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La mise à pied disciplinaire du salarié protégé ne nécessite pas son accord préalable

Par |2025-03-05T18:21:36+01:00mars 5th, 2025|A la une, actualités générales|

Un salariĂ© protĂ©gĂ©, Ă  l’instar des autres salariĂ©s, peut ĂȘtre sanctionnĂ© s’il enfreint les rĂšgles de discipline ou ses obligations professionnelles.

Si l’employeur est libre du choix de la sanction qu’il considĂšre la plus adaptĂ©e au comportement du salariĂ© protĂ©gĂ©, il lui est nĂ©anmoins interdit d’imposer Ă  un salariĂ© protĂ©gĂ© toute modification de son contrat de travail ou de ses conditions de travail.

Ainsi, lorsque la sanction envisagĂ©e entraĂźne, ou est susceptible d’entraĂźner, une modification du contrat ou des conditions de travail, l’employeur doit informer le salariĂ© protĂ©gĂ© qu’il peut accepter ou refuser la sanction envisagĂ©e.

Dans l’affaire ayant donnĂ© lieu Ă  l’arrĂȘt de la Cour de cassation du 11 dĂ©cembre 2024, un salariĂ© protĂ©gĂ© contestait la mise Ă  pied disciplinaire de 5 jours que son employeur lui avait notifiĂ©e, et en demandait l’annulation. Il estimait que son employeur, Ă  dĂ©faut de lui avoir demandĂ© son accord prĂ©alable, ne pouvait pas, unilatĂ©ralement, dĂ©cider de lui notifier cette sanction.

La Cour d’appel avait fait droit Ă  la demande du salariĂ©, et annulĂ© la mise Ă  pied disciplinaire, estimant que celle-ci emporte une modification de sa rĂ©munĂ©ration et de sa durĂ©e du travail pendant la durĂ©e de son application. Elle en avait dĂ©duit que l’employeur ne pouvait imposer au salariĂ© cette sanction.

NĂ©anmoins, dans l’affaire commentĂ©e, la Cour de cassation n’adopte pas ce raisonnement.

Elle juge, au visa de l’article L. 2411-1, 2° du Code du travail, que la mise Ă  pied disciplinaire du salariĂ© protĂ©gé :

  • D’une part, n’a pas pour effet de suspendre l’exĂ©cution du mandat de reprĂ©sentant du personnel ;
  • D’autre part, n’emporte pas modification de son contrat de travail ni changement de ses conditions de travail.

La Cour de cassation en dĂ©duit donc, et c’est une premiĂšre, que la mise Ă  pied disciplinaire n’est pas subordonnĂ©e Ă  l’accord du salariĂ© protĂ©gĂ©.

Nous rappelons toutefois qu’une rĂ©trogradation, ou une mutation disciplinaire, elles, nĂ©cessitent bien l’accord prĂ©alable du salariĂ© (protĂ©gĂ© ou non), dĂšs lors qu’elles constituent une modification du contrat de travail. En cas de refus du salariĂ©, l’employeur peut faire le choix d’une sanction moindre, ou, et sous rĂ©serve de pouvoir en justifier, d’une mesure de licenciement, soumise Ă  autorisation de l’Inspection du travail.

(Cass. soc. 11 décembre 2024, n° 23-13.332)

Licenciement pour des faits commis lors d’une croisiĂšre : oĂč s’arrĂȘte l’autoritĂ© de l’employeur ?

Par |2025-03-06T10:18:57+01:00mars 5th, 2025|A la une, actualités générales|

Les Ă©vĂ©nements d’entreprise (sĂ©minaires, voyages, team-building
) sont souvent l’occasion de renforcer la cohĂ©sion entre collĂšgues. Mais jusqu’oĂč l’employeur peut-il contrĂŽler le comportement de ses salariĂ©s lors de ces moments qui se situent Ă  la frontiĂšre entre vie professionnelle et personnelle ?

