels.

Pour rappel, cet article prévoit qu’il appartient à l’entreprise de prendre en charge les dépenses qui sont engagées par le salarié dans l’intérêt de l’entreprise et pour les besoins de son activité professionnelle, après validation de l’employeur.

L’arrêté indique quant à lui que cet article est étendu « sous réserve du respect du principe général de prise en charge des frais professionnels tel qu’interprété par la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. soc, 25 février 1998, n° 95-44.096) selon lequel la validation de l’employeur est interprétée comme étant préalable, et non postérieure, à l’engagement des dépenses par le salarié ».

Dans ce cadre-là, nous vous invitons à rappeler ce principe de validation préalable des dépenses liées à l’exercice du travail à distance dans vos accords sur le télétravail ou vos notes sur les frais professionnels.

  1. Crise sanitaire : obligation de mise en place d’un Plan d’action sur le télétravail

Depuis plusieurs mois maintenant, la situation sanitaire impose à toutes les entreprises de limiter les interactions sociales aux abords et sur le lieu de travail et de placer en télétravail tous les salariés dont l’activité peut être exercée à distance.

Si, dans les faits, les entreprises ont massivement mis en place le télétravail, désormais et suite à la mise à jour du protocole sanitaire en entreprise de mars et avril dernier, elles ont l’obligation de formaliser leurs pratiques dans un Plan d’action sur le télétravail.

Ce plan d’action a pour objet de réduire au maximum le temps de présence sur site des salariés en tenant compte des activités totalement ou partiellement télétravaillables.

Le protocole indique que les modalités de ce plan d’action sont adaptées à la taille de l’entreprise et fait l’objet d’échanges dans le cadre du dialogue social de proximité.

Le Gouvernement indique à cette occasion, qu’en cas de contrôle, l’employeur doit présenter à l’inspection du travail les actions mises en œuvre pour favoriser le télétravail.

305, 2021

Les RH passent au vert

A la suite de la Convention Citoyenne sur le Climat et des discussions sur la loi éponyme, Norma propose une Visio-Parenthèse pour aborder le rôle et les obligations des RH en matière environnementale… Rejoignez nous  le 12 mai 2021!

La Visio Parenthèse ( Norma –

1304, 2021

L’employeur peut-il exclure les télétravailleurs du bénéfice des tickets-restaurant ?

Les confinements successifs de la France depuis mars 2020 et la persistance de la crise sanitaire ont contraint les entreprises à placer leurs salariés massivement en télétravail. Elles se sont alors interrogées sur la légitimité de maintenir le bénéficie des tickets-restaurant pour des salariés qui peuvent dorénavant se restaurer chez eux.

Pour le Ministère du travail, question-réponse du 20 mars 2020, « dès lors que les salariés exerçant leur activité dans les locaux de l’entreprise bénéficient des titres-restaurant, les télétravailleurs doivent aussi en recevoir si leurs conditions de travail sont équivalentes ».

De son côté, l’URSSAF indique dans le Bulletin officiel de la sécurité sociale (opposable depuis le 1er avril 2021), que les tickets-restaurant des télétravailleurs bénéficient des mêmes exonérations, sous les mêmes conditions, que pour les autres travailleurs.

Les juges, de leur côté, ont adopté des positions divergentes.

En effet, à quelles semaines d’intervalle, le Tribunal judiciaire de Nanterre et celui de Paris ont rendu deux décisions contraires sur le point de savoir si les salariés en télétravail pouvaient être exclus du bénéficie des tickets-restaurant (TJ Nanterre, Pôle social, 10 mars 2021, n°20/09616 ; TJ Paris, Pôle social, 30 mars 2021, n°20/09805).

Si les juges de Nanterre ont estimé que l’employeur pouvait légitimement attribuer les tickets-restaurant aux seuls salariés sur site, les juges de Paris ont quant à eux considéré qu’une telle exclusion ne respectait pas le principe d’égalité dès lors que l’employeur ne justifiait pas de ce que les télétravailleurs étaient dans une situation distincte.

Le cabinet Norma Avocats s’interroge donc sur la raison de cette divergence et décrypte plus en détails la décision du Tribunal judiciaire de Paris.

En l’espèce, en raison de la crise sanitaire liée au Covid-19, la majorité des salariés de la société défenderesse ont été placés en télétravail. Or, si tous les salariés de la société en question percevaient des tickets-restaurant avant la crise sanitaire, à compter du 17 mars 2020, la société a décidé de les réserver aux seuls salariés exécutant leurs missions dans ses locaux.

Estimant que cette décision était contraire au principe d’égalité, un syndicat et le CSE ont saisi le Tribunal judiciaire pour voir condamner la société à régulariser la situation des télétravailleurs.

En effet, l’ANI du 19 juillet 2005 indique que les télétravailleurs doivent bénéficier des mêmes droits et avantages légaux et conventionnels que ceux applicables aux salariés en situation comparable travaillant dans les locaux de l’entreprise.

L’objet du litige était donc de savoir si les télétravailleurs et les salariés sur site étaient dans une situation différente. Pour ce faire, il incombait à la société de justifier de ce que les télétravailleurs se trouvaient dans une situation distincte en raison notamment des conditions d’exercice de leurs fonctions et que le refus d’attribution des tickets-restaurant était fondé sur des raisons objectives, matériellement vérifiables et en rapport avec l’objet des titres restaurant.

Pour considérer que les télétravailleurs n’étaient pas placés dans une situation comparable à celle des travailleurs sur site, la société avançait les éléments suivants :

  1. L’objet du ticketrestaurant est de permettre au salarié de se restaurer lorsqu’il ne dispose pas d’un espace personnel pour préparer son repas, « ce qui s’accorde peu avec le salarié en télétravail qui dispose de sa cuisine personnelle et qui n’a donc pas à se limiter à des plats immédiatement consommables ».
  2. Les conditions d’utilisation des ticketsrestaurants ne sont pas compatibles avec la situation du télétravailleur puisque « le salarié ne peut pas utiliser un titrerestaurant pour acheter autre chose qu’un repas en restaurant, ou un repas directement consommable ou des fruits et légumes même non directement consommables, ce qui exclut que le salarié s’en serve pour financer ses courses de la semaine».

Or, les juges parisiens ne vont pas adhérer à l’argumentation de la société.

Le Tribunal judiciaire va d’abord indiquer qu’en application de l’article L.1222-9 du code du travail, le télétravail constitue toute forme d’organisation du travail effectué par un salarié hors des locaux de l’employeur, ce qui n’implique pas pour le salarié de se trouver à son domicile ni de disposer d’un espace personnel pour préparer son repas.

Par ailleurs, les juges précisent que l’objet du ticket-restaurant est de permettre au salarié de se restaurer lorsqu’il accomplit son horaire de travail journalier comprenant un repas, mais non sous condition qu’il ne dispose pas d’un espace personnel pour préparer celui-ci.

Concernant les conditions d’utilisation des tickets-restaurant, là encore les juges vont se montrer fermes à l’égard de la société en estimant qu’elles sont tout à fait compatibles avec l’exécution des fonctions en télétravail puisqu’elles ont pour principe directeur de permettre au salarié de se restaurer lorsque son temps de travail comprend un repas, et qu’à ce titre les télétravailleurs se trouvent dans une situation équivalente à celle des salariés sur site.

Le Tribunal judiciaire de Paris en conclut donc que l’employeur ne justifie pas de ce que les télétravailleurs se trouvent dans une situation distincte en raison notamment des conditions d’exercice de leurs fonctions de sorte que le refus de leur attribuer des titres restaurant ne repose sur aucune raison objective en rapport avec l’objet des titres restaurant.

Par comparaison, devant le Tribunal judiciaire de Nanterre, l’employeur avait justifié la différence de traitement sur le fait que les salariés sur site devaient faire face à un surcoût lié à la restauration hors de leur domicile pour ceux qui seraient dans l’impossibilité de prendre leur repas à leur domicile. Or, par définition, les salariés placés en télétravail à leur domicile n’ont pas à supporter un tel surcoût.

Néanmoins, si le Tribunal judiciaire de Nanterre a estimé au cas d’espèce, que la différence de traitement était justifiée, il convient de rester prudent en évitant de considérer que ce seul argument légitimerait à lui-seul le non-octroi des tickets-restaurant aux télétravailleurs.

Ce faisant, à ce jour, la question de savoir si l’employeur peut exclure les télétravailleurs du bénéficie des tickets-restaurant n’est donc pas tranchée.

Au regard de l’incertitude de la jurisprudence et dans l’attente de la décision des Cours d’appel de Paris et Nanterre, il semblerait plus prudent pour les employeurs qui ont fait le choix d’exclure les télétravailleurs du bénéficie des tickets-restaurant, notamment à compter de la crise sanitaire, de mettre en avant le fait que les conditions de travail des télétravailleurs sont bien différentes de celles des autres salariés.

A ce titre, on peut s’interroger sur la possibilité d’intégrer cette justification dans la charte ou l’accord télétravail voire dans le cadre d’une NAO. A cette occasion, l’entreprise pourrait cadrer l’attribution des tickets-restaurant, sans évoquer ses conditions d’utilisation, et distinguer les périodes de crise sanitaire des périodes dites « normales » où le télétravail est mis en place d’un commun accord entre l’employeur et le salarié.

 

1304, 2021

Activité partielle et garde d’enfant : présentation du régime applicable au 6 avril 2021

Afin de contenir l’épidémie de Covid-19 sur le territoire national, le Président de la République a annoncé, le 31 mars 2021, la fermeture des établissements scolaires et des crèches pour une durée de trois semaines. Les salariés se trouvant dans l’incapacité de télétravailler pourront alors demander à bénéficier de l’activité partielle pour garder leur enfant : Présentation du dispositif d’activité partielle au 6 avril 2021.

 

604, 2021

Les règles dérogatoires d’indemnisation des arrêts de travail sont prolongées jusqu’au 1er juin 2021

Par décret n°2021-271 du 11 mars 2021, le Gouvernement a prolongé de deux mois l’application des règles d’indemnisation dérogatoires des arrêts de travail « spécial Covid » fixées par le décret n°2021-13 du 8 janvier 2021 (à savoir les personnes dites « vulnérables », parent d’enfant de moins de 16 ans ou en situation de handicap, ou faisant l’objet d’une mesure d’isolement).

Sous réserve de futurs changement, jusqu’au 1er juin inclus, les assurés relevant des régimes de base obligatoires d’assurance maladie bénéficient pendant leur arrêt de travail :

  • Des indemnités journalières de sécurité sociale sans conditions d’ouverture des droits (minimum d’activité ou de cotisations), sans délai de carence et sans qu’elles soient prises en compte dans le calcul des durées maximales d’indemnisation ;
  • Du complément légal de l’employeur sans que les conditions en principe requises (ancienneté d’un an, justification de l’arrêt de travail dans les 48h, soins en France ou dans l’UE) ne soient applicables, sans délai de carence et sans que les indemnités déjà perçues ne soient prises en compte pour le calcul de la durée totale d’indemnisation. En revanche, un éventuel délai de carence conventionnel reste applicable.

Ces règles d’indemnisation dérogatoires sont également étendues aux assurés placés en isolement à leur retour de l’étranger. Ainsi, les assurés se trouvant dans l’impossibilité de travailler ou de télétravailler peuvent bénéficier d’un arrêt de travail indemnisé dans les conditions ci-dessus exposées pendant une durée maximale de 9 jours.

404, 2021

La prime Macron est reconduite pour 2021

Le 15 mars 2021, à l’occasion de la Conférence du dialogue social, le Premier Ministre a annoncé la reconduction de la prime Macron en 2021 en mettant l’accent sur les « travailleurs de la deuxième ligne ».

Les entreprises pourront verser à leurs salariés une prime défiscalisée et exonérée de cotisations sociales d’un montant maximal de 1000 euros dont les travailleurs de la deuxième ligne (caissiers, boulangers, agent de sécurité, travailleurs à domicile etc.) devront en être les bénéficiaires privilégiés en raison « de leur engagement pour assurer la continuité économique du pays ».

Ce montant pourra aller jusqu’à 2 000 euros pour les entreprises ayant conclu un accord d’intéressement ou ayant ouvert une négociation sur les éléments de revalorisation de ces métiers (accès à la formation, rémunération, conditions de travail, etc).

Les modalités de versement et d’exonération de la Prime Macron 2021 devraient être similaires à celles des années précédentes. Cela étant, le Ministère du Travail devra arrêter une liste des « travailleurs de la deuxième ligne » à prioriser pour le versement de cette prime.

2403, 2021

Index égalité professionnelle : nouvelles précisions sur l’obligation de publication des résultats sur le site internet de l’entreprise

Par un décret 2021-265 du 10 mars 2021, le Gouvernement a apporté des précisions, sur les obligations qui incombent aux entreprises en matière de réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, de manière générale mais aussi, plus spécifiquement, pour les entreprises bénéficiaires du Plan de relance.

  • Obligations générales de publication de l’index égalité

Chaque année avant le 1er mars, les entreprises d’au moins 50 salariés doivent calculer et publier sur leur site internet la note globale de leur Index égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Le décret du 10 mars 2021 apporte quelques précisions sur cette obligation de publication :

  • Jusqu’à présent, les entreprises devaient seulement publier leur note globale. Dorénavant, elles devront également publier, les résultats obtenus pour chaque indicateur de l’index. Si certaines entreprises affichent fièrement leur note et en font même un outil de communication, d’autres ont tendance à n’en faire qu’une mention en caractères minuscules dans un bas de page inaccessible. Il faudra désormais assumer sa note et le sujet de l’égalité, le décret invitant les entreprises à publier leur note et leurs résultats « de manière visible et lisible» sur leur site internet.
  • De plus, ces informations doivent être consultables sur le site internet de l’entreprise toute l’année, jusqu’à la publication des résultats de l’année suivante.

Notons qu’à défaut de site internet, ces éléments sont portés à la connaissance des salariés par tout moyen.

Cette exigence de publication « visible et lisible » du niveau de résultat global doit être réalisée, au plus tard, le 1er mai 2021 et celle des résultats obtenus pour chaque indicateur, le 1er juin 2021.

  • Obligations de publication spécifiques incombant aux entreprises bénéficiaires du Plan de relance

Par un article publié le 24 février 2021, le cabinet Norma Avocats commentait les dispositions de l’article 244 de la loi de Finances pour 2021 venant conditionner le bénéficie des aides du Plan de relance au respect, par les entreprises, d’obligations en matière d’égalité entre les femmes et les hommes à effectuer avant le 31 décembre 2022.

