NullitĂ© du licenciement pour dĂ©nonciation du harcĂšlement moral : la Cour de cassation abandonne lâexigence de qualification des faits
Le Code du travail protĂšge le salariĂ© ayant relatĂ© des agissements de harcĂšlement moral. DĂšs lors, si le salariĂ© Ă©tĂ© licenciĂ© pour avoir dĂ©noncĂ© des faits de harcĂšlement moral, son licenciement est nul, sauf en cas de mauvaise foi, câest-Ă -dire si le salariĂ© avait connaissance de la faussetĂ© des faits dĂ©noncĂ©s (art. L. 1152-2 et L.1152-3 du Code du travail).
PrĂ©alablement Ă lâarrĂȘt objet du prĂ©sent commentaire, la Cour de cassation conditionnait la protection du salariĂ© Ă la qualification des faits de harcĂšlement moral (Cass. Soc., 13 septembre 2017, n° 15-23.045).
Toutefois, dans un arrĂȘt du 19 avril 2023, la Haute juridiction a assoupli sa jurisprudence (Cass. Soc., 19 avril 2023, n° 21-21.053).
En lâespĂšce, une salariĂ©e a Ă©tĂ© licenciĂ©e pour faute grave pour avoir mis en cause lâattitude et les dĂ©cisions prises sa direction. ConsidĂ©rant avoir subi et dĂ©noncĂ© des agissements de harcĂšlement moral, elle a saisi le Conseil de prudâhommes afin que la nullitĂ© de son licenciement soit reconnue. La Cour dâappel a fait droit Ă sa demande.
Lâemployeur a alors formĂ© un pourvoi en cassation, en sâappuyant sur la jurisprudence de 2017 qui imposait au salariĂ© de qualifier les faits de harcĂšlement moral afin de bĂ©nĂ©ficier de la protection. Lâemployeur soulignait que la salariĂ©e nâavait jamais mentionnĂ© le terme de « harcĂšlement » dans son courrier ayant fondĂ© son licenciement pour faute grave.
Dans lâarrĂȘt commentĂ©, la Cour de cassation a procĂ©dĂ© Ă un revirement de jurisprudence. Elle considĂšre dĂ©sormais que, lorsquâau regard des termes employĂ©s par le salariĂ©, lâemployeur ne pouvait lĂ©gitimement ignorer que le salariĂ© dĂ©nonçait des faits de harcĂšlement moral, alors le salariĂ© bĂ©nĂ©ficie de la protection contre le licenciement, peu important qu’il n’ait pas qualifiĂ© les faits de harcĂšlement moral au moment de leur dĂ©nonciation. En lâespĂšce, la salariĂ©e avait fait Ă©tat dâune dĂ©gradation de ses conditions de travail et de son Ă©tat de santĂ©, ce qui caractĂ©rise le harcĂšlement moral et suffit donc Ă lui attribuer le bĂ©nĂ©fice de la protection.
En conclusion, prudence avant de licencier un salarié ayant dénoncé des faits pouvant constituer un harcÚlement moral !