C’est prĂ©cisĂ©ment la question posĂ©e dans un arrĂȘt rĂ©cent de la Cour de cassation (Cass. soc. 22-1-2025, n° 23-10.888).

* Dans cette affaire, une entreprise avait organisĂ© une croisiĂšre pour rĂ©compenser certains salariĂ©s laurĂ©ats d’un concours interne. Lors de ce voyage, une salariĂ©e a Ă©tĂ© accusĂ©e d’avoir fumĂ© le narguilĂ© dans sa cabine, qu’elle partageait avec une collĂšgue enceinte, et d’avoir obstruĂ© le dĂ©tecteur de fumĂ©e.

Informé de cet incident, le commandant de bord décide du débarquement anticipé de la salariée.

À son retour, son employeur considĂšre que son comportement a portĂ© atteinte Ă  l’image de l’entreprise et mis en danger la sĂ©curitĂ© des autres passagers. Il a donc dĂ©cidĂ© de la licencier pour faute grave.

La salariée, estimant que les faits commis lors de cette croisiÚre relevaient de sa vie privée, conteste son licenciement.

De son cĂŽtĂ©, l’employeur estimait que les faits, bien que commis au cours de la croisiĂšre, se rattachaient nĂ©cessairement Ă  la vie professionnelle de la salariĂ©e, en raison du contexte dans lequel ils s’Ă©taient dĂ©roulĂ©s.

Les juges quant à eux, donnent raison à la salariée.

* La Cour de cassation rappelle, une nouvelle fois, qu’un fait relevant de la vie personnelle du salariĂ© ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement Ă  une obligation dĂ©coulant du contrat de travail.

La Cour a Ă©galement prĂ©cisĂ© qu’un trouble objectif dans le fonctionnement de l’entreprise rĂ©sultant d’un fait tirĂ© de la vie personnelle du salariĂ© ne permet pas, en lui-mĂȘme, de prononcer une sanction disciplinaire.

En l’espùce, les juges constatent que :

  • Les faits reprochĂ©s Ă  la salariĂ©e se sont dĂ©roulĂ©s en dehors du temps et du lieu de travail de travail : lors de cette croisiĂšre, certes financĂ©e par l’entreprise, la salariĂ©e n’était pas sous la subordination de son employeur, et n’était pas soumise aux rĂšgles de l’entreprise ;
  • L’employeur ne dĂ©montrait pas de trouble caractĂ©risĂ© Ă  l’entreprise : les faits commis pas la salariĂ©e n’ont eu aucune rĂ©percussion sur l’activitĂ© de l’entreprise ou sur son image.

La Haute Juridiction en déduit donc que ce licenciement disciplinaire est dénué de cause réelle et sérieuse.

Cet arrĂȘt illustre, Ă  nouveau, la nĂ©cessitĂ© pour les employeurs, lors de faits survenus au cours d’un Ă©vĂ©nement d’entreprise, de bien distinguer ce qui relĂšve de la vie personnelle du salariĂ©, et ce qui relĂšve de sa vie professionnelle.

Avant de prononcer une sanction, ou de se lancer dans un licenciement pour trouble objectif au fonctionnement de l’entreprise, il est essentiel de s’assurer que ces faits constituent un manquement aux obligations dĂ©coulant du contrat de travail, ou qu’ils ont un impact direct sur le fonctionnement de l’entreprise.

(Cass. soc. 22 janvier 2025 n° 23-10.888).

Le caractÚre autonome et indisponible de la notion de temps de travail effectif : encore une décision sur le temps de trajet.

Par |2025-02-06T22:16:34+01:00février 5th, 2025|A la une, actualités générales|

trajet et temps de travail effectif  : Une note explicative rĂ©digĂ©e par l’employeur ne saurait faire Ă©chec au principe d’autonomie de la notion de temps de travail effectif ni dispenser le juge d’un examen substantiel de la situation soumise.