Portant application de cet article 244, le décret du 10 mars 2021 est venu préciser ces conditions : les entreprises d’au moins 50 salariés, dont la note globale de l’index égalité est inférieure à 75 points, ont l’obligation de fixer et de publier sur leur site internet :

  • Les objectifs de progression pour chacun des indicateurs de l’index pour lequel la note maximale n’a pas été atteinte,
  • Les mesures de correction et de rattrapage.

L’entreprise aura préalablement défini les mesures de correction dans le cadre de sa négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle, ou à défaut d’accord, par décision unilatérale de l‘employeur et après consultation du CSE.

Le décret précise que les objectifs de progression ainsi que les mesures de correction et de rattrapage sont publiés sur la même page internet que la note globale et les résultats de l’index égalité professionnelle. Cette publication intervient dès que l’accord ou la décision unilatérale a fait l’objet du dépôt sur la plateforme de téléprocédure du ministre du travail.

Par ailleurs tant que l’entreprise n’a pas obtenu un niveau de résultat au moins égale à 75 points, elle a l’obligation de laisser sur son site internet ces informations. Notons encore une fois, qu’à défaut de site internet, ces informations doivent être portées à la connaissance des salariés par tout moyen.

Enfin, ces dispositions sont applicables à compter des résultats calculés sur la période de référence s’achevant, au plus tard, le 31 décembre 2021, et doivent être publiés, au plus tard, le 1er mars 2022.

Par dérogation, les entreprises ayant obtenu, en 2022, au titre de l’année 2021, un niveau de résultat inférieur à 75 points peuvent fixer et publier les objectifs de progression et les mesures de correction et de rattrapage jusqu’au 1er mai 2022.

1603, 2021

Rédaction du protocole transactionnel : l’effet libératoire des clauses rédigées en termes généraux

Selon les articles 2044 et 2052 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, mettent fin à une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Les transactions ont alors, entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort.

Par un arrêt du 17 février 2021 (Cass. soc., 17 février 2021, n°19-20.635), la Cour de cassation précise que même si elle est rédigée en termes généraux, la transaction couvre aussi la question de l’indemnité de non-concurrence due au salarié.

En effet, à moins que la transaction soit assortie d’une exclusion expresse, les demandes ultérieures du salarié, quel qu’en soit l’objet, liées à l’exécution ou à la rupture du contrat de travail, seront déclarées irrecevables dès lors que la transaction précise les points suivants :

  1. Les parties reconnaissent que leurs concessions réciproques sont réalisées à titre transactionnel, forfaitaire et définitif conformément aux dispositions des articles 2044 et suivants du code civil, et en particulier, de l’article 2052 du code civil,
  2. L’objet de la transaction est de remplir chacune des parties de tous leurs droits et de mettre fin à tout différend né ou à naître des rapports de droit ou de fait ayant pu exister entre elles,
  3. Les parties déclarent, sous réserve de la parfaite exécution de l’accord, être totalement remplies de leurs droits respectifs et renoncer réciproquement à toute prétention, action ou instance en vue de réclamer quelque somme que ce soit.

La Cour d’appel avait retenu qu’à défaut de levée de la clause de non-concurrence par l’employeur au moment de la rupture du contrat, celui-ci ne pouvait invoquer l’autorité de la chose jugée s’attachant au protocole pour s’opposer à la demande de paiement formée par le salarié à ce titre, puisqu’elle n’était pas expressément visée dans la transaction.

Or, dans le prolongement de sa jurisprudence relative au plein effet des clauses transactionnelles de renonciation générale, la chambre sociale de la Cour de cassation a estimé que les parties étaient remplies de tous leurs droits, y compris au titre de la clause de non-concurrence.

503, 2021

Les mesures de sécurité sanitaire sont renforcées au sein de l’entreprise

Dans sa version actualisée au 16 février 2021, le protocole national sanitaire renforce les mesures de sécurité sanitaire au sein de l’entreprise. Désormais, les masques portés en entreprise doivent être « grand public filtration supérieure à 90% » ce qui correspond aux masques « chirurgicaux ». Autrement dit, les masques artisanaux, jugés insuffisants, ne peuvent plus être utilisés dans l’entreprise.

En outre, dans certaines situations de travail dérogeant au port du masque systématique, la distanciation sociale est portée à deux mètres.

Enfin, le protocole insiste sur la nécessité d’une aération régulière de quelques minutes, au minimum toutes les heures, ou de s’assurer d’un apport d’air neuf par un système de ventilation fonctionnelle et conforme à la réglementation.

503, 2021

Le dispositif d’activité partielle évolue !

Les décrets n°2021-221 et n°2021-225 du 26 février 2021 ont modifié le dispositif d’activité partielle sur les points suivants :

  • Durée de l’autorisation d’activité partielle : la réduction de la durée de l’autorisation de mise en activité partielle de 12 à 3 mois est reportée au 1er juillet 2021 en lieu et place du 1er mars prochain.

 

  • Taux de prise en charge :

1/ Pour les secteurs non protégés, la baisse des taux d’indemnité et d’allocation d’activité partielle, initialement prévue au 1er mars 2021, est reportée au 1er avril 2021.  A compter de cette date, le taux de l’indemnité d’activité partielle accordée aux salariés baissera de 70% à 60% de leur rémunération brute de référence et le taux de l’allocation versée à l’employeur passera de 60% à 36 %.

2/ Pour les secteurs « protégés » (listés aux annexes I et II du décret n°2020-810 du 29 juin 2020), une baisse échelonnée et distincte des taux de prise en charge est à prévoir :

  • A compter du 1er avril 2021, pour les entreprises relevant d’un secteur protégé listé dans l’annexe 1 du décret du 29 juin 2020, le taux de l’indemnité d’activité partielle versée au salarié est maintenu à 70% mais le taux d’allocation, octroyée à l’employeur, passe de 70% à 60%. Pour les entreprises relevant d’un secteur protégé visé dans l’annexe 2 (qui accusent une baisse de chiffre d’affaires de 80%), les taux de l’indemnité versée au salarié et à l’employeur sont maintenus à 70%.
  • A compter du 1er mai 2021, pour les entreprises relevant de l’annexe 1, le taux de l’indemnité d’activité partielle versée au salarié passera de 70% à 60% et le taux de l’allocation octroyée à l’employeur de 60 % à 36%.
  • A compter du 1er juillet 2021, pour les entreprises relevant d’un secteur protégé visé dans l’annexe 2 (qui accusent une baisse de chiffre d’affaires de 80%), le taux de l’indemnité versée au salarié diminuera de 70% à 60% et le taux de l’allocation accordée à l’employeur de 70% à 36%.

3/ Pour les entreprises fermées administrativement et les établissements situés dans la zone de chalandise d’une station de ski, les taux de l’indemnité versée au salarié et à l’employeur sont maintenus à 70% jusqu’au 30 juin 2021. A compter du 1er juillet 2021, le taux de l’indemnité versée au salarié diminuera de 70% à 60% et le taux de l’allocation accordée à l’employeur de 70% à 36%, sous réserve de nouveaux changements.

4/ Pour les salariés vulnérables ou contraints de garder leur enfant de moins de 16 ans ou en situation de handicap, quelle que soit la situation de l’employeur, à compter du 1er avril 2021 et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2021, le taux d’indemnité versée au salarié est fixé à 70% et le taux d’allocation versée à l’employeur à 60%.

Face à cette baisse progressive des taux de prise en charge dans le cadre de l’activité partielle, les entreprises sont fortement invitées à négocier des accords d’activité partielle de longue durée qui leur garantissent de pouvoir bénéficier d’un taux d’allocation égal à 60% et assurent à leur salariés une indemnisation égale à 70% de leur rémunération brute pour une durée pouvant aller jusqu’à 24 mois.

  • La liste des secteurs protégés enrichie

Le décret n°2021-225 du 26 février 2021 enrichit la liste prévue à l’annexe II des activités suivantes :

  • Les commerçants réalisant au moins 50% du chiffre d’affaires (attesté par un expert-comptable) par la vente de produits ou services sur les foires et salons ;
  • Les exploitations agricoles des filières festives lorsqu’au moins 50% du chiffre d’affaires (attesté par un expert-comptable) est réalisé avec une ou des entreprises du secteur de la chasse ;
  • Treize activités en lien avec la vente en détails de skis et de chaussures de skis ou encore l’exploitation de remontées mécaniques.
303, 2021

Bercy et l’URSSAF prennent position sur le régime fiscal et social des frais liés au télétravail

      • Sur le régime social des indemnités forfaitaires pour le télétravail

Lorsqu’un salarié est en télétravail engage des frais (électricité, abonnement téléphonique etc), l’allocation forfaitaire versée par l’employeur est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales, le montant variant selon la quotité de journées de télétravail par semaine (Fiche Urssaf 18 décembre 2019).  Ainsi, l’employeur peut exonérer de cotisations et contributions sociales une somme forfaitaire dans la limite globale de 10 € par mois, pour un salarié effectuant une journée de télétravail par semaine (20 € par mois pour un salarié effectuant deux jours de télétravail par semaine, 30 € par mois pour trois jours par semaine…)

Dans sa fiche actualisée le 29 janvier 2021, l’URSSAF complète les possibilités de remboursement sans justificatifs des frais liés au télétravail.

Désormais, lorsque l’allocation forfaitaire est prévue par une convention collective de branche, un accord professionnel ou interprofessionnel ou par un accord de groupe, elle est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales dans la limite des montants prévus par accord collectif. Dès lors que l’allocation est attribuée en fonction du nombre de jours de jours effectivement télétravaillés.  En revanche, si le montant versé par l’employeur dépasse les limites fixées par l’accord collectif, l’exonération ne pourra être admise que sur présentation des justificatifs.

Il est important de souligner que cet assouplissement ne repose (pour le moment) que sur une simple position de l’URSSAF, qui n’est pas opposable aux inspecteurs en cas de contrôle. Dans ces circonstances, les entreprises peuvent envisager de faire valider leur pratique en amont auprès de leur URSSAF, via la procédure du rescrit, afin de se sécuriser.

      • Sur le régime fiscal des indemnités forfaitaires pour le télétravail

De son côté, dans un communiqué de presse du 2 mars 2021, le Ministère de l’économie, des finances et de la relance a annoncé des mesures spécifiques pour le traitement fiscal des allocations forfaitaires versées par l’employeur. Elles sont exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite de 2,5 euros par jour de télétravail à domicile et dans la limite annuelle de 550 euros. Cette tolérance couvre exclusivement les frais engagés au titre du télétravail et non les frais courants nécessités par le travail comme les frais de déplacement ou encore les frais de restauration.

 

2402, 2021

Pour bénéficier des aides du Plan de relance, les entreprises doivent désormais respecter un certain nombre d’obligations

Pour faire face à l’épidémie du Covid-19, le Gouvernement a mis en place des mesures de soutien aux entreprises par le déploiement du Plan « France relance ».

La loi de Finances pour 2021 du 29 décembre 2020 précise que le bénéfice des aides du Plan de relance est subordonné au respect, par les entreprises, de 3 obligations notamment sociales et écologiques, à effectuer avant le 31 décembre 2022.

Ces obligations visent l’ensemble des aides contenues dans le Plan de relance, notamment les aides versées aux entreprises dans le cadre du dispositif d’activité partielle ou d’APLD.

 

  • Publication des indicateurs de l’égalité Femmes-Hommes

Pour bénéficier des aides du Plan de relance, les entreprises dont l’effectif est supérieur à 50 salariés, doivent :

  • Publier, avant le 1er mars de chaque année, le résultat obtenu pour chacun des indicateurs servant au calcul de l’index égalité Femmes-Hommes ;
  • Publier, avant le 31 décembre 2022, sur le site du ministère du travail le résultat de cet index égalité. Les modalités de cette publication seront définies dans un décret à paraitre.

Pour les entreprises dont les indicateurs sont inférieurs au seuil de 75 points, elles ont également l’obligation de fixer des objectifs de progression pour chacun des indicateurs lors de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle ou par décision de l’employeur, après consultation du CSE.

Ces objectifs et les mesures de correction et de rattrapage devront être publiés selon des modalités définies par décret à paraitre.

L’article 244 de la loi ne précise pas quel est le seuil en dessous duquel les entreprises sont assujetties à cette dernière obligation. A priori, il nous semble que ce seuil est celui prévu à l’article D. 1142-6 du Code du travail à savoir, 75 points.

En cas de non-respect de ces obligations, l’entreprise peut être redevable d’une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 1% de la masse salariale.

Pour rappel, les entreprises d’au moins 50 salariés ont, comme chaque année, jusqu’au 1er mars 2021 pour publier les résultats de leur index égalité.

 

  • Information-consultation du CSE

Dans les entreprises de plus de 50 salariés, l’employeur devra, dans le cadre de la consultation annuelle sur les orientations stratégiques de l’entreprise (C. trav., art. L. 2312-24), communiquer au CSE le montant, la nature et l’utilisation des aides dont il bénéficie au titre du Plan de relance.

Le CSE devra ensuite formuler un avis distinct sur l’utilisation par l’entreprise du crédit ouvert au titre du Plan de relance.

 

  • Des obligations en matière d’écologie

Les entreprises de plus de 50 salariés doivent établir un bilan simplifié de leurs émissions de gaz à effet de serre avant le 31 décembre 2022. Pour celles employant entre 51 et 250 salariés, ce bilan simplifié devra être établi avant le 31 décembre 2023.

La loi précise que ce bilan sera public et indiquera les émissions directes produites par les sources d’énergie fixes et mobiles nécessaires aux activités de l’entreprise. La méthode pour réaliser ce bilan simplifié sera précisée par décret à paraitre.

Pour rappel, les entreprises de plus de 500 salariés sont déjà soumises à l’obligation d’établir, tous les 4 ans, un bilan d’émissions de gaz à effet de serre (C. env. art. L.299-25).

 

L’article 244 précité précise par ailleurs les modalités de calcul des effectifs pour les entreprises assujetties à ces obligations. Il prévoit que le franchissement à la hausse d’un seuil d’effectif salarié est pris en compte lorsque ce seuil a été atteint ou dépassé pendant 5 années civiles consécutives conformément à l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale.

2302, 2021

Lorsque la convention de forfait en jours est privée d’effet, l’employeur peut réclamer le remboursement des jours de repos

Lorsque l’employeur ne respecte pas les dispositions conventionnelles destinées à assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés en convention de forfait en jours (modalités de contrôle du temps de travail et de suivi de la charge de travail), ces forfaits sont privés d’effet.

