L’article L 3121-58 du Code du travail réserve la conclusion d’un forfait jours aux cadres disposant d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps ou bien aux salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée.
La notion d’autonomie du salarié dans l’organisation de son activité est ainsi centrale : si un salarié ne dispose pas d’une autonomie suffisante, sa convention de forfait risque alors d’être privée d’effet. Dans un tel cas, le droit commun de la durée du travail trouve à s’appliquer et le salarié peut réclamer le paiement des heures supplémentaires qu’il aurait accompli.
La Cour de cassation a jugé, à plusieurs reprises, que l’élaboration d’un planning contraignant par l’employeur imposant la présence des salariés à des horaires prédéfinis est inconciliable avec le statut de cadre autonome. En conséquence, le salarié dont l’emploi du temps est déterminé par sa hiérarchie ne peut pas conclure une convention de forfait en jours (Cass.soc., 31 octobre 2007, n°06-43.876 – Cass.soc., 23 janvier 2013, n°11-12.323 – Cass.soc., 15 décembre 2016, n°15-17.568).
Récemment, la Cour de cassation vient de préciser que l’autonomie dont bénéficie le salarié dans l’organisation de son activité n’était pas antinomique avec les contraintes liées à l’organisation de l’activité. Dans un arrêt en date du 2 février 2022, elle a jugé que « la convention individuelle de forfait annuel en jours n’instaure pas au profit du salarié un droit à la libre fixation de ses horaires de travail indépendamment de toute contrainte liée à l’organisation du travail par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction » (Cass.soc., 2 février 2022, n°20-15.744).
En l’espèce, il s’agissait d’une vétérinaire salariée en forfait jours. La Cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation, a considéré que la fixation de demi-journée ou de journées de présence imposées par l’employeur, qui correspondaient aux rendez-vous donnés par le cabinet vétérinaire aux propriétaires des animaux, était compatible avec la qualité de cadre autonome. La Cour d’appel a également relevé que la salariée conservait la possibilité d’organiser, en dehors de ces contraintes, sa journée de travail et ses interventions à sa guise. En conséquence, l’employeur était donc bien-fondé à lui reprocher ses absences durant ces plages horaires pour motiver son licenciement pour faute grave.
L’autonomie des salariés n’est donc pas synonyme de liberté totale. Les contraintes liées à l’organisation de l’activité peuvent, dans une certaine mesure, permettre d’encadrer l’activité des salariés ayant conclu une convention de forfait en jours.
Pour aller plus loin : L’inopposabilité de la convention de forfait : le juge doit vérifier si la rémunération contractuelle opère paiement des heures supplémentaires