 

15 janvier 2025 Cour de cassation Pourvoi n° 23-19.595

Sanction disciplinaire et respect des formalités de dépÎt et de publicité du rÚglement intérieur

Par |2025-02-07T10:30:11+01:00novembre 22nd, 2024|A la une, actualités, actualités générales|

* Par principe, l’employeur est libre de choisir la sanction qui lui parait la plus adaptĂ©e au comportement du salariĂ©.

Toutefois, dans les entreprises d’au moins 50 salariĂ©s, au sein desquelles l’employeur est tenu d’Ă©laborer un rĂšglement intĂ©rieur, la Cour de cassation juge, de maniĂšre constante, que l’employeur ne peut pas prononcer de sanction qui ne serait pas prĂ©vue par le rĂšglement intĂ©rieur (Cass. soc. 26 octobre 2010, n° 09-42.740), Ă  l’exception du licenciement (Cass. soc. 23 mars 2017, n° 15-23.090).

* L’article L. 1321-4 du Code du travail prĂ©cise que le rĂšglement intĂ©rieur ne peut ĂȘtre introduit dans l’entreprise qu’aprĂšs l’accomplissement, par l’employeur, des formalitĂ©s suivantes :

  • La consultation du CSE ;
  • La transmission du rĂšglement intĂ©rieur Ă  l’Inspection du travail ;
  • Le dĂ©pĂŽt d’un exemplaire au Greffe du Conseil de prud’hommes du ressort de l’entreprise.

Les juges estiment que si de telles formalitĂ©s n’ont pas Ă©tĂ© accomplies (ou si l’employeur ne justifie pas les avoir prĂ©alablement effectuĂ©es), le rĂšglement intĂ©rieur ne peut produire ses effets Ă  l’égard des salariĂ©s (Cass. soc. 9 mai 2012, n° 11-13.687).

Les salariĂ©s peuvent alors demander, dans le cadre d’un litige individuel, l’annulation d’une sanction disciplinaire prĂ©vue par le rĂšglement intĂ©rieur, en raison de son inopposabilitĂ© Ă  leur Ă©gard.

La Cour de cassation estime Ă©galement, qu’en l’absence de ces formalitĂ©s prĂ©alables, un syndicat peut saisir le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s pour demander la suspension du rĂšglement intĂ©rieur (Cass. soc. 23 octobre 2024, n°22-19.726).

* Le 9 octobre 2024, la Cour de cassation a rappelĂ© ces rĂšgles, dans une affaire oĂč l’employeur avait prononcĂ© une mutation disciplinaire sur un autre site Ă  l’encontre d’une salariĂ©e. Cette derniĂšre avait refusĂ© cette mutation, estimant que les manquements invoquĂ©s par son employeur n’étaient pas justifiĂ©s.

Compte tenu du refus de la salariĂ©e d’exĂ©cuter cette sanction disciplinaire, l’employeur lui notifiait son licenciement pour faute grave.

La salariĂ©e a ensuite contestĂ© son licenciement, estimant que celui-ci Ă©tait dĂ©pourvu de cause rĂ©elle et sĂ©rieuse dans la mesure oĂč la mutation disciplinaire l’ayant motivĂ© lui Ă©tait inopposable Ă  dĂ©faut, pour l’employeur, d’avoir accompli les formalitĂ©s de publicitĂ© du rĂšglement intĂ©rieur.

Les juges, qui ont constatĂ© que l’employeur ne justifiait pas des formalitĂ©s prĂ©alables, ont jugĂ© que la mutation disciplinaire devait ĂȘtre annulĂ©e, peu important que la sanction ait Ă©tĂ© prĂ©vue par la CCN. Par voie de consĂ©quence, ils ont Ă©galement jugĂ© que licenciement Ă©tait dĂ©pourvu de cause rĂ©elle et sĂ©rieuse.

(Cass. soc. 9 octobre 2024 n° 22-20.054).

Dissimulation des relations amoureuses au travail : gare au licenciement disciplinaire !