Dans un arrêt en date du 6 janvier 2021 (Cass.soc., 6 janvier 2021, n°17.28.234), la Cour de cassation aborde les conséquences vis-à-vis du salarié, notamment le sort des jours de réduction du temps de travail, lorsque sa convention de forfait est privée d’effet.

En l’espèce, l’employeur réclamait le remboursement des jours de réduction du temps de travail prévus par la convention de forfait en jours. La Cour d’appel le déboute de sa demande au motif que la convention de forfait est simplement privée d’effet, et non annulée, de sorte que le salarié ne peut être privé de l’octroi des jours de réduction du temps de travail.

La décision est cassée par la Cour de cassation sur le fondement de l’action en répétition de l’indu prévue à l’article 1376 (devenu 1302-1) du Code civil. Pour la Cour de cassation, la convention de forfait en jours étant privée d’effet, le paiement des jours de réduction du temps de travail accordés en contrepartie de l’exécution de la convention de forfait est devenu indu.

Cette solution opère un rééquilibrage entre les droits de l’employeur et ceux des salariés lorsque la convention de forfait est privée d’effet : d’un côté, le salarié est en droit de réclamer le paiement de rappels de salaire à titre d’heures supplémentaire, dès lors qu’il prouve les avoir effectivement réalisée, de l’autre, l’employeur peut désormais réclamer le remboursement des jours de réduction du temps de travail dont a bénéficié le salarié en application de sa convention de forfait.

1502, 2021

Heures supplémentaires : le partage de la preuve n’exempte pas l’employeur de son obligation de contrôle de la durée du travail

L’article L. 3171-4 du code du travail dispose qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

En application de ce texte, la Cour de cassation imposait jusqu’alors au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à « étayer sa demande » relatifs aux heures de travail qu’il prétendait avoir accomplies.

Depuis un arrêt du 18 mars 2020, (Cass. soc. 18 mars 2020, n°18-10.919, P+B+R+I), la Cour de cassation a abandonné le terme « étayer » et impose désormais au salarié de produire « des éléments suffisamment précis (…) afin de permettre à l’employeur (…) d’y répondre utilement ».

Par un arrêt du 27 janvier 2021 (Cass. soc. 27 janvier 2021, n° 17-31.046, FP-P-R+I), la chambre sociale de la Cour de cassation est venue réaffirmer la solution précédemment dégagée quant au contrôle qu’elle exerce sur cette notion « d’éléments suffisamment précis » présentés par le salarié.

En l’espèce, le salarié fournissait à l’appui de sa demande d’heures supplémentaires un décompte des heures de travail qu’il indiquait avoir accomplies durant la période considérée, lequel mentionnait, jour par jour, les heures de prise et de fin de service, ses rendez-vous professionnels, le nombre d’heures de travail quotidien et le total hebdomadaire.

Prenant en compte ces éléments, la Cour d’appel considère que le décompte fourni par le salarié était insuffisamment précis en ce qu’il ne mentionnait pas la prise éventuelle d’une pause méridienne. Elle retenait néanmoins, que l’employeur admettait lui-même « ignorer le nombre d’heures accomplies par le salarié et ne pas les contrôler ».

Or, pour la Cour de cassation, le fait que le décompte du salarié ne précisait pas la prise d’une pause méridienne n’était pas de nature à remettre en cause la précision de ce décompte auquel l’employeur pouvait « répondre utilement » si tant est qu’il ait assuré un contrôle de la durée de travail, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Sur ce point, la note explicative de la Cour de cassation précise que la notion d’éléments suffisamment précis « ne peut avoir pour effet de faire peser la charge de la preuve des heures accomplies sur le seul salarié, ni de contraindre ce dernier à indiquer les éventuelles pauses méridiennes qui auraient interrompu le temps de travail ».

Cet arrêt marque ainsi la volonté de la Cour de cassation de sensibiliser les entreprises sur le régime probatoire particulier des heures supplémentaires en insistant sur le devoir de l’employeur de contrôler la durée du travail de ses salariés.

2901, 2021

Les précisions du médecin du travail émises par courriel sur le reclassement du salarié inapte concourent à la justification de l’impossibilité de reclassement

En application de l’article L.1226-10 du code du travail, lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis du CSE, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise.

Par un arrêt du 6 janvier 2021(Cass. soc. 6 janvier 2021, n°19-15.384, F-D), la chambre sociale de la Cour de cassation est venue réaffirmer qu’après le constat de l’inaptitude du salarié, les réponses apportées par le médecin du travail aux interrogations de l’employeurs sur les possibilités éventuelles de reclassement, concourent à la justification par l’employeur de l’impossibilité de remplir cette obligation.

Ainsi, ces précisions du médecin du travail, quand bien même elles seraient émises par courriel, participent au respect de la recherche de reclassement opérée par l’employeur.

Cet arrêt illustre l’importance pour l’employeur de demander des précisions au médecin du travail sur les possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte. Ces précisions sont une preuve supplémentaire qu’il a rempli avec loyauté son obligation de reclassement et sont donc opposables au salarié.

Enfin, il semble préférable d’informer le salarié des précisions émises par le médecin du travail afin de lui permettre, le cas échéant, d’exercer un recours auprès de l’inspection du travail. Dans cette hypothèse, le salarié ne pourra plus avancer un défaut d’information l’ayant empêché d’exercer son recours dans les temps.

2901, 2021

La présidence du CSE peut être assurée par un salarié mis à disposition

Si la présidence du CSE est généralement assurée par l’employeur, pour des raisons de disponibilités, ce dernier peut décider de déléguer cette attribution. Le délégataire doit alors disposer de la qualité et des pouvoirs nécessaires pour informer et consulter utilement l’instance. A défaut de tels prérogatives, un délit d’entrave peut être constitué (Cass.crim, 20 février 1996, n°94-85.863).

Dans un arrêt rendu le 25 novembre 2020 (Cass.soc., 25 novembre 2020, n°19-18.681), la Cour de cassation a précisé, pour la première fois, que la présidence du Comité d’entreprise peut être déléguée à des personnes qui ne sont pas salariées de l’entreprise, à certaines conditions toutefois.

En l’espèce, le Comité d’entreprise d’une association a saisi le Tribunal judiciaire pour constater la délégation de la présidence de l’instance à des salariés mis à disposition.

Au visa l’article L2325-1 alinéa 2 (devenu L2315-23) du Code du travail, la Cour de cassation précise que l’employeur peut déléguer la présidence de l’instance à un salarié mis à disposition sous réserve que ce dernier ait la qualité et le pouvoir nécessaires à l’information et à la consultation de l’institution représentative du personnel, de nature à permettre l’exercice effectif des prérogatives de celle-ci

Concrètement, ces salariés assuraient respectivement des fonctions de chargé de mission du président pour la direction opérationnelle et stratégique de l’association et chargé de gestion des ressources humaines. Il ressortait des conventions de mise à disposition que ces salariés étaient investis de l’autorité nécessaire pour l’exercice de leur mission et qu’ils disposaient de la compétence et des moyens pour permettre d’apporter des réponses utiles et nécessaires à l’instance et d’engager l’association dans ses déclarations ou ses engagements. En conséquence, la Cour de cassation a approuvé leur désignation pour la présidence du Comité d’entreprise de l’Association.

Parfaitement transposable à la présidence du CSE, cette solution nécessite toutefois de se pencher attentivement sur les conditions de sa mise en œuvre, comme le démontre le constat réalisé par la Cour de cassation (et rappelé au paragraphe précédent) pour aboutir à sa solution.

2212, 2020

Coemploi : une notion redéfinie mais toujours exceptionnelle

Lorsqu’une société (mère en général) s’immisçait dans la gestion économique et sociale d’une autre (une filiale souvent) la notion de coemploi était fréquemment mobilisée par les salariés de la filiale qui cherchaient alors à engager la responsabilité de la société-mère, en tant que coemployeur, afin qu’elle devienne débitrice des obligations sociales (notamment en termes de rupture des contrats de travail) à leur égard.

La situation de coemploi devant rester exceptionnelle, la Cour de cassation avait alors posé un cadre restrictif à la reconnaissance de ces situations pour freiner ce contentieux abondant :

  • Elle exigeait en effet que soit caractérisée « une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale » entre les deux sociétés coemployeuses (Cass.soc., 2 juillet 2014, n°13-15.208) ;
  • Dans le même temps elle réservait le fait que dans le cadre d’un groupe « il existait une nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à ce groupe » et un « état de domination économique que cette appartenance peut engendrer ».

Face à la difficulté pour les juges du fond d’appréhender ces critères pour caractériser l’existence ou non d’une situation de coemploi, la Cour de cassation a décidé de redéfinir les éléments constitutifs du coemploi dans un arrêt en date du 25 novembre 2020 (Cass.soc., 25 novembre 2020, n°18-13.769).

Le critère de la triple confusion d’intérêts, d’activités et de direction entre la société mère et ses filiales est désormais abandonné au profit d’une nouvelle définition : l’immixtion permanente de la société-mère dans la gestion économique et sociale et la perte totale de l’autonomie de la filiale

La Cour de Cassation a adjoint à son arrêt une note explicative, aux termes de laquelle elle souligne que la nouvelle définition adoptée ne remet absolument pas en cause le caractère exceptionnel de la reconnaissance d’une situation de coemploi.

212, 2020

Trois décrets adaptent l’activité partielle et l’activité partielle longue durée

Trois décrets parus au Journal Officiel du 31 octobre 2020 (dont un spécifique pour Mayotte) apportent des adaptations aux dispositifs d’activité partielle et d’activité partielle longue durée (décret n°2020-1316 du 30 octobre 2020 – décret n°2020-1318 du 30 octobre 2020 – décret n°2020-1319 du 30 octobre 2020). Le cabinet Norma avocats fait le point sur les principales évolutions.

Activité partielle

  • Information du CSE: Depuis le 1er novembre, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le CSE doit être informé des conditions dans lesquelles l’activité partielle a été mise en œuvre à l’échéance de chaque de recours à l’activité partielle.
  • Durée de l’autorisation d’activité partielle: A compter du 1er janvier 2021, la durée de l’autorisation du recours à l’activité partielle est réduite de 12 à 3 mois. Elle peut être renouvelée dans la limite de 6 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 12 mois consécutifs. Lorsque l’employeur a bénéficié d’une autorisation d’activité partielle avant le 1er janvier 2021, il n’est pas tenu compte de cette période pour l’application du dispositif. Cette disposition permet ainsi aux entreprises, qui avaient déjà bénéficié de l’activité partielle sur une période de 12 mois, de reformuler une demande auprès de l’administration.
  • Réduction de l’indemnité d’activité partielle : A compter du 1er janvier 2021, l’indemnité d’activité partielle versée au salarié par l’employeur devrait passer de 70% à 60% de sa rémunération brute dans la limite de 4,5 SMIC.
  • Réduction du taux d’allocation sauf dans les secteurs protégés: Jusqu’au 31 décembre 2020, le taux d’allocation d’activité partielle versée à l’employeur est fixé à 60% de la rémunération brute de référence, dans la limite de 4,5 SMIC. A compter du 1er janvier 2021, ce taux sera réduit à 36%. Ces réductions ne concernent pas les secteurs (listés par le décret n°2020-810 du 29 juin 2020) durement impactés par la crise sanitaire, qui bénéficient d’un taux d’allocation à 70%.

Activité partielle longue durée

  • Information du CSE et des organisations syndicales en cas de demande de remboursement par l’employeur ou de refus de remboursement par l’autorité administrative.
  • Le taux de l’allocation d’activité partielle de longue durée ne peut être inférieur au taux horaire de l’activité partielle auquel pourrait prétendre l’employeur. Cette disposition permet, le cas échéant, aux entreprises appartenant à l’un des secteurs protégés, qui ont eu recours à l’activité partielle de longue durée, de bénéficier du taux majoré prévu pour l’activité partielle.
1809, 2020

Protocole sanitaire en entreprise : ce qui change au 1er septembre

Face au rebond épidémique en France, le Gouvernement a renforcé le protocole sanitaire en entreprise. Tour d’horizon des nouvelles recommandations applicables au 1er septembre.

  • La recommandation du télétravail

Le protocole sanitaire continue de recommander le télétravail en ce qu’il participe à la démarche de prévention du risque épidémique et permet de limiter l’affluence dans les transports en commun.

  • La généralisation du port du masque en entreprise

Compte tenu des recommandations du Haut Conseil de Santé Publique (HCSP) en date du 28 août 2020, le port du masque grand public devient systématique et permanent au sein des entreprises dans les lieux collectifs clos (salle de réunion, lieu de restauration, couloirs, ascenseurs, vestiaires etc).

Toutefois, le protocole admet des exceptions au port systématique du masque en fonction du niveau de circulation du virus dans le département d’implantation de l’entreprise et de l’espace de travail des salariés.

S’agissant du niveau de circulation du virus, il est possible de retirer temporairement son masque dès lors que plusieurs conditions sont respectées :

  • Dans les zones « vertes » à faible circulation, quatre conditions doivent être réunies : ventilation/aération fonctionnelle et efficace – existence d’écrans de protection entre les postes de travail – mise à disposition de visières – politique sanitaire avec référent covid-19 et capacité à l’auto-éviction en cas de symptômes.
  • Dans les zones « orange » à circulation modérée, outre les quatre conditions précédentes, le port du masque par intermittence sera réservé aux entreprises disposant de grands locaux et d’une extraction d’air haute fonctionnelle et efficace.
  • Dans les zones « rouges » à circulation active du virus, outre les six conditions précédentes, la faculté de déroger au port du masque permanent ne sera réservée qu’aux locaux garantissant aux personnes un espace de 4m2.

S’agissant de l’espace de travail, pour les salariés travaillant dans des bureaux individuels, le port du masque ne s’impose pas. Dans les ateliers, il est possible de ne pas porter de masque dès lors que les conditions de ventilation et aération sont conformes à la réglementation, que le nombre de personnes présentes dans l’atelier est limité, que la distanciation sociale est respectée et que les salariés portent une visière en cas de déplacement. Enfin, pour les salariés travaillant en extérieur, le port du masque est nécessaire en cas de regroupement ou en cas d’impossibilité de respecter la distanciation sociale.

  • La désignation d’un référent Covid-19

Dans ce contexte de renforcement des mesures sanitaires, la désignation d’un référent covid-19, certes non obligatoire, apparaît comme essentielle dans la prévention des risques au sein de l’entreprise. Selon le protocole, il s’agit même d’une condition nécessaire pour pouvoir déroger au port systématique du masque dans l’entreprise.

408, 2020

Les mesures dérogatoires ayant pris fin avec l’état d’urgence sanitaire

La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 a instauré un état d’urgence sanitaire pour faire face aux conséquences de l’épidémie de covid-19.

Prolongé jusqu’au 10 juillet 2020 inclus par la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020, cet état d’urgence sanitaire a pris fin le 11 juillet 2020.

Pour faire face aux conséquences économiques et sociales de la covid-19, le Gouvernement avait apporté plusieurs aménagements en droit du travail et en droit de la sécurité sociale, notamment en matière de versement d’indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) et de complément employeur.

Une partie de ces règles dérogatoires s’appliquait seulement jusqu’à l’expiration de l’état d’urgence sanitaire. Ainsi depuis le 11 juillet, les règles dérogatoires suivantes ont cessé de s’appliquer :

  • Réunion du CSE par visioconférence sans limitation et ce même en l’absence d’accord, par conférence téléphonique ou messagerie instantanée ;
  • IJSS sans délai de carence pour les arrêts de travail sans lien avec la covid-19 ;
  • Indemnités complémentaires employeur pour les arrêts de travail sans lien avec la covid-19 sans délai de carence (la suppression de la condition d’ancienneté d’un an habituellement requise pour bénéficier de ce complément est toutefois maintenue jusqu’au 31 décembre 2020) ;
  • Pour les arrêts maladie intervenant entre le 12 mars et le 10 juillet, non prise en compte des durées d’indemnisations antérieure ; ni de celles intervenant entre le 12 mars et le 10 juillet pour le calcul de la durée totale d’indemnisation de 12 mois prévue à l’article D. 1226-4 du code du travail ;
  • Plafond d‘exonération fiscale pour les heures supplémentaires porté à 7 500€ au lieu de 5 000€ ;

La fin d’application de ces règles dérogatoires marque un retour progressif à la normale. D’autres règles dérogatoires devraient prendre fin en octobre et en décembre 2020.

Précisons toutefois que les règles dérogatoires précitées continuent à s’appliquer en Guyane et à Mayotte jusqu’au 30 octobre 2020, l’état d’urgence sanitaire ayant été prolongé jusqu’à cette date dans ces territoires (loi n° 2020-856 du 09 juillet 2020).

2206, 2020

La rupture conventionnelle du contrat de travail en période de confinement et de déconfinement – Article de Florent Millot et Clara Lefebvre dans la Semaine Juridique Sociale

Depuis sa mise en place en 2008, la rupture conventionnelle, qui permet aux parties de rompre d’un commun accord le contrat de travail, connaît un succès important. Aussi bien pendant la phase de confinement que de déconfinement, la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 n’a pas empêché les parties au contrat de travail de faire usage de ce mode de rupture. La procédure de rupture conventionnelle a toutefois été affectée et aménagée en conséquence. Analyses et préconisations de Clara Lefebvre et Florent Millot dans la Semaine Juridique Sociale du 16 juin 2020. 

2206, 2020

Activité partielle : Le gouvernement précise les secteurs qui feront l’objet d’un soutien renforcé

Suite aux annonces du Premier ministre le 14 mai, les entreprises des secteurs de l’hôtellerie, restauration, cafés, tourisme, événementiel, sport, culture, les entreprises de secteurs connexes, qui ont subi une très forte baisse d’activité à cause de la crise sanitaire, font l’objet d’un soutien renforcé par l’Etat. Dans l’attente du décret officialisant les nouvelles règles de calcul de l’allocation d’activité partielle pour les secteurs en difficulté, le Gouvernement a apporté des premières précisions.

Les activités bénéficiant de ce soutien renforcé sont classées en deux catégories :

  • Les secteurs d’activité soumis à des restrictions d’activité au-delà de la période du confinement (liste S1) : Il s’agit des secteurs comme l’hôtellerie, la restauration, les cafés, le tourisme, l’événementiel qui sont durablement affectés car ils sont soumis à des restrictions d’activité au-delà du 11 mai 2020 ;
  • Les secteurs d’activité « connexes » qui dépendent de ces activités (liste S1 bis) : Pour bénéficier des mesures renforcées, ces entreprises doivent avoir subi une perte de chiffre d’affaires de 80% sur la période allant du 15 mars au 15 mai 2020. Cette diminution s’appréciera sans doute en comparant le chiffre d’affaires actuel avec celui réalisé sur la même période de l’année 2019.

Ces entreprises, quelle que soit leur taille, pourront alors continuer à bénéficier d’une prise en charge à 100% de l’indemnité d’activité partielle jusqu’en septembre. Pour mémoire, pour les entreprises relevant d’autres secteurs d’activité, depuis le 1er juin, l’allocation d’activité partielle, ne couvre plus que 60% du salaire brut du salarié alors que l’indemnité versée au salarié doit toujours être au moins égale à 70%.

1506, 2020

Retour sur les principales actualités liées à l’épidémie de Covid-19 (Partie 2)

Suite du décryptage des ordonnances annoncées : Dans le prolongement de la loi d’urgence du 23 mars 2020 pour faire face au Covid-19, le Conseil des ministres a continué à adopter, le 1er avril 2020, une série de mesures sociales. Analyse des ordonnances concernant la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, la médecine du travail, l’activité partielle, la formation professionnelle, les élections professionnelles et le fonctionnement des institutions représentatives du personnel.

Premiers ajustements des dispositifs de gestion de la crise sanitaire : Face à l’ampleur de la crise sanitaire, le Gouvernement a adapté les dispositifs juridiques pour contenir les conséquences des mesures de confinement et du ralentissement de l’activité économique. Le champ d’application de l’activité partielle été élargi, le régime d’arrêts de travail a été aménagé pour les salariés se trouvant dans l’impossibilité d’exercer leur activité à cause de la crise sanitaire, les règles et les délais de la négociation collective ont été assouplies. Détails de ces premiers ajustements.

Suite des adaptations des dispositifs de gestion de la crise sanitaire : Le Gouvernement poursuit ces aménagements en prévoyant notamment la possibilité de moduler le montant de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat aux conditions de travail liées au Covid-19, en individualisant le recours à l’activité partielle, en organisant le passage des salariés en arrêts de travail vers l’activité partielle. Retour sur les dernières adaptations sociales.

Prolongation de l’Etat d’urgence sanitaire et adoption de diverses mesures sociales : La loi n°2020-546 du 11 mai 2020 proroge l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet inclus et complète ses dispositions. Retour sur les impacts sociaux de la prolongation de l’état d’urgence sanitaire.

3103, 2020

Délais de consultation : La prorogation ou la fixation d’un nouveau délai peut être décidée par le juge saisi en cas d’insuffisance de l’information, sous condition toutefois.

La procédure d’information-consultation des institutions représentatives du personnel est encadrée, à défaut d’accord, par les délais prévus à l’article R.2312-6 du Code du travail, aux termes desquels le CSE est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif. Ces délais commencent à courir à compter du moment où le CSE a reçu de la part de l’employeur des informations en vue de sa consultation (art. R2312-5 du même code). Si les membres du CSE estiment ne pas disposer d’éléments suffisants, ils peuvent saisir le président du Tribunal Judiciaire, statuant en la forme des référés, pour qu’il ordonne la communication des éléments manquants.

La Cour de cassation a strictement encadré les conditions de cette saisine en exigeant que celle-ci intervienne avant l’expiration du délai de consultation. Elle avait également jugé qu’aucune disposition légale n’autorisait le juge à accorder un nouveau délai, de sorte que ce dernier devait nécessairement statuer sur la demande de prolongation de délai avant l’expiration du délai initialement imparti au CE (Cass.soc., 21 septembre 2016, n°15-19.003). La saisine n’ayant pas pour effet de prolonger le délai de consultation du CE,  cette solution avait pour conséquence, dans un certains cas, de priver le recours du CE de toute effectivité pour des motifs tenant uniquement au fonctionnement de la juridiction (le juge devant statuer dans un délai de 8 jours, ce qui est très court eu égard à l’engorgement des juridictions).

Dans son arrêt du 26 février 2020, la Cour de cassation opère un revirement et adopte une position pragmatique parfaitement transposable au CSE. Tout en maintenant la nécessité pour l’institution de saisir le juge avant l’expiration du délai initial, elle ouvre la possibilité pour ce dernier de, soit prolonger le délai de consultation s’il est toujours en cours, soit, dans le cas contraire, de fixer un nouveau délai (Cass.soc., 26 février 2020, 18-22.759). Cette solution équilibrée permet de redonner à la consultation des institutions représentatives du personnel toute son effectivité, tout en conservant l’aspect de sécurisation qui avait été à l’origine de la mise en place des délais de consultation puisque, sans recours dans ce délai, le CSE ne pourra plus saisir le juge.

603, 2020

L’obligation de prévention des risques professionnels est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral

L’employeur doit prévenir tous les risques professionnels dans l’entreprise, y compris celui de harcèlement moral. A défaut, il s’expose à des dommages et intérêts pour manquement à son obligation de sécurité, et ce même si aucun fait de harcèlement moral n’est avéré (Cass.soc., 27 novembre 2019, n°18-10.551).

Dans cette affaire, une salariée en arrêt de travail pour maladie avait adressé à son employeur un courrier dans lequel elle prétendait être victime de harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique. Licenciée pour insuffisance professionnelle, elle a saisi la juridiction prud’homale aux fins de voir condamner la société au paiement de diverses sommes notamment pour harcèlement moral et violation de l’obligation de sécurité et de loyauté.

Pour rejeter sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité, la Cour d’appel a retenu qu’aucun agissement répété de harcèlement moral n’ayant été établi, il ne pouvait être reproché à l’employeur de ne pas avoir diligenté une enquête et donc d’avoir manqué à son obligation de sécurité.

La Cour de cassation censure ce raisonnement en rappelant que « l’obligation de prévention des risques professionnels est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l’article L.1152-1 du Code du travail et ne se confond pas avec elle ». L’employeur aurait dû prendre des mesures de prévention adaptées aux faits dénoncés par la salariée.

Cette solution s’inscrit dans la droite ligne de sa jurisprudence antérieure dans laquelle elle distinguait clairement l’obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l’article L.4121-1 du Code du travail, et la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l’article L.1152-1 du même code (Cass.soc., 6 décembre 2017, n°16-10.885). Dès lors, indépendamment de la qualification de harcèlement moral, l’absence de toute mesure destinée à prévenir une situation de souffrance au travail est susceptible d’être sanctionnée au titre d’un manquement à l’obligation de sécurité.

502, 2020

Le contrôle de l’activité des salariés par un dispositif de surveillance

Dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur est en droit de contrôler et de surveiller l’activité de ses salariés pendant le temps de travail. Pour être légitime, ce contrôle doit toutefois s’effectuer dans le strict respect des droits individuels et collectifs des salariés dans l’entreprise. L’employeur doit informer les salariés de l’existence d’un dispositif de surveillance (art. L1222-4 du Code du travail) et informer-consulter le comité social et économique préalablement à la décision de mise en œuvre dans l’entreprise (art. L2312-38 du même code).

A l’occasion de deux arrêts, la Cour de cassation rappelle l’obligation pour l’employeur de respecter les exigences posées par la loi lorsque le système de surveillance a pour finalité le contrôle de l’activité des salariés. A défaut, il ne peut pas se prévaloir des enregistrements pour prouver la faute du salarié (Cass.soc., 11 décembre 2019, n°17-24.179Cass.soc., 11 décembre 2019, n°18-11.792).

Dans la première affaire, le dispositif n’a pas été installé pour contrôler l’activité des salariés. C’est fortuitement que l’employeur a découvert les faits. Un agent de surveillance est licencié pour faute grave après avoir été accusé de tentative de vol par un client dont il était chargé de surveiller les locaux. Le système de vidéo-surveillance installé dans le sous-sol de l’entreprise cliente avait effectivement capté des images du salarié entrain de fracturer un placard de marchandises. La cour d’appel s’est basée sur l’absence d’information du salarié quant à l’existence des caméras pour écarter les enregistrements comme moyen de preuve. La Cour de cassation casse la décision au motif que le système de vidéosurveillance n’était pas utilisé pour contrôler l’activité du salarié, l’employeur n’avait donc pas l’obligation de l’en informer préalablement.

Dans la seconde affaire, l’employeur se servait du dispositif de surveillance pour contrôler l’activité de ses salariés. Un salarié a été licencié pour faute grave pour avoir consulté les comptes de clients ne relevant pas de son portefeuille, ce qui était contraire aux procédures internes de sécurité. L’employeur avait découvert les faits grâce à l’utilisation du logiciel informatique qui était également doté d’un outil de traçabilité permettant de restituer l’ensemble des consultations effectués par les salariés. Les juges du fond, dont le raisonnement est approuvé par la Cour de cassation, ont relevé que le dispositif était utilisé pour contrôler l’activité des salariés et qu’à ce titre il aurait dû informer et consulter les représentants du personnel. En l’absence d’une telle information-consultation, l’employeur ne peut se prévaloir des éléments recueillis pour établir la faute du salarié.

2401, 2020

L’encadrement de l’activité des plateformes de mise en relation par le Conseil constitutionnel

La loi n°2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités prévoit de renforcer la responsabilité sociale des plateformes de mise en relation par voie électronique. Parmi les différentes propositions relatives aux plateformes de chauffeurs VTC et de livreurs de marchandises (articles L. 1326-1 à L.1326-4 du Code des transports), ces dernières ont désormais la possibilité de conclure une charte déterminant  » les conditions et modalités d’exercice de [leur] responsabilité sociale, définissant [leurs] droits et obligations ainsi que ceux des travailleurs avec lesquels elles [sont] en relation ».

La loi dresse alors la liste des mentions devant apparaitre dans la charte (article L.7342-9 du Code du travail). Y figure notamment les conditions d’exercice de l’activité professionnelle des travailleurs avec lesquels la plateforme est en relation, les modalités visant à permettre aux travailleurs d’obtenir un prix décent pour leur prestation de service, les modalités de développement des compétences professionnelles et de sécurisation des parcours professionnels etc.

Une fois établie, la charte fait l’objet d’une consultation des travailleurs puis est transmise à l’autorité administrative pour homologation. Lorsqu’elle est homologuée, l’établissement de la charte et le respect des engagements énumérés à l’article L.7342-9 du Code du travail « ne peuvent caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique entre la plateforme et les travailleurs ».