Par |2025-02-07T10:36:44+01:00juin 18th, 2024|A la une, actualités, actualités générales|

Dans un arrĂȘt du 29 mai 2024, la Chambre sociale de la Cour de cassation a validĂ© le licenciement pour faute grave d’un salariĂ© ayant dissimulĂ© sa relation amoureuse avec une autre salariĂ©e (Cass. Soc., 29 mai 2024, n°22-16.218).

Rappelons tout d’abord le principe selon lequel les salariĂ©s jouissent du droit au respect de leur vie privĂ©e, consacrĂ© tant par le droit national (article 9 du Code civil) que par le droit europĂ©en (article 8 de la Convention europĂ©enne de sauvegarde des droits de l’Homme).

A ce titre, il est de jurisprudence constante qu’un motif tirĂ© de la vie personnelle du salariĂ© ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire (Cass. Soc., 16 dĂ©c. 1997, n°95-41.326), sauf s’il constitue un manquement de l’intĂ©ressĂ© Ă  une obligation dĂ©coulant de son contrat de travail (Cass. Soc., 3 mai 2011, n°09-67.464 ; Cass. Soc., 8 nov. 2011, n°10-23.593).

En l’espĂšce, un salariĂ©, exerçant des fonctions de direction dans l’entreprise et chargĂ© de la gestion des ressources humaines, avait dissimulĂ© Ă  son employeur la relation amoureuse qu’il entretenait avec une salariĂ©e titulaire de mandats syndicaux et reprĂ©sentatifs.

La Haute juridiction a approuvĂ© la position de la Cour d’appel de NĂźmes ayant considĂ©rĂ© que le salariĂ© avait commis un manquement Ă  son obligation de loyautĂ© rendant impossible son maintien dans l’entreprise aux motifs que le salariĂ©, qui avait notamment reçu une dĂ©lĂ©gation pour prĂ©sider les institutions reprĂ©sentatives du personnel, avait partagĂ© des rĂ©unions avec sa compagne au cours desquelles avaient Ă©tĂ© abordĂ©s des sujets sensibles relatifs Ă  des plans sociaux. Il a Ă©tĂ© jugĂ© que cette relation intime Ă©tait de nature Ă  affecter le bon exercice de ses fonctions professionnelles.

Par cet arrĂȘt, la Cour de cassation fait prĂ©valoir l’obligation de loyautĂ© sur le droit Ă  la vie privĂ©e du salariĂ©.

Contestation d’un avis d’inaptitude : un assouplissement de la jurisprudence en vertu du droit Ă  ĂȘtre jugĂ© dans un dĂ©lai raisonnable

Par |2025-02-07T10:37:55+01:00juin 18th, 2024|A la une, actualités, actualités générales|

Dans un arrĂȘt du 22 mai 2024, la Cour de cassation a jugĂ© qu’en cas de contestation d’un avis d’inaptitude, le juge prud’homal, qui fait face Ă  une indisponibilitĂ© des mĂ©decins inspecteurs du travail pour rĂ©aliser une mesure d’instruction, peut dĂ©signer un autre mĂ©decin pour permettre son exĂ©cution (Cass. Soc., 22 mai 2024, n°22-22.321).

Pour mĂ©moire, la procĂ©dure de contestation d’un avis d’inaptitude poursuit un objectif de cĂ©lĂ©ritĂ©. Le salariĂ© ou l’employeur peut contester l’avis Ă©mis par le mĂ©decin du travail dans un dĂ©lai restreint de 15 jours Ă  compter de sa notification devant le Conseil de prud’hommes statuant selon la procĂ©dure accĂ©lĂ©rĂ©e au fond (articles R. 4624-45 et L. 4624-7 du Code du travail).

L’article L. 4624-7 du Code du travail dispose que la juridiction prud’homale peut confier toute mesure d’instruction au mĂ©decin inspecteur du travail territorialement compĂ©tent pour l’Ă©clairer sur les questions de fait relevant de sa compĂ©tence. L’article R. 4624-45-2 du mĂȘme code ajoute qu’en cas d’indisponibilitĂ© ou de rĂ©cusation du mĂ©decin prĂ©citĂ©, le Conseil de prud’hommes peut dĂ©signer un autre mĂ©decin inspecteur du travail que celui qui est territorialement compĂ©tent.