Saisi sur la portée juridique de la charte lorsqu’elle est homologuée, le Conseil constitutionnel a censuré partiellement ce dispositif. En effet, il considère que le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence en faisant en sorte que soient exclus des éléments pouvant être retenus par le juge pour caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique et, par voie de conséquence, l’existence d’un contrat de travail, les éléments portés par la plateforme dans la charte rédigée par elle-même.

En revanche, il n’a pas méconnu l’étendu de sa compétence en prévoyant que la seule existence de la charte homologuée ne peut, en elle-même et indépendamment de son contenu, caractériser un lien de subordination juridique (Décision n°2019-794 du 20 décembre 2019).

L’objectif de sécurisation juridique des relations entre plateformes et travailleurs que se fixait la loi du 24 décembre 2019 n’est donc pas totalement atteint. Certes, la charte permettra une régulation sociale dans les secteurs concernés, en espérant ainsi que l’enjeux autour du statut des travailleurs soit moins prégnant (contrat de travail ou indépendance). En revanche, la position du Conseil constitutionnel exclut une sécurisation renforcée qui aurait été atteinte du fait de la loi et de l’existence d’une charte.

2511, 2019

Salarié protégé : la date de convocation à l’entretien préalable détermine la procédure à suivre

La loi accorde une protection particulière aux représentants du personnel pendant l’exécution de leur mandat et à l’expiration de celui-ci (art. L.2411-1 et suivants du Code du travail). En effet, si l’employeur souhaite licencier un salarié protégé pendant cette période, il doit demander préalablement l’autorisation de l’inspecteur du travail.

Le Code du travail ne précise pas si l’inspecteur doit être saisi lorsque la protection expire pendant la procédure de licenciement et avant la notification du licenciement.

A l’occasion de son arrêt du 23 octobre 2019, la Cour de cassation a rappelé un principe qu’elle avait précédemment posé (Cass.soc., 26 mars 2013, n°11-27.964), selon lequel la protection d’un représentant du personnel s’apprécie à la date de convocation à l’entretien préalable (Cass.soc., 23 octobre 2019, n°18-16057).

En l’espèce, un ancien délégué du personnel, a été convoqué à un entretien préalable avant l’expiration de la protection. Une fois la protection expirée, l’employeur lui a notifié son licenciement, mais sans avoir, au préalable, saisi l’Inspecteur du travail d’une demande d’autorisation.

Pour la Cour de cassation le licenciement notifié sans autorisation de l’inspecteur du travail est irrégulier : le salarié bénéficiait d’une protection lors de sa convocation à l’entretien préalable. Il importait peu, par ailleurs, que l’employeur, dans la lettre de licenciement, retienne des faits commis postérieurement à l’expiration de la période de protection.

 

 

1811, 2019

Opérations de recrutement : quelles précautions prendre ? – Article de Florent Millot dans le magazine Chef d’Entreprise

Le recrutement est une opération délicate du point de vue humain mais qui peut également le devenir du point de vue juridique si quelques précautions ne sont pas observées : discrimination, débauchage et concurrence déloyale. Autant de notions qu’il faut avoir à l’esprit à chaque étape du parcours de recrutement.

Des précisions apportées par Florent Millot, Avocat Associé chez Norma Avocats, au Magazine Chef d’Entreprise.

1311, 2019

Validation d’un accord minoritaire : des précisions inédites sur le référendum

Depuis le 1er mai 2018, la validité des accords collectifs repose sur un principe majoritaire.

Dans le cas où un accord collectif n’est pas majoritaire mais a été signé par une ou des organisations syndicales représentatives ayant obtenu moins de 50% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections professionnelles mais au moins 30%, l’accord peut tout de même être « sauvé ». En ce cas, il doit être approuvé par référendum par les salariés (art. L 2232-12 alinéa 2 du Code du travail). Dans un arrêt du 9 octobre 2019, la Cour de cassation se prononce pour la première fois sur les conditions de mise en œuvre du référendum (Cass.soc., 9 octobre 2019, n°19-10.816) :

  • Sur l’absence de notification aux autres syndicats de la demande de référendum (prévu à l’article L.2232-12 du Code du travail), la Cour de cassation rappelle que la notification aux autres organisations syndicales représentatives a seulement pour objet de fixer le point de départ du délai de huit jours visant à obtenir des signatures complémentaires. En conséquence, l’absence de notification n’est pas de nature à vicier la procédure de référendum. Par ailleurs, elle précise que si la carence du syndicat est supplée par l’employeur (en l’espèce, l’employeur avait lui-même effectué la notification), ce dernier ne manque pas à son obligation de neutralité. Son intervention ne peut emporter l’annulation du référendum.
  • Sur la participation des salariés au référendum, la Cour de Cassation énonce qu’en présence d’un accord minoritaire intercatégoriel, certains électeurs ne peuvent être écartés du référendum sous prétexte qu’il s’agit de salariés qui ne sont pas couverts ou directement concernés par les dispositions de l’accord.

Une exception est toutefois posée par la Cour de cassation pour les accords minoritaires catégoriels avec le renvoi opéré à l’article L.2232-13 du Code du travail au terme duquel si l’accord concerne uniquement le personnel relevant « d’une catégorie professionnelle déterminée », la consultation ne sera menée qu’auprès des seuls salariés électeurs relevant de ce collège.

Ces précisions sont les bienvenues car l’ordonnance n°2017-1385 du 22 septembre 2017 est silencieuse quant aux salariés qui doivent être consultés lorsqu’un accord est soumis à référendum.

 

 

711, 2019

Le protocole d’accord préélectoral doit être négocié loyalement

Préalablement à l’organisation des élections professionnelles, l’employeur doit négocier un protocole d’accord préélectoral avec les organisations syndicales dont le champ professionnel et géographique couvre celui de l’entreprise, qu’elles y soient représentatives ou non (article L. 2314-5 du code du travail).

La négociation de ce protocole d’accord préélectoral permet, notamment, de fixer le nombre de sièges à pourvoir et de répartir le personnel et les sièges entre les différents collèges (article L. 2314-13 du code du travail).

Ces éléments de négociation dépendant de l’effectif de l’entreprise, et dans un esprit de loyauté des négociations, la Cour de cassation impose à l’employeur de fournir aux organisations syndicales présentes qui le demandent, les éléments permettant de contrôler les effectifs et la régularité de la liste électorale (Cass.Soc. 06 janvier 2016 n° 15-10.975). En pratique, cette communication se fait en transmettant le registre du personnel ou la déclaration sociale nominative, expurgée le cas échéant, des éléments confidentiels (notamment la rémunération).

Dans le présent arrêt (Cass.Soc. 09 octobre 2019 n° 19-10.780), la Cour de cassation précise pour la première fois les conséquences que peut avoir, sur le protocole d’accord préélectoral, le refus de communiquer ces éléments à une organisation syndicale, y compris non représentative dans l’entreprise. Elle considère que ce refus de communication constitue un manquement de l’employeur à son obligation de loyauté dans la négociation et entraîne la nullité du protocole d’accord préélectoral.

Elle se détache ainsi de sa précédente jurisprudence dans laquelle elle subordonnait la nullité du protocole d’accord préélectoral à la preuve de stipulations contraires à l’ordre public, et ce même si l’employeur avait refusé de communiquer aux syndicats négociateurs les éléments leur permettant de contrôler les effectifs et la régularité de la liste électorale (Cass.Soc. 04 mai 2017 n° 16-18.297).

Par ailleurs, il est intéressant de souligner que la Cour de cassation précise également que la contestation peut être introduite soit avant le premier tour des élections, soit postérieurement à celui-ci par un syndicat n’ayant pas signé le protocole et ayant émis des réserves expresses avant de présenter des candidats.

2310, 2019

Une erreur dans l’invitation à négocier l’accord préélectoral peut causer l’annulation des élections professionnelles

Une erreur matérielle dans l’invitation à négocier le protocole d’accord préélectoral peut conduire à l’annulation des élections professionnelles. Telle est la solution retenue par la Cour de cassation dans un arrêt du 25 septembre 2019 (Cass.soc., 25 septembre 2019, n°18-23.487)

Lorsqu’il organise des élections professionnelles au sein de son entreprise, l’employeur doit inviter les syndicats intéressés à négocier le protocole d’accord préélectoral. Cette invitation doit leur parvenir au plus tard 15 jours avant la date de la première réunion de négociation (art. L.2314-5 du Code du travail).

En l’espèce, la lettre d’invitation à négocier le protocole d’accord préélectoral, reçue par le syndicat le 5 avril 2018, fixait la date de la réunion de négociation au « mardi 24 16 avril 2018 ». Considérant qu’il n’était pas en mesure de vérifier si le délai de 15 jours entre la réception de l’invitation et la date de la première réunion avait été respecté, le tribunal d’instance a annulé les élections.

La Cour de cassation approuve ce raisonnement en déduisant, du fait de la mention de deux dates distinctes sur l’invitation, que le syndicat n’avait pas été régulièrement convié à la négociation du protocole d’accord préélectoral.

La vigilance est donc de mise lors de la rédaction l’invitation. L’erreur matérielle, qui peut paraître anodine, a, en l’espèce, entraîné l’annulation des élections.

1810, 2019

Effectifs : attention aux modalités de décompte des salariés à temps partiel

Afin de décompter ses effectifs, notamment en vue des élections professionnelles, l’employeur doit prendre en compte les salariés à temps partiel en divisant la somme totale de leurs horaires de travail par la durée légale ou conventionnelle de travail.

Mais quels « horaires de travail » faut-il prendre en compte ?

La loi est claire, puisqu’elle vise les « horaires inscrits dans leurs contrats de travail » (article L.1111-2 du Code du travail). Mais la Cour de cassation vient de décider qu’il fallait prendre en compte « la durée de travail mensuelle effectivement accomplie par les salariés à temps partiel » (Cass.Soc. 25 septembre 2019 n° 18-60.206).

En pratique, cela signifie qu’outre les heures contractuelles, il faudra intégrer les heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel, ou encore les heures effectuées dans le cadre d’une modification temporaire de la durée de travail par avenant (que celle-ci s’inscrive dans le cadre du complément d’heures temporaire prévu par un accord de branche étendu ou non).

Selon le nombre de salariés à temps partiel et le volume des heures qu’ils auront effectivement réalisées, cela peut aller jusqu’à impacter le nombre de titulaires au CSE puisqu’il dépend de la tranche d’effectif dans laquelle se situe l’entreprise.

Dans tous les cas, la charge de la preuve de l’effectif de l’entreprise pèse sur l’employeur.

1704, 2019

Salariés en déplacement : attention à la prise en charge des frais professionnels.

Par principe, l’employeur a l’obligation de prendre en charge les frais exposés par ses salariés pour les besoins de l’activité de l’entreprise.

Tel n’est pas le cas des frais de transport domicile-travail exposés par le salarié qui utilise son véhicule personnel. Dans ce cas, la prise en charge des frais par l’employeur demeure facultative (article L. 3261-3 du Code du travail).

Dans un arrêt du 23 janvier 2019 (Cass. Soc., 17-19.779), la Cour de cassation précise toutefois que l’employeur a l’obligation d’indemniser les frais de déplacement exposés par un salarié lorsque :

  • Le contrat de travail indique que le salarié est rattaché contractuellement au siège de la société ;
  • Le salarié a toujours été affecté à des sites variés dont la distance est très supérieure à la distance entre son domicile et le siège de la société ;
  • Les nombreux déplacements de courte durée mais à des distances considérables du siège de l’employeur ne permettent pas l’utilisation des transports en commun ;
  • Les déplacements du salarié, inhérents à son emploi, sont effectués pour les besoins de l’employeur.

Si toutes ces conditions sont réunies, les déplacements effectués par le salarié pour se rendre sur les différents sites ne peuvent pas être assimilés à des trajets habituels domicile-travail et doivent par conséquent être indemnisés.

1701, 2019

Mise en œuvre d’une procédure de licenciement et importance d’établir un procès-verbal de carence

Dans un arrêt du 17 octobre 2018, la Cour de cassation a jugé que l’employeur qui met en œuvre une procédure de licenciement économique, alors qu’il n’a pas accompli, bien qu’il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel et sans qu’un PV de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés. (suite…)

1307, 2018

Le médecin du travail peut être sanctionné s’il établit un certificat médical tendancieux

Les médecins généralistes qui établissent des certificats médicaux de complaisance ou tendancieux ne sont pas les seuls à pouvoir être sanctionnés : leurs confrères, médecins du travail, ne sont pas épargnés. Le 6 juin 2018, le Conseil d’état a confirmé l’avertissement notifié par le Conseil de l’ordre à un médecin du travail qui avait établi un certificat tendancieux. (suite…)

603, 2018

Attention au rattrapage salarial après un congé maternité

Au retour d’un congé maternité, la salariée doit bénéficier d’une majoration de sa rémunération dans des proportions au moins égales à la moyenne des augmentations individuelles pratiquées pendant le congé par les salariés de la même catégorie professionnelle, ou à défaut de la moyenne des augmentations individuelles dans l’entreprise (article L. 1225-26 du Code du travail). (suite…)

Actualité du dialogue social

1211, 2021

Tous les salariés placés en télétravail ont droit aux mêmes avantages

En principe, la mise en place du télétravail se fait par accord collectif, ou à défaut, par le biais d’une charte unilatérale (article L1222-9 du Code du travail). En l’absence d’accord collectif ou de charte, lorsque le salarié et l’employeur conviennent de recourir au télétravail, ils formalisent leur accord par tout moyen.

Toutefois, en cas de circonstances exceptionnelles (notamment en cas d’épidémie) l’employeur peut déroger à ces principes de mise en œuvre et imposer à ses salariés de télétravailler (article L1222-11 du Code du travail).

Les différents régimes juridiques de télétravail peuvent-ils alors justifier une distinction d’indemnisation entre les salariés ? Dans un jugement en date du 28 septembre 2021, le Tribunal judiciaire de Paris apporte un premier volet de réponses sous le prisme de l’égalité de traitement (TJ Paris 28 septembre 2021, n°21/06097)

En l’espèce, à compter du 16 mars 2020, tous les salariés d’une entreprise ont été placés en télétravail suite à l’état d’urgence sanitaire mais  seul les salariés signataire d’un avenant à leur contrat de travail (dans le cadre de l’application de l’accord collectif télétravail qui avait été signé au sein de cette entreprise le 3 janvier 2020) ont bénéficié d’une indemnisation à hauteur de 5 euros bruts par jour télétravaillé.

Le Tribunal judiciaire de Paris a rappelé que le principe d’égalité de traitement ne s’opposait pas à ce que soient réglées de façon différente des situations différentes et que seules des raisons objectives et pertinentes matériellement vérifiables et en rapport avec l’objet de l’avantage octroyé pouvaient justifier une différence de traitement.

Ayant relevé que l’ensemble des salariés se trouvaient sous le même régime juridique de mise en œuvre du télétravail, le Tribunal judiciaire a jugé qu’une différence de traitement fondée sur le versement d’une indemnité de télétravail uniquement aux salariés signataires d’un avenant ne saurait constituer une raison objective puisqu’elle repose sur une exécution déloyale de l’accord collectif. En effet, le Tribunal judiciaire a constaté qu’à partir du 16 mars 2020, l’employeur avait systématiquement refusé toutes les demandes de signature d’un avenant de mise en place du télétravail régulier, tel que prévu par l’accord collectif. En conséquence, le Tribunal judiciaire a condamné l’employeur à verser à tous les salariés en télétravail du fait de la crise sanitaire, l’indemnité prévue par l’accord collectif pour tous les jours télétravaillés.

Il convient alors de porter une attention particulière à la rédaction des accords collectifs relatifs au télétravail en précisant dans quelles circonstances les dispositions conventionnelles ont vocation à être appliquées, aménagées, ou écartées.

2809, 2021

Loi pour renforcer la prévention en santé au travail : focus sur le DUERP

La loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail a été publiée au Journal officiel le 3 août 2021. Elle transpose notamment les stipulations de l’Accord National Interprofessionnel sur la santé au travail du 9 décembre 2020 relatives au document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). Voici un petit focus sur certaines dispositions de la loi concernant ce DUERP.

Le contenu du DUERP est désormais défini

Le nouvel article L4121-3-1 du Code du travail précise que le DUERP répertorie l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs et assure la traçabilité collective de ces expositions. Une fois les risques professionnels identifiés, l’employeur doit transcrire les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs pour définir les mesures de prévention nécessaires. L’étendue de cette obligation varie selon l’effectif de l’entreprise :

  • Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, ces résultats devront déboucher sur un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail.
  • Dans les entreprises de moins de 50 salariés, ces résultats doivent déboucher sur la définition d’action de prévention des risques et de protection des salariés, consignées dans le DUERP.

Le CSE devra être consulté sur le DUERP et ses mises à jour

Outre son concours à l’analyse des risques professionnels, le CSE devra désormais être consulté sur le DUERP et ses mises à jour. En fonction de l’effectif de l’entreprise, l’employeur devra lui présenter le contenu du programme annuel ou les actions de prévention.

Conservation du DUERP

Les versions successives du DUERP devront être conservées par l’employeur et mis à la disposition des salariés, des anciens salariés ainsi que de toutes personnes ou instance pouvant justifier d’un intérêt à y avoir accès.

Le DUERP devra être conservé au moins 40 ans. Pour cela, le DUERP et ses mises à jour feront l’objet d’un dépôt dématérialisé sur un portail numérique déployé par les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel. Dans un premier temps, cette obligation ne sera opposable qu’aux entreprises d’au moins 150 salariés à compter du 1er juillet 2023. Elle se généralisera, dans un second temps, auprès des entreprises ayant un effectif inférieur au plus tard le 1er juillet 2024.

1607, 2021

Un délégué syndical peut diffuser, via un tract syndical, la grille des salaires de l’entreprise qui lui a été communiquée lors de la NAO

C’est à l’occasion de la diffusion, par un délégué syndical, d’un tract reprenant les rémunérations minimales, moyennes, médianes et maximales par coefficient appliquées par une entreprise, que le Tribunal judiciaire de Paris s’est prononcé, le 1er juin 2021, sur l’obligation de discrétion des délégués syndicaux (TJ Paris 1er juin 2021, n° 21/54080).

Pour les juges, l’obligation qui pèse sur les délégués syndicaux varie selon le contexte dans lequel ces derniers ont connaissance de l’information en question.

Au terme de cette décision, il convient de distinguer plusieurs situations :

  • Si les informations sont transmises dans le cadre du fonctionnement du CSE et via la BDES : les délégués syndicaux sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur. Cette obligation de discrétion est la même que les membres du CSE.
  • Si les informations leur sont communiquées en leur stricte qualité de délégué syndical, en dehors de la BDES et de tout fonctionnement du CSE, notamment à l’occasion des négociations annuelles obligatoires : les délégués syndicaux ne sont tenus à aucune obligation de discrétion et bénéficient d’une liberté de communication. Le contenu des affiches, publications et tracts est librement déterminé par l’organisation syndicale, sous réserve de l’application des dispositions relatives au droit de la presse.
  • Néanmoins, si les délégués syndicaux ne sont pas tenus en tant que telle à une obligation de discrétion, ils ne peuvent diffuser des informations confidentielles à l’extérieur de l’entreprise.

A l’occasion de ce litige, le Tribunal judiciaire de Paris est venu rappeler que l’employeur ne peut pas qualifier l’ensemble des documents transmis aux membres du CSE et aux délégués syndicaux comme étant « confidentiels » sans justifier de la nécessité d’assurer la protection de l’ensemble des informations contenues dans ces documents.

2506, 2021

En cas d’incertitude, l’accord collectif doit être interprété comme la loi

Existe-il une méthode d’interprétation lorsqu’une convention ou un accord collectif manque de clarté ? A travers plusieurs arrêts, la Cour de cassation a élaboré une méthode d’interprétation que les juges du fond doivent suivre. En cas de divergence d’interprétation, une convention ou accord collectif « doivent être interprétés comme la loi, c’est-à-dire d’abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d’un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l’objectif social du texte »

Dans un arrêt du 14 avril 2021, la Cour de cassation confirme cette approche à propos du calcul du nombre de voix pour la désignation de délégués syndicaux supplémentaires. Un accord collectif prévoyait que «  pour chaque organisation syndicale représentative (OSR) la faculté de désigner jusqu’à quatre délégués syndicaux ; pour les premières et seconde (OSR) ayant récolté « le plus de voix », la possibilité de désigner respectivement deux et un délégué syndical supplémentaires ».

La Cour d’appel, suivi dans son raisonnement par la Cour de cassation, s’est référée à la lettre de l’article L2122-1 et au mode de calcul de la représentativité des organisations syndicales qui prévoit la prise en compte du nombre de suffrage exprimés pour chaque liste électorale (Cass.soc., 14 avril 2021, n°20-16.548).

En appliquant cette méthode d’interprétation, la Cour de cassation fait prévaloir la nature réglementaire de l’accord collectif au détriment de sa nature contractuelle. On regrette que cette méthode exclue toute référence à la commune intention des parties, comme tel est pourtant le cas pour l’interprétation des contrats prévue à l’article 1188 du Code civil. En conséquence, une attention toute particulière doit être portée à la rédaction des conventions et accords collectifs, et notamment leur préambule dans lequel pourra utilement être défini l’objectif social poursuivi par les parties, dernier rempart contractuel.

1101, 2021

Ce que contient le nouvel ANI sur la prévention de la santé au travail

Le 9 décembre 2020, l’accord national interprofessionnel dit ANI « pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail » a été signé par les partenaires sociaux.

Mettant l’accent sur la prévention des risques professionnels, l’accord propose plusieurs dispositions dont les principales sont exposées ci-dessous et dont certaines qui ne nécessitent pas particulièrement de modification du Code du travail, peuvent d’ores et déjà être mises en œuvre par les entreprises dans l’attente de leur adoption par une loi.

 

  • Réaffirmation du rôle central du Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels (DUERP)

Les partenaires sociaux font du DUERP la base du plan d’action de prévention des risques dans l’entreprise et insistent sur la traçabilité de ce document en encourage l’employeur à mettre en place une version numérique et à conserver successivement ces différents documents.

  • Création d’un « passeport prévention» pour les salariés et les apprentis

Afin d’éviter des formations surabondantes voire redondantes, le projet d’accord propose la création d’un « passeport prévention » permettant, d’attester non seulement de la réalisation et du suivi des formations mais également de l’acquisition des compétences en matière de prévention des risques professionnels par les salariés.

Ce passeport regrouperait les attestations, certificats et diplômes obtenus par l’intéressé et serait alimenté par les organismes de formation et par l’employeur pour celles délivrées au sein de l’entreprise.

Les partenaires sociaux envisagent la portabilité de ce passeport d’une entreprise à une autre ou d’un secteur d’activités à un autre.

  • Renforcement de la prévention de la désinsertion professionnelle

La désinsertion professionnelle est un phénomène qui peut apparaitre après la survenance d’un évènement dans la vie du salarié (arrêt maladie, réorganisation…) et qui va impacter sa capacité à tenir son emploi dans la durée. Pour lutter contre ce risque, l’ANI propose de mettre l’accent sur la prévention et l’anticipation en systématisant les visites de reprise, de préreprise et celles à la demande de l’employeur, du salarié ou du médecin et en organisant une visite de « mi-carrière ».

Par ailleurs, lorsqu’une situation de désinsertion professionnelle est repérée, un plan de retour au travail devrait être formalisé entre l’employeur, le salarié et la cellule de prévention de la désinsertion professionnelle mise en place au sein du service de prévention et de santé au travail interentreprises.

Enfin, sur ce point, l’ANI invite les acteurs de la prévention, dont l’employeur, à avoir une approche collective de ce risque.

  • Réaffirmation du rôle des représentants du personnel

L’ANI met en avant le rôle central des représentants du personnel en matière de santé, sécurité et des conditions de travail en les invitant à participer activement à la politique de prévention des risques professionnels.

A cette fin, les partenaires sociaux proposent de modifier les règles relatives à la durée de la formation santé et sécurité des élus. Actuellement, l’article L. 2315-18 du Code du travail prévoit que tous les membres du CSE bénéficient d’une formation en santé, sécurité et conditions de travail, sans préciser la durée minimale de cette formation. Seul l’article L. 2315-40 du Code du travail prévoit que, pour les membres de la CSSCT, cette formation est à minima de 5 jours dans les entreprises d’au moins 300 salariés et de 3 jours dans les entreprises de moins de 300 salariés.

L’ANI souhaite que tous les membres de la CSSCT et les élus du CSE, sans distinction de l’effectif de l’entreprise, puissent bénéficier au minimum d’une formation de 5 jours pour leur premier mandat et, de 3 jours en cas de renouvellement de celui-ci, sauf dispositions spécifiques déjà existantes dans le code du travail.

  • Modernisation des Services de Santé au Travail Interentreprises (SSTI)

L’ANI suggère que les SSTI deviennent des Services de Prévention, de Santé au Travail Interentreprises (SPSTI) proposant, à minima, les missions de prévention, de suivi individuel des salariés et de prévention de la désinsertion professionnelle.

  • Collaboration entre la médecine du travail et la médecine de ville

Bien conscients, de la pénurie de médecins du travail, les partenaires sociaux proposent une collaboration nouvelle entre médecins du travail et médecins de vie afin d’assurer le suivi médico-professionnel des salariés.

 

712, 2020

Négocier sur la QVT

Norma Avocats se penche sur l’attractivité de la négociation collective sur la Qualité de Vie au Travail pour le recrutement de la « génération Millenials ». Article de Julie LAMADON publié dans le numéro  « Leadership – Capital Humain » 2020 de Décideurs

Négocier sur la QVT

 

2011, 2020

Analyse des principales dispositions de l’accord relatif au dispositif spécifique d’activité partielle de la branche Syntec

Après la métallurgie, la Syntec est la deuxième branche à conclure un accord permettant à ses entreprises de recourir à l’activité partielle longue durée (APLD). Analyse des principales dispositions de l’accord du 10 septembre 2020 relatif au dispositif spécifique d’activité partielle (DSAP) applicable à l’ensemble des entreprises de la branche depuis l’arrêté d’extension du 2 octobre 2020.

  • Une réduction de l’horaire de travail qui ne peut être supérieure à 40% de la durée légale
  • Une indemnité horaire plus favorable que le taux légal :

L’indemnité horaire varie entre 75% (pour les rémunérations mensuelles excédant le plafond de la sécurité sociale) et 98% (pour les salaires inférieurs à 2100 euros bruts mensuels), avec un plafonnement à 4,5 SMIC (6927,39 euros mensuels pour un temps complet en 2020).

  • Une responsabilisation des instances dirigeantes :

Pendant la période de mise en œuvre du dispositif d’activité partielle, il est interdit d’augmenter les rémunérations fixes des dirigeants salariés ayant le statut de mandataires sociaux.

  • L’interdiction des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE)

Le recours à un PSE est interdit pendant toute la période de mise en œuvre du dispositif d’activité partielle. En revanche, un plan de départ volontaire autonome ou des ruptures conventionnelles collectives demeurent possibles.

  • Abondement des comptes personnels de formation (CPF)

La formation du salarié placé en activité partielle doit être privilégiée. Le salarié peut mobiliser son CPF qui pourra alors être abondé d’une dotation supplémentaire financée soit par la branche (via des fonds mutualisés) soit par l’entreprise (via les fonds disponibles dont les versements volontaires).

  • Mise à disposition d’un modèle de document unilatéral

Les entreprises de la branche peuvent mettre en œuvre ce dispositif par voie unilatérale, après consultation du CSE, selon le modèle annexé à l’accord de branche.

911, 2020

Le rachat de Suez nécessite la consultation de son CSE

Le Tribunal Judiciaire de Paris a été amené à se prononcer sur la possibilité de suspendre une opération de cession de parts de capital lorsque la société cédée, qui n’intervient pas dans l’opération entre le cessionnaire et le cédant, n’a pas consulté son comité social et économique (CSE) sur cette opération de cession.

Rappel des faits :

Le 30 août 2020, la société Veolia a annoncé son intention de racheter les parts de la société Suez détenues par la société Engie.

La société Engie détenant 32% du capital de Suez a revendu 29,99% de ce capital à la société Veolia.

Estimant qu’il n’a pas été consulté sur cette opération de rachat d’actions, le CSE de Suez a saisi le tribunal judiciaire de Paris pour demander la suspension des effets de la cession tant qu’il n’aura pas été informé et consulté sur cette opération de cession de capital.

La particularité de cette affaire réside dans le fait que la société Suez, dont les parts sont revendues, n’est ni un tiers à l’opération, ni une partie directe dans la mesure où elle ne maîtrise ni le calendrier de la cession, ni ses modalités. En effet, c’est bien la société Engie qui revend une partie des actions qu’elle possède au sein Suez à la société Veolia, sans que Suez ne puisse s’y opposer.