Toutefois, en pratique, les juges sont confrontés à une pénurie de médecins inspecteurs du travail.

En l’espĂšce, un salariĂ© a contestĂ© son avis d’inaptitude avec impossibilitĂ© de reclassement devant le Conseil de prud’hommes. Ce dernier a d’abord confiĂ© une mesure d’instruction au mĂ©decin inspecteur du travail territorialement compĂ©tent. Or, ledit mĂ©decin n’exerçait plus. Le Conseil a ensuite recherchĂ© un autre mĂ©decin inspecteur du travail mais s’est heurtĂ© au refus de tous les mĂ©decins inspecteurs du travail recherchĂ©s.

Par consĂ©quent, le Conseil a confiĂ© la mesure d’instruction Ă  un mĂ©decin inscrit sur la liste des experts prĂšs la Cour d’appel.

L’employeur s’est pourvu en cassation afin d’obtenir la nullitĂ© de l’expertise au motif que seul le mĂ©decin inspecteur du travail est compĂ©tent pour Ă©clairer le Conseil, Ă  l’exclusion de tout autre type de mĂ©decin.

La Cour a rejetĂ© le pourvoi au visa de l’article 6 paragraphe 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertĂ©s fondamentales qui consacre le droit Ă  ĂȘtre jugĂ© dans un dĂ©lai raisonnable.

Cette décision devrait donc mettre fin aux situations de blocage rencontrées dans ce type de dossiers.

Inaptitude du salariĂ© : l’employeur n’a pas besoin d’attendre les prĂ©cisions du mĂ©decin du travail pour commencer les recherches de reclassement

Par |2025-02-07T10:38:31+01:00mai 30th, 2024|A la une, actualités, actualités générales|

En cas d’inaptitude du salariĂ© Ă  son poste de travail, l’employeur doit rechercher Ă  le reclasser sur un autre emploi, en prenant en compte l’avis et les prĂ©conisations Ă©mises par le mĂ©decin du travail (C. trav., art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

Afin de l’orienter dans ses recherches de reclassement, l’employeur peut solliciter des prĂ©cisions du mĂ©decin du travail sur l’avis rendu.

La Cour de cassation est venue prĂ©ciser, dans un arrĂȘt rendu le 27 mars 2024, que l’employeur n’a pas l’obligation d’attendre le retour du mĂ©decin du travail pour engager ses recherches de reclassement.

Ainsi, l’employeur peut, comme c’était le cas en l’espĂšce, demander des prĂ©cisions supplĂ©mentaires au mĂ©decin du travail, tout en entamant ses recherches de reclassement le jour mĂȘme.

Le fait que le médecin du travail ait apporté postérieurement des précisions sur son avis ne remet pas nécessairement en cause le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement du salarié.

(Cass. soc., 27 mars 2024, n° 22-16.096)

L’accĂšs aux ASC du CSE ne peut ĂȘtre conditionnĂ© Ă  l’anciennetĂ© du salariĂ©

Par |2024-05-30T18:01:34+02:00mai 30th, 2024|actualités, actualités générales|

En l’absence de position de la Cour de cassation sur ce point, certains CSE ont instaurĂ© une condition d’anciennetĂ© pour l’accĂšs des salariĂ©s aux activitĂ©s sociales et culturelles (ASC), l’Urssaf admettant par ailleurs une condition d’anciennetĂ© limitĂ©e Ă  6 mois.

Dans l’affaire ayant donnĂ© lieu Ă  la dĂ©cision de la Cour de cassation du 3 avril 2024, un CSE avait instaurĂ© un dĂ©lai de carence de 6 mois avant de permettre aux salariĂ©s nouvellement embauchĂ©s de bĂ©nĂ©ficier des ASC.

A la suite de cette dĂ©cision, le syndicat de l’entreprise a saisi le Tribunal judiciaire estimant que, si le CSE peut instaurer des critĂšres de modulation pour l’attribution des ASC, il ne peut pas exclure totalement un salariĂ© du bĂ©nĂ©ficie de ces activitĂ©s. Or, en conditionnant l’attribution des ASC Ă  une anciennetĂ© minimale de 6 mois, le CSE excluait nĂ©cessairement tous les nouveaux embauchĂ©s, et les stagiaires.

La Cour d’appel avait dĂ©boutĂ© le syndicat de sa demande pour les motifs suivants :

  • La condition d’anciennetĂ© de 6 mois Ă©tait appliquĂ©e « de la mĂȘme maniĂšre Ă  l’ensemble des salariĂ©s, lesquels sont tous placĂ©s dans la mĂȘme situation Ă  l’Ă©gard d’un critĂšre objectif qui ne prend pas en compte les qualitĂ©s propres du salarié » ;
  • Les « critĂšres considĂ©rĂ©s comme discriminants pour exclure certains salariĂ©s de l’attribution des ASC sont la prise en compte de l’appartenance syndicale et la catĂ©gorie professionnelle » ;
  • Le comitĂ© « est lĂ©gitime, dans l’intĂ©rĂȘt mĂȘme des salariĂ©s, Ă  chercher Ă  Ă©viter un effet d’aubaine rĂ©sultant de la possibilitĂ© de bĂ©nĂ©ficier, quelle que soit l’anciennetĂ©, des ASC du comitĂ© rĂ©putĂ©es gĂ©nĂ©reuses ».

La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement, et censure la position de la Cour d’appel.

Au visa de l’article L. 2312-78 du Code du travail qui prĂ©voit que les ASC sont « Ă©tablies dans l’entreprise prioritairement au bĂ©nĂ©fice des salariĂ©s, de leur famille et des stagiaires » et de l’article R. 2312-35 qui liste les ASC pouvant ĂȘtre Ă©tablies dans l’entreprise, la Cour de cassation juge que l’ouverture du droit aux ASC « ne saurait ĂȘtre subordonnĂ©e Ă  une condition d’ancienneté ».

Ainsi, le CSE ne peut plus instaurer de condition d’anciennetĂ© pour l’accĂšs des salariĂ©s aux ASC. En effet, tous les salariĂ©s, et stagiaires, de l’entreprise doivent avoir accĂšs aux ASC, quelque soit leur anciennetĂ©.

(Cass. soc., 3 avril 2024, n° 22-16.812)

Rappels sur le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle

Par |2024-05-30T10:31:46+02:00mai 30th, 2024|actualités, actualités générales|

A travers un arrĂȘt rĂ©cent, la Cour de cassation fait quelques rappels sur le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle (Cass. soc., 07 mai 2024, n°22-10.905) :

1/ Tout d’abord, la Cour rappelle que les rĂšgles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dĂšs lors que (i) l’inaptitude du salariĂ© a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et (ii) que l’employeur avait connaissance de cette origine au moment du licenciement.

Tel Ă©tait le cas en l’espĂšce dĂšs lors que l’employeur savait que l’accident du travail Ă©tait Ă  l’origine du premier arrĂȘt de travail du salariĂ© et que ce dernier n’avait jamais repris le travail depuis la date de l’accident jusqu’Ă  la rupture du contrat.

2/ Ensuite, forte de cette conclusion, la Cour retient que l’inaptitude du salariĂ© Ă©tait d’origine professionnelle et que ce dernier pouvait, Ă  ce titre, bĂ©nĂ©ficier d’une indemnitĂ© d’un montant Ă©gal Ă  l’indemnitĂ© compensatrice de prĂ©avis.

Toutefois, elle rappelle que cette indemnitĂ© n’a pas la nature d’une indemnitĂ© de prĂ©avis et n’ouvre donc pas droit Ă  congĂ©s payĂ©s.