Dans ce contexte Suez n’ayant pas le pouvoir de s’opposer à ce projet et n’en étant pas l’instigateur, la question se posait de savoir s’il fallait tout de même consulter son CSE.

Le tribunal judiciaire de Paris (TJ Paris 09 octobre 2020 n° 20/56077) répond par la positive et impose à la Société Suez de consulter son CSE sur ce projet de cession d’actions. Et, constatant que Suez ne dispose pas des éléments lui permettant de mener à bien cette consultation, il ordonne aux sociétés Engie et Veolia de lui transmettre les documents lui permettant de consulter son CSE.

A noter que la société Suez, opposée au projet de cession, soutenait l’action du CSE en affirmant qu’elle devait le consulter mais en indiquant qu’elle ne disposait pas des informations nécessaires à cette consultation.

Le tribunal impose donc à des tiers (Engie et Veolia) la transmission d’informations (dont certaines pourraient être confidentielles) afin de permettre à Suez de consulter son CSE sur ce projet de cession.

La position du Tribunal est discutable en ce qu’il impose à un employeur de consulter son CSE sur un projet dont il n’a pas la maîtrise. L’effet utile de la consultation est donc réduit à néant dans la mesure où l’employeur, même s’il partage l’avis des représentants du personnel, sera dans l’impossibilité d’agir pour modifier le projet ou l’annuler.

Il n’est pas certain que cette solution soit acquise, il convient donc d’attendre la position de la cour d’appel de Paris et pourquoi pas, celle de la Cour de cassation sur le sujet.

1809, 2020

La liste des salariés vulnérables est modifiée

L’article 20 de la loi du 25 avril 2020 prévoit le placement en activité partielle des salariés qui se trouvent dans l’impossibilité de continuer à travailler et qui sont considérés comme vulnérables en ce qu’ils présentent « un risque de développer une forme grave d’infection au virus SARS-CoV-2 ».

De même, les salariés partageant le même domicile qu’une personne vulnérable pouvaient être placés en activité partielle s’ils étaient dans l’impossibilité de continuer à travailler.

La loi renvoie à un décret le soin de déterminer les critères permettant de caractériser cette vulnérabilité ainsi que la date limite d’application de ce dispositif exceptionnel, laquelle ne peut excéder le 31 décembre 2020.

Un premier décret du 05 mai 2020 (n° 2020-521) est venu préciser les critères permettant d’identifier une personne vulnérable. Celui-ci fixait 11 critères allant de l’âge jusqu’à l’état de grossesse tout en passant par le descriptif d’un grand nombre de difficultés de santé susceptibles de mener à une forme grave d’infection à la COVID-19.

Ce décret du 05 mai a été remplacé à compter du 1er septembre 2020 par un nouveau décret du 29 août 2020 (n°2020-1098) qui est venu fixer de nouveaux critères permettant de déterminer les salariés considérés comme vulnérables.

Ainsi depuis le 1er septembre 2020, les critères permettant de considérer un salarié comme étant vulnérable ne sont plus qu’au nombre de 4.

Sont considérés vulnérables les salariés :

  • atteints de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;
  • atteint d’une immunodépression congénitale ou acquise :
  • âgés de 65 ans ou plus et ayant un diabète associé à une obésité ou des complications micro ou macrovasculaires ;
  • dialysés ou présentant une insuffisance rénale chronique sévère.

Désormais, seuls les salariés répondant aux critères mentionnés ci-dessus, pour lesquels un médecin estime qu’ils présentent un risque de développer une forme grave de la COVID-19 et qui sont dans l’impossibilité de continuer à travailler peuvent être placés en activité partielle.

A noter que les salariés partageant le même domicile qu’une personne vulnérable ne peuvent plus être placés en activité partielle, et ce depuis le 1er septembre 2020.

L’indemnisation des salariés placés en activité partielle en raison de leur vulnérabilité s’effectue dans les conditions de droit commun.

2906, 2020

La prise en compte des RPS au stade de l’élaboration du PSE relève de la compétence du juge administratif

L’employeur a une obligation de sécurité à l’égard de ses salariés. Il doit notamment prévenir les risques psycho-sociaux (RPS) au travail.

Estimant qu’un employeur a manqué à son obligation de prendre en compte les RPS dans un contexte de réorganisation et de PSE, un syndicat a saisi le juge des référés du Tribunal de Grande Instance (TGI) de Nanterre (devenu tribunal judiciaire depuis le 1er janvier 2020) pour obtenir la suspension du projet de réorganisation. Le syndicat estimait que l’employeur n’avait pas pris les « mesures d’identification et de prévention des risques psychosociaux et de la souffrance au travail des salariés ».

A l’occasion de ce contentieux, le préfet des Hauts-de-Seine a déposé un déclinatoire de compétence en estimant que le contrôle de la prise en compte des RPS au stade de l’élaboration d’un PSE devait être opéré par la DIRECCTE, sous le contrôle du juge administratif.

Le Président du TGI ayant écarté ce déclinatoire de compétence et statué sur la prise en compte des RPS par l’employeur, le préfet a élevé le conflit.

Saisi de la question, le tribunal des conflits statue par une décision du 08 juin 2020 (T. Confl. 08 juin 2020 n° 4189).

Les magistrats annulent d’abord l’ordonnance du TGI en ce qu’il a statué sur le fond sans laisser au préfet le temps pour élever le conflit.

Ils tranchent ensuite le conflit de compétence en estimant qu’il « appartient à l’autorité administrative de vérifier le respect, par l’employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ».

La DIRECCTE doit donc s’assurer de la régularité de la procédure d’information et de consultation des instances représentatives du personnel d’une part, et du respect par l’employeur des principes de prévention découlant de l’article L. 4121-1 du code du travail d’autre part.

Le tribunal des conflits rappelle par ailleurs que le juge judiciaire reste compétent pour vérifier le respect par l’employeur de son obligation de sécurité lorsque la situation à l’origine du litige est sans lien avec le projet de réorganisation ou qu’elle est liée à la mise en œuvre de celui-ci.

2406, 2020

Les conditions d’utilisation des titres-restaurant sont temporairement aménagées

Le décret n° 2020-706 du 10 juin 2020 a apporté des modifications temporaires aux conditions d’utilisation des titres-restaurant.

A compter du 12 juin et jusqu’au 31 décembre 2020 :

  • Les titres-restaurant peuvent être utilisés le dimanche et les jours fériés ;
  • Leur utilisation est limitée à un montant maximum de 38 € par jour, contre 19 € auparavant.

Ces dérogations sont valables lorsque les titres-restaurant sont utilisés dans des restaurants, des hôtels-restaurants ou des débits de boissons assimilés à ceux-ci.

Les achats effectués dans les supermarchés au moyen de titres-restaurants restent soumis aux dispositions prévues par le code du travail et ne bénéficient pas des aménagements apportés par le décret.

A noter que le décret ne comporte aucune dérogation à l’article R. 3262-9 du code du travail qui prévoit que les titres-restaurants ne peuvent être utilisés que dans le département du lieu de travail ou les départements limitrophes.

Une dérogation de l’employeur reste toutefois possible au profit des salariés appelés à faire des déplacements longue distance en raison de leurs fonctions.

3103, 2020

Retour sur les principales actualités sociales liées à l’épidémie de Covid-19 (Partie 1)

Face aux impératifs d’urgence sanitaire et de survie économique des entreprises françaises, de nombreuses mesures ont été adoptées ces derniers jours par les pouvoirs publics français. Retour sur les principales mesures sociales liées à l’épidémie de Covid-19.

Adaptation du dispositif d’activité partielle : Afin de limiter les conséquences d’une baisse d’activité, le Gouvernement a redimensionné le dispositif d’activité partielle en modifiant les modalités de calcul de l’allocation versée par l’Etat, en simplifiant les procédures de dépôt et en réduisant les délais d’instruction. Présentation du dispositif d’activité partielle adapté à la crise sanitaire (Présentation de l’activité partielle)

Adoption de la loi d’urgence pour face à l’épidémie de Covid-19 : Le 23 mars 2020, la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie du Covid-19 du 23 mars 2020 autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance, toute mesure, afin de faire face aux conséquences économique, financières et sociales  liée à la propagation du virus. Récapitulatif des mesures sociales de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie du Covid-19 (Récapitulatif des mesures sociales de la loi d’urgence).

Adoption en urgence des ordonnances annoncées : Conformément à la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, plusieurs ordonnances ont été présentées en Conseil des ministres le 25 mars 2020. Décryptage des premières ordonnances en matière de congés payés, de durée du travail, des jours de repos, de l’indemnité complémentaire, du versement des sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation (Décryptage des premières ordonnances).

3003, 2020

Lutte contre le COVID-19 vs données personnelles

A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Cela pourrait résumer l’avalanche de textes législatifs et réglementaires qui s’abat sur le code du travail pour modifier notamment l’activité partielle, les congés payés, les élections professionnelles et les durées de repos hebdomadaires.

L’objectif poursuivi est simple : assurer un fonctionnement économique optimal pour les entreprises dont l’activité est nécessaire à la vie de la Nation et s’assurer que celles dont l’activité doit être suspendue, soient en mesure se remettre rapidement en ordre de marche dès que la situation sanitaire le permettra.

Ces circonstances exceptionnelles ne devraient toutefois pas remettre en cause la protection des données personnelles. C’est ce que rappelle la CNIL dans un communiqué du 06 mars 2020, qui sensibilise les employeurs sur la nécessité de ne pas éluder l’application du RGPD.

Pour garantir la santé et la sécurité de leurs salariés en cette période de pandémie, les employeurs peuvent être tentés de déroger au RGPD en recueillant –de parfaite bonne foi- des informations relatives à l’état de santé de leurs salariés (température, fragilité particulière, etc…).

Mais pour la CNIL, le contexte actuel ne permet pas à l’employeur de recourir à des enquêtes ou à des demandes individuelles ayant pour but de collecter de manière systématique et généralisée des informations relatives aux symptômes présentés par un employé ou un proche.

De même, elle rappelle que le recours à des relevés obligatoires de température corporelle au quotidien ou la collecte de fichiers ou questionnaires médicaux est une pratique prohibée.

Elle admet en revanche que l’employeur puisse inciter ses salariés à lui faire remonter des informations les concernant en cas d’éventuelle exposition. En pareille circonstance, l’employeur pourrait consigner la date et l’identité de la personne suspectée ainsi que les mesures organisationnelles prises.

Ces présentes semaines mettent les entreprises au défi de trouver un équilibre entre nécessité de garantir la santé et la sécurité de leurs salariés, et l’obligation de respecter leur vie privée.

1003, 2020

La désignation d’un délégué syndical rend caduque la décision de l’employeur mettant en place un repos compensateur

Les heures supplémentaires effectuées par un salarié peuvent donner lieu à un paiement ou à un repos compensateur de remplacement.

La mise en place d’un repos compensateur de remplacement n’a toutefois rien d’automatique et doit respecter certaines conditions, lesquelles diffèrent selon qu’il existe ou non un délégué syndical dans l’entreprise.

En présence d’un délégué syndical, cette mise en place suppose la conclusion d’un accord collectif. En revanche, en l’absence de délégué syndical et dès lors que le comité social et économique ne s’y oppose pas, l’employeur peut mettre en place un repos compensateur de remplacement de manière unilatérale (article L. 3121-37 du code du travail).

Mais qu’advient-il de la décision unilatérale de l’employeur instaurant le repos compensateur de remplacement lorsque postérieurement à celle-ci, un délégué syndical est désigné dans l’entreprise ?

C’est la question à laquelle devait répondre la Cour de cassation dans un arrêt du 29 janvier 2020 (Cass.Soc. 29 janvier 2020 n° 18-16.001).

Confirmant sa position de 2014 (Cass.Soc. 24 juin 2014 n° 13-10.301), la Cour de cassation considère que la décision par laquelle l’employeur instaure un repos compensateur de remplacement ne saurait être analysée comme procurant un avantage aux salariés. Partant, elle ne constitue pas un engagement unilatéral de l’employeur et n’est donc pas soumise aux règles de dénonciation applicables en la matière.

Poursuivant son raisonnement, elle estime que cette décision « devient caduque après que, les conditions de son existence ayant disparu par suite de l’assujettissement de l’entreprise à l’obligation annuelle de négocier, il ne lui a pas été substitué un accord collectif dans le délai imparti pour cette négociation ».

Après avoir relevé qu’un délégué syndical a été désigné en 2013 et qu’aucun accord collectif permettant d’instaurer un repos compensateur de remplacement n’a été trouvé à l’issue de la négociation annuelle obligatoire de 2014, la Cour de cassation estime que la décision unilatérale de l’employeur qui datait de 2005 était devenue caduque à compter du 1er janvier 2015.

La demande de paiement d’heures supplémentaires faite par le salarié pour la période postérieure au 1er janvier 2015 devait donc être accueillie.

403, 2020

Les frais occasionnés par le télétravail peuvent être remboursés de manière forfaitaire

Il appartient à l’employeur de prendre en charge les dépenses engagées par les salariés pour les besoins de leur activité professionnelle.

Ces dépenses ont la nature de frais professionnels, et non de salaire, et par conséquent ne sont pas soumises aux cotisations sociales.

Pour ne pas être intégré dans l’assiette des cotisations sociales, le remboursement doit correspondre à la somme réellement dépensée par le salarié et sur présentation d’un justificatif.

Il est toutefois admis que certaines dépenses puissent faire l’objet d’un remboursement forfaitaire, c’est-à-dire sans qu’il soit nécessaire de justifier du montant précis de la dépense réalisée par le salarié.

En matière de frais engagés par le salarié dans le cadre du télétravail, l’URSSAF n’admettait jusqu’à présent qu’un remboursement au réel basé sur des tableaux et des calculs de prorata qui étaient particulièrement rébarbatifs et intrusifs dans la vie privée du salarié et son domicile.

Cette position était critiquée par les partenaires sociaux dans leur recommandation de 2017 avant l’adoption de l’ordonnance de septembre. Ils pointaient du doigt l’incohérence de cette évaluation au réel avec la réalité des dispositions prises dans de nombreux accords pour indemniser forfaitairement les coûts du télétravail au domicile (siège, accès internet…), que ces coûts soient ponctuels ou réguliers.

Selon les partenaires sociaux, une réforme de l’évaluation de ces frais professionnels sur une base forfaitaire légale ou conventionnelle constituerait une évolution de nature à sécuriser les entreprises, à simplifier la gestion de ces dispositions et à éviter un surcoût qui peut devenir dissuasif.

Cette recommandation a été entendue. L’URSSAF admet désormais sur son portail que le remboursement des dépenses engagées par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle dans le cadre du télétravail puisse se faire de manière forfaitaire.

Ainsi, l’employeur peut rembourser 10 euros par mois à un salarié effectuant du télétravail à raison d’une journée par semaine. Cette limite évolue progressivement en fonction du nombre de jours de télétravail hebdomadaires (20 € par mois pour deux jours de télétravail par semaine, etc…).

Ce remboursement peut intervenir sans que le salarié ait besoin de justifier des dépenses qu’il a effectivement supportées à l’occasion du télétravail. En revanche, l’employeur devra être en mesure de prouver que le salarié était bien en situation de télétravail pendant les jours retenus pour le calcul de la somme forfaitaire qui a été remboursée.

Rappelons que l’utilisation de ce forfait n’est qu’une simple faculté, l’employeur conserve la possibilité de continuer à rembourser ses salariés sur la base des dépenses effectivement supportées et sur production de justificatifs.

1202, 2020

Le code du travail numérique est en ligne

Instauré par l’article 1 de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, le code du travail numérique est désormais accessible sur le site internet suivant :  www.code.travail.gouv.fr.

Ce service permet aux employeurs et aux salariés d’accéder gratuitement, aux dispositions législatives et réglementaires ainsi qu’aux stipulations conventionnelles qui leur sont applicables.

Il ne s’agit pas d’une simple reprise en version numérique du code du travail tel qu’il est consultable sur Légifrance, mais d’un véritable outil pratique et pédagogique à disposition des acteurs du monde du travail pour faciliter la compréhension et l’application de la loi.

Il présente les règles applicables sur tous les thèmes de droit du travail et propose des boites à outils permettant d’appréhender la durée d’un préavis, de calculer le montant d’indemnités de licenciement, de rédiger des lettres de convocation etc…

Attention : les réponses fournies par le code du travail numérique ne prennent en compte ni les accords de groupe, d’entreprise ou d’établissement, ni la jurisprudence. Des vérifications peuvent s’imposer.

Par ailleurs, l’article 1 de l’ordonnance précitée précise que « L’employeur ou le salarié qui se prévaut des informations obtenues au moyen du code du travail numérique est, en cas de litige, présumé de bonne foi ».

Le législateur ne précise toutefois pas la portée de cette présomption de bonne foi. S’agit-il d’une présomption simple ou irréfragable ? Autrement dit, les parties sont-elles admises à apporter la preuve de la mauvaise foi ?

Partons du postulat que cette preuve est admise et prenons l’exemple d’un employeur qui consulte le code du travail numérique pour vérifier la durée de préavis d’un salarié en cas de licenciement.

Si l’outil lui indique une durée de préavis erronée et que le salarié ne parvient pas à démontrer la mauvaise foi de l’employeur, sera-t-il privé de son droit ? Nous pouvons en douter.

Toujours dans l’hypothèse précitée, l’employeur pourra-t-il être condamné à verser au salarié une indemnité correspondant au droit dont celui-ci a été privé alors même que la preuve de sa mauvaise foi n’est pas rapportée ? Si tel devait être le cas, l’efficacité de cette présomption de bonne foi serait pour le moins discutable.

Par ailleurs, le juge garde-t-il un pouvoir d’appréciation des faits et de leur gravité par rapport à une sanction ou devra-t-il uniquement statuer sur la bonne ou mauvaise foi de l’employeur ?

Il faudra scruter avec attention la jurisprudence des prochaines années pour analyser l’impact que pourrait avoir le code du travail numérique sur le contentieux en droit du travail.

Dans l’attente, il conviendra de rester prudent sur les conséquences liées à l’utilisation de ce nouvel outil.

901, 2020

La vie privée à l’épreuve du droit à la preuve

Sacralisé par le RGPD, par la CNIL et par le code civil, le respect du droit à la vie privée perd-il tout son poids lorsqu’il est mis en balance avec le droit à la preuve ?

On le sait, la loi autorise le juge à ordonner la production de pièces telles que des bulletins de salaires et des contrats de travail dans des contentieux relatifs à l’égalité de traitement ou encore le registre du personnel dans des contentieux relatifs à l’obligation de reclassement.

Pour autant La Cour de cassation vient de rendre un arrêt (Cass.Soc. 11 décembre 2019 n° 18-16.516) par lequel elle invite les juges à ne pas user de ce pouvoir de manière systématique et à le mettre en balance avec le nécessaire respect de la vie privée dû à chaque salarié.

La Haute Cour rappelle que « le droit à la preuve ne peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée qu’à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi ».

Elle casse ainsi l’arrêt de la cour d’appel de Paris qui avait ordonné à l’employeur de communiquer à un salarié arguant d’une inégalité de traitement, les contrats de travail, avenants et bulletins de salaire de 11 autres salariés sans vérifier si cette production ne portait pas une atteinte disproportionnée à la vie privée de ces derniers.

La Cour de cassation subordonne ainsi la possibilité pour le juge d’ordonner la production de documents portant atteinte à la vie privée à une double condition :

  • La production doit être indispensable à l’exercice d’un droit (sous-entendu il n’y a pas d’autres moyens d’y parvenir) ;
  • L’atteinte portée à la vie privée est proportionnée au but poursuivi par le demandeur.

Attention, si le nécessaire respect de la vie privée peut parfois dispenser l’employeur de produire certains documents, il lui interdit également de fournir spontanément des documents portant atteinte à la vie privée des salariés (Cass.Soc. 07 novembre 2018 n° 17-16.799).

601, 2020

La prime exceptionnelle de pouvoir d’achat est reconduite pour 2020

Instaurée par la loi du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales, la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, dite « prime Macron » vient d’être reconduite par la loi de Financement de la Sécurité Sociale de 2020, publiée au journal officiel du 27 décembre 2019.

Comme pour l’année 2019, le versement de cette prime demeure facultatif. Toutefois, si l’entreprise décide de l’octroyer à ses salariés, la prime devra être versée entre le 28 décembre 2019 et le 30 juin 2020, à l’ensemble de ses salariés et intérimaires, ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond qu’elle aura instauré.

Parmi les salariés bénéficiaires, l’entreprise pourra ensuite moduler le montant de la prime selon la rémunération, le niveau de classification, la durée de présence effective durant l’année ou encore la durée de travail contractuelle.

Comme en 2018, cette prime sera exonérée de cotisations sociales (salariales et patronales) et d’impôt sur le revenu, dans la limite d’un montant maximal de 1.000 € par salarié, et uniquement au profit des salariés ayant perçu, au cours des 12 mois précédant le versement, une rémunération inférieure à 3 SMIC (soit 55.419 € en 2020).

Le montant de la prime et les modalités de son octroi devront être fixés par accord collectif ou décision unilatérale de l’employeur. S’il opte pour cette seconde option, l’employeur devra en informer le comité social et économique avant le versement de la prime.

Il est important de signaler que la loi de financement de la sécurité sociale de 2020 impose désormais aux entreprises qui souhaitent octroyer aux salariés la prime précitée, de mettre en œuvre un accord d’intéressement. Exceptionnellement, la durée des accords d’intéressement conclus entre le 1er janvier et le 30 juin 2020 pourra être inférieure à trois ans, sans pouvoir être inférieure à un an.

Par exception, les associations et fondations à but non lucratif poursuivant un but d’intérêt général et autorisées à recevoir des dons ouvrant droit à réduction d’impôt sont exemptées de la condition tenant à la mise en œuvre d’un accord d’intéressement.

1812, 2019

Adoption du projet de loi d’orientation des mobilités : panorama des principales mesures sociales

Le projet de loi d’orientation des mobilités, qui ambitionne de réformer en profondeur le cadre général des politiques de mobilités sur le territoire national, a été définitivement adopté par l’Assemblée nationale le 19 novembre 2019.

Retour sur les principes mesures sociales.

  • La mobilité comme nouveau sujet pour la négociation obligatoire en entreprise sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail

Les dispositions supplétives, prévues à l’article L.2242-17 du Code du travail, fixent les thèmes à aborder en matière de négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail à défaut d’accord collectif d’entreprise. Le projet de loi d’orientation des mobilités ajoute à cette liste « les mesures visant à améliorer la mobilité des salariés entre leur lieu de résidence habituelle et leur lieu de travail, notamment en réduisant le coût de la mobilité, en incitant à l’usage des modes de transports vertueux ainsi que par la prise en charge des frais » de transports engagés par les salariés. Ces mesures portent sur la mise en œuvre du télétravail, l’aménagement des horaires de travail, la facilitation de l’usage du vélo ou du covoiturage etc.

A défaut d’accord avec les partenaires sociaux, l’employeur devra élaborer unilatéralement « un plan de mobilité employeur » sur les différents sites qui portera sur l’amélioration et la valorisation des déplacements domicile-travail de son personnel avec des modes de déplacements « propres ».

  • La création d’un « forfait mobilités durables »

Le projet de loi d’orientation des mobilités prévoit de substituer à l’indemnité kilométrique vélo un « forfait mobilités durables » pour promouvoir les différents types de transports vertueux. Ce forfait va permettre à l’employeur de prendre en charge tout ou partie des frais engagés par ses salariés pour les déplacements domicile-travail qu’ils effectuent à vélo, en covoiturage ou encore en transports publics (à l’exception des frais d’abonnement aux transports publics).

Les montants, les modalités et les critères d’attribution de ce forfait seront définis par accord d’entreprise ou, à défaut, par accord de branche. A défaut de tel accord, la prise en charge est mise en œuvre par décision unilatérale de l’employeur, après consultation du CSE. Afin d’encourager ces nouvelles pratiques, ce forfait sera exonéré de cotisations sociales pour l’employeur et d’impôt pour les salariés dans la limite de 400 euros par an, dont 200 euros au maximum au titre des frais de carburant.

Le projet de loi adopté est pour l’heure soumis à l’examen du Conseil Constitutionnel. Si les mesures présentées ci-dessus ne sont donc pas encore entrées en vigueur, la saisine ne porte pas sur ces dispositions et la décision du Conseil est imminente. Leur entrée en vigueur est donc une question de jours.

 

1510, 2019

Négociation sur le congé mobilité – Article de Julie Lamadon dans Décideurs

Aujourd’hui, le contexte économique est marqué par la rapidité, voire l’imprévisibilité, du développement des innovations technologiques. Dans ce contexte la «compétence » entendue comme un ensemble de savoirs, savoir-faire et savoir-être en vue de réaliser une tâche ou une activité est devenue plus importante que la maitrise d’un métier ou d’une qualification voués à l’obsolescence. Comment la négociation d’un accord sur le congé mobilité peut-elle accompagner cette évolution ? Le point dans un article publié dans Décideurs négociation sur le congé mobilité par Julie Lamadon – Avocate associée Norma Avocats

910, 2019

Négocier le cadre de l’entretien professionnel : une opportunité à saisir !

Cela fait bientôt six ans qu’existe l’obligation de réaliser un entretien professionnel régulier au bénéfice de chaque salarié (Loi n°2014-288 du 5 mars 2014).

Or, précisément, tous les six ans, l’entretien professionnel fait un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié aux fins de vérifier qu’il a bien bénéficié d’entretiens professionnels tous les deux ans mais aussi de certaines mesures d’évolution professionnelle (prévues à l’article L.6315-1 II du Code du travail).

Depuis le 1er janvier 2019, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, lorsque les salariés n’ont pas bénéficié, au cours de ces six années, des entretiens professionnels et d’au moins une formation non obligatoire, leur compte personnel de formation (CPF) devra être abondé de 3000 euros. (Loi n°2018-771 du 5 septembre 2018, dite Loi Avenir Professionnel).

Une période transitoire vient d’être instaurée, jusqu’au 31 décembre 2020, pour laisser aux employeurs le temps de se conformer au nouveau régime (Ordonnance n°2019-861 du 21 août 2019).

Il faut mettre à profit ce délai supplémentaire pour exploiter la possibilité ouverte par la loi n°2018-771 du 5 septembre 2018 de négocier par accord collectif:

  • Le cadre, les objectifs et les critères collectifs d’abondement par l’employeur du compte personnel de formation des salariés ;
  • D’autres modalités d’appréciation du parcours professionnel du salarié lors de l’entretien récapitulatif ;
  • Une périodicité des entretiens professionnels différente.

L’enjeu financier lié à la sanction de l’abondement sur le CPF est capital. La voie de la négociation est ici de nature à supprimer ce risque.

905, 2019

Différences de traitement opérées par voie d’accord collectif : prudence !

Depuis plusieurs arrêts rendus en 2015 (13-22.179, 13-25.437, 13.23.818), la Cour de cassation jugeait que les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie d’accords collectifs sont présumées justifiées, de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle. Ainsi, la charge de la preuve reposait sur le salarié. La Cour de cassation avait justifié sa position par le fait que ces accords étaient négociés et signés par des organisations syndicales représentatives investies de la défense des droits et intérêts des salariés.

Par un arrêt du 3 avril 2019 destiné à la plus large publicité, la Cour de cassation a refusé de généraliser l’application de cette présomption à toutes les différences de traitement instituées par accord collectif. Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, une salariée revendiquait le bénéfice de mesures prévues dans un accord collectif qui conditionnait ce bénéfice à la nécessité d’être présent sur le site depuis 2011, ce qui n’était pas le cas de cette salariée arrivée en 2012.

Pour justifier sa décision, la Cour de cassation explique que cette présomption serait, dans les domaines où est mis en œuvre le droit de l’union européenne, contraire à celui-ci ; en effet, cela ferait reposer sur le seul salarié la charge de la preuve de l’atteinte au principe d’égalité en contradiction avec le mécanisme probatoire propre au droit de l’Union Européenne. La Cour rappelle que selon le juge européen, un accord collectif n’est pas en soi de nature à justifier une différence de traitement (CJUE, arrêts du 8 avril 1976, C-414/16).

Pour autant, ce n’est pas la fin de la présomption de justification des différences de traitement, puisqu’elle est écartée dans les domaines où est mis en œuvre le droit de l’Union Européenne. Elle s’applique donc encore aux inégalités de traitement conventionnelles fondées sur :

  • L’appartenance à des catégories professionnelles distinctes ;
  • Des fonctions distinctes ;
  • L’appartenance à des établissements différents.

Cette décision invite par conséquent à faire preuve de vigilance dans la rédaction des accords collectifs qui contiendraient des différences de traitement entre salariés.

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