3/ Enfin, la Cour Ă©voque les consĂ©quences de l’absence d’information du salariĂ©, par l’employeur, des motifs rendant impossible son reclassement (obligation dĂ©coulant de l’article L. 1226-12 du Code du travail, lorsque l’employeur n’est pas dispensĂ© de l’obligation de rechercher un reclassement).

Elle vient ainsi prĂ©ciser que la mĂ©connaissance par l’employeur de cette obligation n’expose pas celui-ci aux sanctions prĂ©vues par l’article L. 1226-15 du Code du travail (qui renvoie lui-mĂȘme Ă  l’article L. 1235-3-1 du Code du travail : « indemnitĂ©, Ă  la charge de l’employeur, qui ne peut ĂȘtre infĂ©rieure aux salaires des six derniers mois »), mais le rend redevable d’une indemnitĂ© en rĂ©paration du prĂ©judice subi.

Autrement dit, le salariĂ© doit dĂ©montrer l’existence d’un prĂ©judice et en justifier l’étendue pour bĂ©nĂ©ficier de dommages et intĂ©rĂȘts au titre de la violation par l’employeur de son obligation de l’informer des motifs rendant impossible son reclassement. Le prĂ©judice liĂ© Ă  l’absence d’information Ă©crite n’est plus automatique, complexifiant ainsi la tĂąche du salariĂ©.

Voir aussi : Contestation de l’avis d’inaptitude : point de dĂ©part du dĂ©lai de recours et limitation des Ă©lĂ©ments mĂ©dicaux transmis au mĂ©decin mandatĂ© par l’employeur

La Cour de cassation reconnait encore de nouveaux préjudices automatiques

Par |2024-04-10T17:59:24+02:00avril 9th, 2024|actualités, actualités générales|

 

Jusqu’en 2016, la Cour de cassation appliquait la thĂ©orie du prĂ©judice automatique afin d’indemniser des salariĂ©s en raison du manquement de l’employeur Ă  ses obligations, sans qu’il ne soit nĂ©cessaire de dĂ©montrer un prĂ©judice pour le salariĂ©.

En 2016, la Cour de cassation a opĂ©rĂ© un revirement de jurisprudence et juge depuis que le salariĂ© doit rapporter la preuve d’un prĂ©judice afin d’ĂȘtre indemnisĂ© (Cass. Soc. 13 avril 2016, n° 14-28.293).

Ce revirement n’est cependant pas total et la thĂ©orie du prĂ©judice automatique a notamment subsistĂ© en matiĂšre de durĂ©e maximale du travail (Cass. Soc., 26 janvier 2022, n° 20-21.636 ; Cass. Soc., 11 mai 2023, n° 21-22.281 ; Cass. Soc., 27 septembre 2023, n° 21-24.782).

Dans deux rĂ©cents arrĂȘts, la Cour de cassation a une nouvelle fois appliquĂ© cette thĂ©orie du prĂ©judice automatique :

  • En matiĂšre de non-respect du temps de repos journalier d’un salariĂ© prĂ©vu par un accord collectif. À notre connaissance, c’est la premiĂšre fois que la Cour de cassation applique la thĂ©orie du prĂ©judice automatique s’agissant d’une disposition conventionnelle plus favorable que la loi (Cass. Soc., 7 fĂ©vrier 2024, n° 21-22.80) ;
  • En matiĂšre de droit Ă  l’image d’un salariĂ© dont l’employeur avait usĂ© sans obtenir l’accord de l’intĂ©ressĂ© (Cass. Soc., 14 fĂ©vrier 2024, n° 22-18.014).

Dans ces deux nouveaux cas, le salariĂ© faisant une demande de dommages-intĂ©rĂȘts n’a pas Ă  justifier de son prĂ©judice pour obtenir une indemnisation, mĂȘme si le montant restera toujours Ă  l’apprĂ©ciation des juges du fond.

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